Le Maroc «est le seul pays de la région d'Afrique du Nord à avoir une vision formellement articulée de la migration, incarnée dans sa Stratégie nationale d'immigration et d'asile (SNIA)», relève une récente étude d'Oxfam sur la politique migratoire. L'ONG relève toutefois l'approche sécuritaire demeure favorisée dans les politiques de migration de l'Union européenne au Maghreb, notamment au Maroc et en Tunisie. La mise en place de cet outil juridique (ndlr SNIA) a été suivie de deux campagnes de régularisation pour les sans-papiers, en 2014 puis en 2017. Une première série de cartes de réfugiés et de demandeurs d'asile a été remise à près de 50.000 ressortissants, autorisés désormais à accéder au marché du travail formel, rappelle l'ONG. Mais Oxfam n'en remet pas moins en question « les agendas convergents des politiques migratoires de l'Union européenne et de l'Afrique du Nord« . « Depuis trop longtemps, l'Union européenne élabore des politiques migratoires faisant fi des priorités des pays partenaires au profit de ses propres priorités en matière de sécurité aux frontières et de questions nationales », fait elle noter. Cette tendance, poursuit Oxfam, a influencé les politiques de migration et d'asile des pays du Maghreb concernés, dont la Tunisie et le Maroc, créant une convergence des intérêts des Etats au détriment de ceux des personnes, soulignant ainsi que « l'Union européenne doit coopérer avec ses voisins dans l'optique de promouvoir un véritable intérêt commun : la protection des personnes et le respect de leurs droits« . Dans son rapport, l'ONG fait observer qu'au cours des cinq dernières années, les politiques de migration de l'Union européenne au Maghreb se sont focalisées sur la sécurisation plutôt que sur la protection des populations. De ce fait, la Tunisie et le Maroc ont été peu incités à réformer leurs systèmes de migration et d'asile, estime l'organisation. « L'objectif des politiques de l'Union européenne a été de décourager la migration en direction de ses frontières et de durcir les législations sur la migration et le droit d'asile des pays voisins. Si le nombre de personnes rejoignant chaque année les côtes européennes a diminué, les normes de protection des personnes migrantes et/ou demandeuses d'asile, déjà insatisfaisantes, se sont encore dégradées » dévoile le rapport. . S'agissant des systèmes de migration et d'asile du Maroc et de la Tunisie, le rapport d'Oxfam indique qu'ils sont « dépassés, souffrent d'un manque de réformes et offrent peu de protections juridiques structurelles aux personnes migrantes et/ou demandeuses d'asile« , soulignant que « ces deux pays sont dotés de lois sur l'immigration archaïques et ambiguës, qui donnent trop de place à l'élaboration de politiques ad hoc qui peuvent servir à répondre tactiquement à des contextes politiques internes et externes changeants« . Ce que recommande Oxfam Tout en épinglant les politiques migratoires Européenne au Maroc et en Tunisie, le rapport d'Oxfam livre une série de recommandations pour les deux parties. Pour les institutions et les Etats membres de l'Union européenne, Oxfam recommande de travailler avec les pays du Maghreb dans le but de promouvoir la conformité au droit international des réfugiés dans toute la région méditerranéenne, et interdire l'utilisation de fonds de l'Union européenne à des fins allant à l'encontre du droit international relatif aux droits humains. L'ONG préconise pareillement d'effectuer et publier régulièrement des évaluations sur l'impact des politiques migratoires européennes sur les populations les plus vulnérables, éviter de rendre l'aide aux pays partenaires conditionnelle à leur coopération avec les demandes de l'Union européenne concernant les retours et réadmissions ou la gestion des frontières et enfin d'impliquer la diaspora, les organisations de réfugié-e-s et de migrant-es, en particulier celles gérées par des femmes, ainsi que l'ensemble de la société civile dans la conception des politiques migratoires. Pour ce qui est des gouvernements Marocain et Tunisien, Oxfam recommande d'entamer de toute urgence une réforme de la législation nationale sur le droit d'asile afin d'établir une procédure de demande d'asile rapide, efficace et conforme au droit international des réfugiés dans chaque pays et de réformer la législation migratoire nationale afin d'offrir une protection accrue aux personnes concernées et créer des opportunités d'intégration et d'accès à la citoyenneté. Elle préconise de lutter contre le racisme, la xénophobie et la discrimination à l'encontre des migrant-e-s et d'impliquer la diaspora, les organisations de réfugié-e-s et de migrant-es, en particulier celles gérées par des femmes, ainsi que l'ensemble de la société civile dans la conception des politiques et lois migratoires.