Le chef de gouvernement tunisien nommé, Habib Jemli a viré tous les partis de son prochain gouvernement après que trois des quatre formations aient refusé ses conditions et se sont rétractées à la dernière minute. Il a annoncé lors d'une conférence de presse qu'il allait désormais créer un gouvernement de compétences nationales indépendantes, un scénario, est décrié en Tunisie. C'est d'ailleurs en raison de ces « indépendants » que la plupart des partis présents aux négociations pour la formation du nouvel exécutif tunisien, ont refusé de poursuivre la stratégie jusqu'à l'annonce de ce gouvernement. Et pour cause, le Premier ministre a fait le choix de confier les ministères les plus importants, ceux ayant trait à l'économie et au développement du pays à ces indépendants, laissant aux autres formations le choix entre 15 autres porte-feuilles ministériels. Mais en plus de cela, Habib Jemli a refusé de discuter des noms qu'il allait nommer avec les membres des partis. Pour le chef de gouvernement nommé, certains partis ont posé des conditions « extrêmes » pour participer à l'exécutif et il a accepté pour aller de l'avant et dépasser la situation de crise actuelle. Et d'ajouter qu'il pensait vraiment que tous les partis étaient d'accord pour cette formule jusqu'à samedi où il avait affirmé qu'il allait présenter son équipe courant cette semaine. Se disant « surpris » par le refus dimanche des partis d'adopter la conception qu'il avait imaginée, il a affirmé n'avoir eu d'autre choix que de faire fonctionner son plan B, à savoir, créer un gouvernement entièrement de compétences indépendantes. En ce sens il a assuré qu'il refusera le moindre poste à quiconque serait affilié à des structures ou des bureaux de n'importe quel parti. Ennahda faiseur et destructeur d'alliances Mais il semblerait que cette version ne passe pas chez les observateurs, la presse et certains partis politiques qui estiment que cette démarche était calculée depuis le départ. D'autant plus que Habib Jemli n'est pas le mieux placé pour parler d' »indépendance », lui qui se réclame comme tel, est clairement proche du mouvement islamiste Ennahda, seul parti à n'avoir pas quitté la table des négociations et principal protagoniste dans les négociations, faiseur et destructeur d'alliances. En effet, le chef du gouvernement a fait, pendant trois ans, partie du bureau des études d'Ennahda, ce même parti qui est arrivé en première place des élections législatives et dont le chef de file Rached Ghannouchi a pris la tête du Parlement tunisien. Si l'on ajoute avec cela, le président tunisien qui n'a pas caché ses idées conservatrices et proches du courant de pensée d'Ennahda, le scénario semble se dessiner. Pour les observateurs, nul de doute, l'annonce de ce gouvernement d' »indépendants », de « pseudo-indépendants » comme les a appelés Zouhair Maghzaoui, le secrétaire général du Mouvement du peuple (Echaab) qui devait participer à ce gouvernement, était calculé à l'avance. Dans un communiqué, le parti Afek Tounes a, lui, estimé que cette annonce représentait « une tentative de manipuler l'opinion publique au nom de l'indépendance, de camoufler des alliances non déclarées et de ne pas en assumer ses conséquences« . Rapprochement Chahed/Ghannouchi Alors que les tractations achoppent, les déclarations se multiplient, à l'instar de l'ancien chef de gouvernement de feu Beji Caid Essebsi, Youssef Chahed, dont la formation, Tahya Tounes, a fait part de son refus de participer au gouvernement pour « absence de conditions de réussite ». Et pourtant, le malheureux candidat aux présidentielle a rencontré dans la soirée du lundi 23 décembre, le président du parlement, et par ailleurs leader d'Ennahda, Rached Ghannouchi. Si officiellement, on parle démarrage des travaux du parlement et des commissions parlementaires, les observateurs estiment que cette rencontre, pou le moins « contre-nature », est étroitement liée aux données autour de la formation du gouvernement et l'absence d'un accord avec les partis politiques. Youssef Chahed n'a jamais dissimilé ses ambitions pour jouer les premiers rôles sur la scène politique tunisienne. Pour satisfaire son gros appétit, Jemli, et Ghannouchi derrière, devront lui proposer un gros lot de consolation, en attendant le prochain scrutin présidentiel.