Vendredi dernier, Aziz Akhannouch a endossé une nouvelle casquette. Celle de maire de la ville d'Agadir. Désormais, vous aurez Akhannouch à toutes les sauces: gouvernementale, régionale, partisane, entrepreneuriale... Entre un Conseil des ministres, les sessions des questions orales au Parlement (avec ses deux chambres) et les réunions ministérielles, ponctuées de quelques entrevues par-ci et par là, Akhannouch doit sauter dans un avion -ou plutôt jet privé- pour prendre part aux travaux du Conseil de la ville gadirie. Une aberration, s'époumonent ses détracteurs, un suicide politique annoncé, chuchotent les sceptiques. Il est clair que Akhannouch, Ssi Aziz pour les intimes, est investi d'une grande mission : offrir une nouvelle virginité au paysage politique marocain. Il est question de le rendre plus attrayant, et moins indéchiffrable, aux yeux des grandes fortunes marocaines et des capitaines d'industrie nationaux qui fuient la politique comme la peste! L'on raconte que grâce à l'engagement politique de cette nouvelle recrue du système, des jeunes appartenant à des fortunes gadiries, intrinsèquement liées aux milieux des affaires, ont décidé de se jeter dans la politique. Si au départ ce mariage incestueux entre politique et argent hérissait les poils, à présent que Akhannouch concentre entre ses mains les pouvoirs central et régional, l'indignation est plus que légitime. Car est-il sain dans un paysage politique gangrené par les pratiques iniques, d'être à la fois juge et partie?
Pour ses partisans, l'homme est un tout-puissant. Pragmatique, il ne se lance jamais dans une entreprise hasardeuse, sans être sûr de pouvoir relever, haut la main, le pari, à en croire ceux qui l'ont côtoyé . «A travers cette responsabilité, il aura l'occasion de connaître de près les problèmes liés à la gestion communale et ses déboires. Il compte atterrir, chaque semaine, à Agadir pour superviser les projets et veiller sur leur mise en application», laisse t-on entendre dans les cercles proches de ce « plénipotentiaire » homme politique. De plus, nul ne conteste que le nouveau messie de la politique marocaine, jouit de qualités humaines incontestables, ayant contribué à bâtir son personnage, aussi bien envié qu'admiré. Mais jusqu'à preuve du contraire, Akhannouch est un simple mortel parmi les mortels et n'a guère le don de l'ubiquité. D'où puisera t-il sa force pour jongler entre deux missions et mener à bon port cette entreprise, aux allures de piège? La recette du magnat du pétrole et des affaires, est-elle applicable à l'entreprise Maroc SA ? Certes Akhannouch l'homme d'affaires a fait ses preuves dans l'impitoyable monde des affaires, mais cette concentration de pouvoirs entre les mains d'un seul homme n'est-elle pas annonciatrice d'un échec? Le projet est chimérique. Or, faut-il pour autant jeter la première pierre à Akhannouch sans toutefois lui accorder une période de grâce ? De fait, ses adversaires réclament son repentir avant qu'il commette son péché. La situation est inédite, pour ne pas dire ubuesque cependant, mais n'a-t-il pas droit à une chance ? Ses résultats aux élections et surtout la gestion post-scrutin nous ont donné un avant-goût de cette nouvelle ère «akhanouchienne». Le chef de la primature marocaine a placé le consensus au centre de son action. L'alliance tripartite en est le meilleur exemple comme en attestent ses résultats. Saura-t-il reconduire cette petite victoire à grande échelle et imprégner la scène politique marocaine de son esprit « fédérateur » et son goût prononcé pour les missions de haute voltige? Le temps dira tout à la postérité…