La pandémie du Coronavirus (Covid-19), l'ennemi invisible qui a chamboulé les habitudes à travers le monde et astreint plus de la moitié de la population mondiale à la quarantaine, est en train de bousculer profondément les traditions et les rituels du mois sacré de Ramadan dans les pays musulmans. A l'image de tous les musulmans du monde, la prolongation du confinement et le maintien des mesures de distanciation sociale jusqu'au 20 mai prochain a poussé les Marocains à accueillir le mois de Ramadan dans des circonstances exceptionnelles, principalement marquées par l'état d'urgence sanitaire. Les changements qui découlent de l'épidémie ne se limitent pas seulement aux préparatifs et à l'enthousiasme habituels des Marocains à l'occasion du mois béni, mais affectent également le rythme de vie dans tous ses aspects et rites cultuels et sociaux. Si les Marocains célèbrent habituellement l'arrivée du mois de jeûne quelques jours à l'avance, cette année la crainte de l'infection et le flux ininterrompu de nouvelles sur la pandémie, ont dominé leurs conversations et les ont privés des rituels socio-culturels qui en découlent. D'autant que les préparations consacrées au fil des ans et l'atmosphère ramadanesque, fortement marquées par l'état d'urgence, sont devenues quasiment sans saveur. Malgré l'augmentation de la fréquence des achats durant les jours qui ont précédé le mois de Ramadan, les souks qui d'habitude ne désemplissent pas pendant cette période de l'année, sont vidés de tous ces gens qui accouraient pour s'approvisionner en produits alimentaires indispensables à la cuisine ramadanesque.
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Dans ce contexte, Najat, employé dans le secteur privé et mère de trois enfants, a affirmé dans une déclaration à la MAP « vivre dans un climat un peu morose et pesant, surtout au regard de l'augmentation des cas de contamination », un malaise, qui selon elle, « fait perdre la joie et l'enthousiasme avec l'avènement du mois sacré ». « D'habitude, on est enthousiaste à l'approche de ce mois et je fais partie des femmes qui s'adonnent aux achats durant cette période, mais dans ces circonstances exceptionnelles je me retrouve astreinte à rester chez moi et à ne sortir qu'en cas d'urgence absolue », a t-elle poursuivi. En plus du télétravail, Najat partage son emploi du temps entre l'accompagnement de ses enfants qui suivent des cours à distance, et les préparatifs de base pour le mois sacré, bien que modestes comparés à l'année précédente. « En réalité, je n'arrive pas à concilier entre les préparatifs ramadanesques, le suivi de mes enfants qui reçoivent un enseignement à distance et mon télétravail », a t-elle confié. Quelques jours avant le début du mois sacré, l'Organisation mondiale de la santé (OMS) a émis des recommandations à l'attention des pays musulmans déconseillant ainsi toutes les célébrations religieuses de masse afin d'endiguer la propagation de l'épidémie du Coronavirus. Dans ce contexte, le Maroc, comme nombre de pays musulmans, a décidé de prolonger l'état d'urgence sanitaire qui interdit les rassemblements, impose la fermeture des frontières, la suspension les vols, l'obligation de confinement et de port du masque de protection, ainsi que la fermeture jusqu'à nouvel ordre des écoles et des mosquées. Et si les mosquées et les rues adjacentes sont généralement remplies de fidèles pendant ce mois pour notamment la prière de Tarawih, le Coronavirus a cette année privé les Marocains de leurs rituels religieux les plus importants et les a forcés à effectuer la prière du Ishâa et de Tarawih dans les maisons au lieu des mosquées.
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À cet égard, Abderrahim, employé et père de deux enfants, a confié à la MAP que la prière de Tarawih est l'un des rituels les plus importants que l'on est obligé d'abandonner pour des raisons d'urgence sanitaire. « Mais que pouvons-nous faire? le confinement demeure essentiel et nous nous y tiendrons jusqu'à ce que le virus soit contrôlé et les choses redeviennent normales », a-t-il estimé. L'une des habitudes sociales les plus ancrées dans la société marocaine qui a été abandonnée au temps de Coronavirus, est l'échange de visites familiales et la préparation de petits plats du Ramadan pour accueillir la famille et les amis autour de la table du ftour, un rituel social que les Marocains ne manquent pas pour renouer les liens avec leurs proches à l'occasion du mois sacré. Il semble en gros que la pandémie du Coronavirus a eu raison de traditions socio-culturelles qui ont été de tout temps une source de fierté et une opportunité pour les retrouvailles familiales. L'épidémie a en même temps favorisé le lancement d'un appel en faveur de la valorisation des initiatives de la société civile et des politiques publiques dans les domaines de la solidarité, pour fournir un soutien plus large aux classes vulnérables dans une approche fondamentalement humaine et citoyenne. Si les célébrations accompagnant cette année le mois de jeûne se trouvent chamboulées sur fond des craintes liées à la propagation du Covid-19, les valeurs de solidarité, d'entraide et de patriotisme en tant que patrimoine précieux des Marocains sont toujours au rendez-vous.