* Les provisions techniques représentent 70% du total bilan d'une compagnie d'assurance, c'est ce qui explique en partie la force de résilience du secteur. * A la mi-2010, la quasi-totalité des compagnies d'assurance auront satisfait au dispositif de contrôle interne. * Désormais, elles sont appelées à communiquer à l'Administration sur ce qui se passe en interne. * La menace pourrait néanmoins venir des accords de libre-échange. Dans un contexte marqué par l'incertitude et l'insécurité, la gestion du risque dans les compagnies d'assurance s'impose de plus en plus comme une nécessité. Au niveau international, la crise des subprimes à la mi-2008 ayant entraîné la faillite d'opérateurs financiers importants (Lehman Brothers ) et ayant nécessité le sauvetage d'autres opérateurs centraux du système financier tels que AIG, les pouvoirs publics ont mis en place de nouveaux dispositifs prudentiels (Solvency II, Bâle II). C'est d'ailleurs dans le même sillage que s'inscrivent le contrôle des rémunérations et des bonus ainsi que le projet de taxe sur les transactions financières. Ici au Maroc, la faillite de Lehman Brothers a poussé l'Administration à se conformer à la législation française en imposant, depuis fin 2008, de nouvelles exigences en matière de gestion des risques et de contrôle interne. Et pour une meilleure illustration du nouveau dispositif, la Fnacam a organisé récemment un séminaire sur la gestion des risques dans les assurances, un secteur où le risque est monnaie courante. Comme l'a souligné F. Douiri, président du Directoire de RMA Watanya, «les principaux facteurs de risques sont liés aux spécificités de l'activité d'assurance et notamment de son cycle inversé». Il donne comme exemple le risque de tarification dont les primes futures sont fixées en fonction d'estimation statistique d'un historique de sinistres du passé; le risque d'évaluation des passifs lié aux provisions à constituer pour payer dans le futur des sinistres déclarés, et le risque de gestion des actifs qui doivent être disponibles et suffisants pour faire face aux sinistres. Tous ces risques sont importants et doivent être maîtrisés et contrôlés. La question qui taraude le plus est : comment se fait-il que le secteur des assurances au Maroc soit protégé des aléas de la crise internationale, et ce malgré cette interdépendance via la réassurance et que le nouveau dispositif prudentiel en est encore à ses balbutiements ? Réglementation vs mondialisation D'après un responsable au sein de la DAPS, le secteur des assurances a mieux résisté à la crise internationale. Parmi les raisons citées, on retrouve la politique de placement qui exige que les placements doivent être localisés au Maroc. Ces provisions techniques représentent 70% du bilan d'une compagnie. La seule autorisation qui existe ne représente que 5% du total bilan. Encore faut-il ajouter que, dans ce cas de figure, la compagnie n'a le droit d'aller investir à l'étranger que si elle respecte les règles prudentielles et dispose de l'autorisation du ministre des Finances. Les investissements ne sont autorisés que dans l'UE, les pays de l'OCDE et de l'UMA dans des titres émis par les gouvernements de ces pays ou les titres négociables dans des marchés réglementaires ou OPCVM. Ainsi, le fait que le secteur ait bien résisté à la crise semble être lié au fait quil soit trop protégé. Toujours en matière de réglementation et bien que les nouvelles règles paraissent contraignantes, les compagnies d'assurance ont accueilli favorablement ces mesures. «Des mécanismes ont été mis en place et ont été soumis au Conseil Consultatif des Assurances pour approbation», confirme le responsable au sein de la DAPS. A la mi-2010, la quasi-totalité des compagnies d'assurance auront satisfait au dispositif de contrôle interne. Même son de cloche chez F. Douiri qui, tout en rappelant les nouvelles règles prudentielles, annonce que certaines compagnies d'assurance ont déjà mis la main à la pâte. Elles ont ainsi créé, conformément à la circulaire de la Direction des assurances (26/08/08), une structure d'audit interne relevant directement du Conseil d'Administration ou de Surveillance ayant essentiellement pour mission la vérification de l'efficacité du système du contrôle interne et l'évaluation de ses processus de management des risques. Mais cela n'empêche pas de se demander si les compagnies seront au rendez-vous fixé par l'Administration. Ces nouvelles mesures sont contraignantes pour les compagnies d'assurance, mais elles demeurent obligatoires. Le Conseil d'Administration de la compagnie doit désormais se prononcer sur la disponibilité adéquate des provisions techniques. « Le but est de responsabiliser le Conseil d'Administration sur la politique de réassurance et sur la politique de placement de la compagnie», confie-t-on à la DAPS notre responsable. La compagnie est appelée à se prononcer sur des choses qui se passent en interne. C'est ce qui a dérangé un peu les assureurs. Un rapport est soumis par la suite aux commissaires aux comptes qui le soumettent aux autorités de contrôle (DAPS). Tout cela augure que le secteur des assurances au Maroc est au début d'une réforme qui doit aboutir à ce qui se fait actuellement en Europe (Solvency II). Reste à se demander si le secteur est prêt à affronter les accords de libre-échange avec les pays signataires. De l'avis des professionnels, le Maroc n'a pas de risque vis-à-vis des Américains parce que, jusqu'à présent, les professionnels remarquent que les assureurs américains ne manifestent aucun intérêt pour le marché marocain. Avec l'Union européenne, l'impact pourrait être effectif. Mais tout cela dépend de la manière et du temps pris par les compagnies pour la migration vers les règles prudentielles. Cela dépend également de la manière avec laquelle les assureurs européens s'adapteront à la réalité marocaine et au respect des règles prudentielles sans recourir à la maison-mère. Reste que sur le plan de la qualité et de la prestation de service, tout est à prévoir. Affaire à suivre !