Représentant 3,4% du PIB, le poids des dispositions fiscales dérogatoires est sensiblement pareil quen France. Face à labsence dévaluation, impossible de mesurer la portée effective des dépenses fiscales. La Loi de Finances 2006 tente dy remédier. Exonérations, déductions, crédits dimpôts, taux préférentiels : les exceptions aux règles de droit commun restent assez nombreuses au niveau de la fiscalité marocaine. Ces mesures considérées comme des dépenses fiscales entraînent, de ce fait, non seulement des contraintes budgétaires importantes, mais posent surtout des problèmes liés à la maîtrise des finances publiques et à la simplification fiscale. Il existe à ce titre 337 dispositions fiscales dérogatoires réparties entre les impôts directs (37%) et les impôts indirects (63%), dont 30,3% ont fait lobjet dune évaluation budgétaire et montré que 58,8% concernent la TVA. En 2004, ces mesures ont eu un coût évalué à 15 Mds de DH, ce qui représente 3,4% du PIB (même poids que la France), dont 7,9 Mds de DH de TVA et 3,9 milliards pour lIS. En les situant dans leur contexte général de politique économique, les dépenses fiscales sont analysées au regard des aides directes, lesquelles sont affectées à des fonds comme le Fonds Hassan II pour le développement économique et social, le Fonds de promotion des investissements, le Foman, le Fortex Les aides directes débloquées en 2004 ont ainsi totalisé quelque 8 Mds de DH. A elles deux, les aides publiques, directes et indirectes se sont élevées en 2004 à près de 23,2 milliards de dirhams, soit 5,2% du PIB, dépassant les dépenses dinvestissement réalisées par lEtat. Seule une évaluation des dépenses fiscales peut, à cet égard, permettre dharmoniser un tant soit peu le fossé qui existe entre les aides à caractère fiscal et les dépenses publiques directes. Dans un contexte où la maîtrise des finances publiques semble être lune des priorités du gouvernement, la fiscalité dérogatoire reste donc sous-tendue par des enjeux essentiels, notamment la maîtrise de limpact budgétaire de ces mesures, leur efficacité et la simplification fiscale. En cela, la multiplicité des techniques fiscales (réductions, exonérations, déductions, abattements, crédit dimpôts ) est pour le moins génératrice dincohérences, voire de dérives budgétaires. Tout autant, la superposition des mesures dérogatoires et leur instabilité pour certains secteurs est source de complexité. On remarquera, à ce titre, que la panoplie de mesures mises en place pour favoriser tant la création dentreprises que leur mise à niveau, utiles pourtant pour ces petites entités, nen donne pas moins davantage de visibilité à ce secteur et ne permet guère de mesurer limportance de laide publique. Evaluer laction de lEtat Face à labsence dévaluation de laction publique en la matière, la portée des mesures fiscales dérogatoires a toujours été sujette à discussion. Comme le soulignait un économiste dans lune de nos précédentes éditions (cf/ finances news.press.ma), «on ne peut apprécier la portée dune politique si on ne lévalue pas a posteriori ( ) Le manque dévaluation entretient le doute sur lintérêt effectif de la majeure partie des mesures dallègements fiscaux, surtout que certaines dentre elles semblent être en contradiction avec les objectifs poursuivis par le Maroc, notamment en termes de simplification et déquité fiscales». Cela pour dire que, jusquà présent, les dépenses fiscales requéraient une attention moindre que les dépenses budgétaires de la part des pouvoirs publics. Cette situation devrait être corrigée avec lentrée en vigueur de la Loi de Finances 2006, en ce sens que «les incitations fiscales seront recensées et leurs effets évalués à la lumière des objectifs attendus». Aussi, comme cela se fait dans les pays développés, il sera désormais élaboré un rapport annuel sur les dépenses fiscales pour «mieux clarifier les logiques dintervention publique et les adosser à des bases claires et rationnelles accordant la place quelles méritent à lévaluation et à lefficience». Cette démarche paraît dautant plus justifiée que les finances publiques devront faire face à des contraintes majeures : la baisse des recettes douanières (inhérente au processus de démantèlement) et des recettes non fiscales (privatisations et réduction des dividendes), ainsi que la multiplication des contrats-programmes signés avec le secteur privé. Il sagira donc, au regard des contraintes budgétaires, dopérer un toilettage des dispositifs dérogatoires assortis de coûts de gestion élevés et dont limpact est insignifiant, tout en faisant fi des mesures dallègement à caractère structurel qui appartiennent à léquilibre général de limpôt. Ce qui devrait permettre à lexécutif «de se donner les moyens darbitrer entre les types de soutien à employer et doptimiser ainsi les dépenses nécessaires à la concrétisation de sa politique économique et de concevoir les actions de réformes, budgétaire et fiscale, dans une vision globale et cohérente alliant efficacité, transparence et équité».