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Endettement du Maroc : Une levée à l’international sous le signe de la vigilance
Publié dans Finances news le 28 - 04 - 2010

* 3 ans après la première sortie du Maroc sur le marché de la dette à l’international, le gouvernement s’apprête à réitérer l’opération dans des conditions… plus avantageuses.
* Si cette levée de fonds devra renflouer les caisses de l’Etat et lui permettre de respecter ses engagements, il n’en demeure pas moins que ses effets ne seront pas que positifs…
Après les 500 millions d’euros levés sur le marché de la dette à l’international en 2007, le Maroc s’apprête à réitérer l’opération en 2010. C’est du moins ce qu’avait affirmé le ministre des Finances, Salaheddine Mezouar, au début du mois d’avril courant. Si l’information circulait dans les milieux d’affaires depuis plusieurs mois, en raison des besoins croissants du Trésor en fonds et qui ne pouvaient être assouvis sur le marché local au vu de la sous-liquidité régnante depuis plus de deux années, nul ne pouvait en revanche prédire le timing dans lequel interviendrait cette levée. Jusqu’à ce que l’autorité publique l’annonce «pour les prochaines semaines». Il semble que le ministère des Finances attendait la révision de la notation du pays avant de s’engager dans une quelconque annonce officielle. D’ailleurs, une fois l’Investissement Grade obtenu de l’Agence internationale de notation Standard & Poor's, l’argentier du Royaume n’a pas tardé à fixer un délai court terme pour une levée de fonds à l’étranger. Un communiqué du ministère précise même que le Maroc a d’ores et déjà mandaté Barclays Capital, HSBC et Natixis en tant que chefs de file pour cette émission sur le marché international dont la maturité serait de 10 années. Toutefois, rien ne filtre encore sur le montant que devrait lever le Maroc. «Il sera fonction de notre appréciation des besoins de financement de l’économie nationale», répond vaguement le ministre des Finances lors d’un récent point de presse. Pour rappel, Standard & Poor's a rehaussé, en mars dernier, la note du crédit souverain de la dette à long terme en devises de «BB+» à «BBB-» et de la dette en monnaie locale à long terme de «BBB» à «BBB+» du Royaume avec des perspectives stables.
Aujourd’hui, «les conditions se sont nettement améliorées et sont donc propices pour lever des fonds sur les marchés des capitaux à des conditions favorables, pour accompagner les programmes d'investissements et répondre aux besoins de financement de l'économie», avait déclaré le ministre de l'Economie et des Finances, Salah Eddine Mezouar. D’autant plus que la note accordée au Maroc par Standard & Poor's devrait lui permettre d'obtenir des conditions de financement plus favorables sur le marché international, à travers notamment la réduction de la prime de risque, surtout lorsque l’on sait que dans l’état actuel de la finance internationale, il n’est pas évident pour les investisseurs de trouver des placements aussi sûrs que d’emprunter à des Etats jouissant des faveurs des agences de notation.
L’endettement, pas forcément une bonne affaire ?
Cependant, plusieurs observateurs estiment que cette levée de dette à l’étranger ne devrait pas être prise à la légère. Dans la communauté des affaires, l’on redoute en effet que le relèvement de la notation du Maroc ne soit un cadeau empoisonné, dans le sens où cela lui donne les moyens d’aggraver son taux d’endettement. Estimée à 20,8% du PIB à fin 2009, la dette publique extérieure est ainsi appelée à augmenter significativement, notamment avec les récents prêts accordés au pays par différentes institutions internationales dont la Banque mondiale et le FMI. Cette situation est d’autant plus problématique quand on compare le taux d’évolution de l’endettement du Maroc à la création de richesse par le Royaume. Si entre 2008 et 2009 l’encours de l’endettement extérieur du pays s’est accru de près de 14%, la création de richesse représentée par la croissance du PIB, n’a pas dépassé 6%. Et l’exemple des pays comme Dubaï et la Grèce qui vivaient la même situation n’est plus un secret pour personne.
L’autre crainte qui entoure l’opération de levée de fonds à l’étranger réside dans les conditions d’octroi du prêt en elle-même. S’il est indéniable que le Maroc obtiendra un taux bas pour son emprunt au vu des conditions actuelles du marché, il n’est cependant pas exclu que ce taux sera appelé à augmenter significativement dans un avenir proche, surtout si la reprise de l’économie mondiale se confirme durant l’année en cours. Cela devrait en effet impacter d’une manière certaine le montant des remboursements de cette dette par le Maroc. D’autant plus qu’historiquement des économies plus avancés que le Maroc se sont retrouvées dans cette situation et s’en sont difficilement sorties, comme l’Argentine qui, à la fin des années 90, s’est retrouvée en cessation de paiement et était devenue incapable de couvrir ses importations essentielles, alors que la majorité des ressources de ses exportations était destinée aux remboursements des créances en devises.
D’autres experts vont encore plus loin et estiment qu’il y a deux autres facteurs qui pourraient entraîner le surendettement et des problèmes à cause de la bonne note du Maroc. A commencer par «L’Aléa Morale», une terminologie très connue des professionnels de l’assurance : quand on se sent préservé d’un risque, on a tendance à moins s’en protéger. La bonne note du Maroc induit une certaine confiance du gouvernement dans son économie, ce qui le pousserait, éventuellement, à prendre moins de précautions dans sa gestion de l’endettement. Le second facteur est ce qu’a appelé l’ancien président de la Federal Reserve américaine, Alan Greenspan, «L’exubérance irrationnelle». Il s’agit en fait de la ruée des prêteurs sur un marché par optimisme, et qui est suivie d’un retrait précipité quand la donne change. Ce départ rapide des fonds a généralement des conséquences dramatiques sur le pays emprunteur.
Dans ces conditions, le Maroc serait amené, si emprunt à l’étranger il y a, à utiliser l’argent levé dans des investissements à caractère rentable de façon à en assurer le remboursement. Chose qui est loin d’être acquise.


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