Au lendemain de la recomposition du gouvernement El Othmani à l'issue d'un Conseil des ministres présidé par le roi, les observateurs de la scène politique marocaine s'interrogent sur la capacité de cette nouvelle équipe à surmonter les défis liés à la gestion des affaires publiques. Réduction des membres (en termes de nombre de ministres, c'est le plus petit gouvernement de l'histoire du Maroc), fusion de départements à priori complémentaires, élaboration d'un nouveau modèle de développement pour le pays, rectification des lacunes décriées durant la première moitié du quinquennat exécutif… Le politologue et président du Centre Atlas pour l'analyse des indicateurs politiques institutionnels, Mohamed Bouden, livre pour Hespress FR une analyse de la situation. Hespress FR: La nouvelle équipe gouvernementale réunie autour de Saâd-Eddine El Otmani a été officiellement désignée. Quelle première lecture à adopter au lendemain de ce changement ? Et que pensez-vous des nouveaux visages qui font leur entrée au gouvernement Mohamed Bouden: D'importants changements sur la structure gouvernementale ont été opérés. Je pense que le changement ne concerne pas uniquement la composition, ou ingénierie gouvernementale, mais également un changement sur la logique gouvernementale dominante par le passé. Ce qui est certain c'est que le gouvernement s'est doté de six nouvelles compétences, mêlant l'appartenance partisane et l'émancipation de cette dernière. Et puis, la présence de 4 femmes dans le gouvernement rentre dans le cadre du renforcement de la place de la femme dans la prise de décision politique. Il ne faut pas oublier que la composition gouvernementale est divisée en quatre corps homogènes. Nous avons le Chef du gouvernement, le ministre d'Etat, 19 ministres et 5 ministres délégués. Au niveau de la continuité, nous remarquons le maintien des mêmes ministres dans des secteurs régaliens, en y ajoutant d'autres. Mais 14 sont restés dans leur même département. Et par rapport au changement de ministres d'un secteur à l'autre, trois ministres ont en effet changé de portefeuille. Quels sont selon vous les premières tâches que cette nouvelle composition gouvernementale aura à accomplir ? Il y aura certainement des nouvelles missions. D'importants secteurs répondant aux aspirations de la nouvelle phase, annoncée par le Roi lors des discours de commémoration de la 20e fête Trône et du 66e anniversaire de la Révolution du roi du peuple, ont été ajoutés, avec un modèle de développement qui reste à élaborer. Ce dernier va structurer cette nouvelle phase et encadrera les droits des générations futures. Je pense que le pays doit aller de l'avant dans le cadre d'un gouvernement d'unité nationale, en dépit des appartenances partisanes et je m'explique: les enjeux doivent précéder, pour ainsi dépasser les effets externes, notamment en rapport avec l'homogénéité gouvernementale et celle de la majorité. Je pense qu'il n'est pas fortuit de parler de ce sujet au sein du gouvernement parce que les composantes politiques doivent être conscientes de la phase que nous vivons. Elles sont appelées à s'entendre et à gagner du temps et se rejoindre sur les priorités que tout le monde connait. Le nouveau gouvernement ne peut avoir comme défis le classement des priorités. Du moins, au cours des 100 premiers jours de son action, ce gouvernement doit réaliser quelque chose d'important pour les citoyens. Diriez-vous que nous assistons à une rupture par rapport à la première moitié du mandat de ce gouvernement ? C'est juste dans la mesure où, par exemple, qu'il n'y a plus de ministère de la Communication. Aujourd'hui, nous avons un Conseil national de la presse (CNP), et nous parlons donc d'un secteur indépendant. Puis, les Relations avec la société civile a également été retiré parce que c'est un acteur social important qui contribue dans le cadre général de la démocratie participative. Il n'a pas besoin d'un département gouvernemental de ce niveau. L'investissement a aussi été retiré, car d'autres structures remplissent ce rôle; comme les Centres régionaux d'investissement (CRI), l'Agence nationale de développement de l'investissement. Nous avons aussi l'exemple du retrait du ministère des Affaires générales et de la gouvernance qui relève en réalité des compétences du département des Finances. Idem pour la Réforme de l'administration car ce chantier a des objectifs connexes, communs au département d'Economie. L'administration est l'une des variables stimulant ou freinant l'économie et l'investissement, selon la politique adoptée. Je voudrais également revenir sur la fusion entre la Culture, la Jeunesse et les Sports. Les trois sont complémentaires et permettent de condenser les efforts du gouvernement car ces secteurs disposent d'unités territoriales non centralisés comme c'est le cas des Maisons de jeunes et les Maisons de culture.