Lélaboration des Lois de Finances sera de plus en plus difficile. Point commun avec le précédent Budget : maîtrise des équilibres macro économiques et une connotation sociale très prononcée. Caisse de Compensation : la bête noire du gouvernement. Une fois nest pas coutume. Le Premier ministre a reçu mercredi dernier dans sa résidence de Rabat, la presse nationale afin de lui expliquer les tenants et aboutissants du projet de Loi de Finances 2006. Serein et sans enthousiasme apparent, comme ce fut le cas lannée dernière à loccasion de la présentation de la Loi de Finances 2005, Driss Jettou a brossé les grandes lignes dudit projet élaboré, il faut lavouer, en tenant compte de moult paramètres tant exogènes quendogènes. Demblée, Jettou a tenu à avouer que «lexercice 2005 na pas été du tout facile», et de souligner, avec sagesse, que «lélaboration des Lois de Finances sera de plus en plus difficile». Selon lui, deux choses importantes, qui ont les mêmes effets en ce sens quelles impactent différemment le Budget, méritent dêtre soulignées. La première, qualifiée par Jettou délément négatif, a trait au poids de la Caisse de Compensation (12 Mds de DH) qui devient insoutenable, à tel point quil est question de réfléchir sérieusement sur le devenir de cette entité. Sur ce dossier épineux, le gouvernement semble décidé à apporter une solution définitive, quand bien même aucun deadline na été encore retenu. «Le gouvernement va faire des propositions, mais il faut savoir que ce sont des produits sensibles qui sont concernés», précise le Premier ministre. En effet, à elle seule la Caisse de Compensation englobe plusieurs produits de grande consommation, notamment le gaz butane dont lenveloppe dépasse les 3 Mds de DH, la farine, le sucre, ainsi que lessence et le gasoil à la pompe. En cela, le retour au système dindexation, comme le préconisent les observateurs avertis, «ne peut être fait de manière brutale», estime Jettou qui reconnaît toutefois que «nous gagnerons à revenir à lindexation». Cest loption vers laquelle on tend manifestement. La seconde chose, jugée positive par Jettou, concerne les recettes de privatisation, même si elles sinscrivent en baisse dans lactuelle Loi de Finances, sétablissant à 4,3 Mds de DH. «Cest une bonne chose dans la mesure où nous acquérons de plus en plus dindépendance par rapport aux recettes de privatisation», soutient le Premier ministre. Au total donc, le Budget est «grevé» de quelque 12 Mds de DH, dont 5 milliards de plus engloutis par la Caisse de Compensation et 7 Mds en référence aux recettes de privatisation retenues dans le cadre de la Loi de Finances 2005. Maîtrise des équilibres Tenant compte de lensemble de ces contraintes, le projet de Loi de Finances 2006 a eu pour souci majeur la préservation des équilibres macro économiques, cheval de bataille depuis toujours de largentier du Royaume, Fathallah Oualalou. Dans cette optique, linflation devrait être maintenue autour de 2%, alors que le taux de croissance prévu est de 5,4%, tenant compte notamment dune campagne agricole moyenne de 60 millions de quintaux, soit la moyenne des cinq dernières années, après une campagne céréalière médiocre de 42 millions de quintaux en 2004-2005. La situation prévisionnelle des produits et des charges se solderait, quant à elle, par un déficit prévisionnel de lordre de 16,1 milliards de dirhams, soit 3,2% du PIB. Dans ce sens, en intégrant lapurement darriérés (4,2 milliards de dirhams), le Trésor devra mobiliser quelque 20,3 milliards de dirhams pour le financement du déficit. Avec des flux nets extérieurs négatifs de 2,1 milliards de dirhams, le besoin de financement intérieur serait denviron 22,4 milliards de dirhams. Ainsi, est-il précisé, «compte non tenu des opérations de gestion active de la dette, le taux dendettement atteindrait 70% du PIB en 2006, en hausse de 0,8 point du PIB par rapport à 2005. Lendettement intérieur serait de 56,7% du PIB, en augmentation de 0,7 point par rapport à lexercice 2005 actualisé, et celui extérieur baisserait de 1,5 point pour se situer à 13,3% du PIB». De lavis de Jettou toutefois, «cest un Budget très ambitieux, contrairement à ce qua laissé entendre une certaine presse». «Comme pour lexercice précédent, ce Budget a également une connotation sociale très prononcée», laisse-t-il entendre. Il respecte en cela les engagements du gouvernement concernant lInitiative nationale pour le développement humain qui va, cette année, mobiliser 1,5 Md de DH. Tout autant, léducation nationale et la santé ont vu leur budget amélioré, tandis que la mise en uvre des grands programmes sociaux va se poursuivre (habitat social, eau potable, électricité, désenclavement ). Dans le même sens, une importance particulière a été accordée au monde rural, à travers, entre autres, laccompagnement du département de lAgriculture pour un montant global de 2,6 Mds de DH. Concernant les investissements publics, ils sont portés de 75 à 86,5 Mds de DH cette année et portent, entre autres, sur lamélioration des infrastructures. Sur ce point précis, Jettou précise que «le rythme de réalisation des infrastructures est respectable», soulignant par ailleurs que, contrairement à ce qui se passait auparavant, plusieurs programmes sont lancés et finalisés par le même gouvernement. Cela tient au fait, poursuit-il, «quil y a une très grande maîtrise des délais dexécution des programmes, ce qui permet par ailleurs de maîtriser les coûts». A preuve, en ce qui concerne la réalisation des autoroutes, le contournement Settat-Marrakech est finalisé et va ouvrir dici fin octobre, tandis que lautoroute Settat-Marrakech sera terminée dici la fin de lannée. Bien évidemment, léconomie nationale étant fortement exposée aux chocs exogènes, certains risques pourraient altérer les prévisions : il sagit, entre autres, du prix volatile du pétrole, la pression concurrentielle inhérente à labolition de lAccord multifibre, ainsi que la pluviométrie qui pourrait compromettre la campagne agricole.