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Banques étrangères : Les Français confirment, les Espagnols
Publié dans Finances news le 22 - 10 - 2009

* Le système bancaire est très cosmopolite. Les banques françaises y occupent une place privilégiée.
* Au moment où émergent des banques nationales de plus en plus puissantes, les banques étrangères semblent, de plus en plus, moins impliquées dans le développement de l’économie nationale.
Entre la présence affirmée des Français, celle assez significative des Espagnols, timide des Italiens et très discrète des Suisses et des Américains, c’est peu de dire que le système bancaire marocain reste assez cosmopolite.
Ce sont néanmoins les Français qui s’illustrent le mieux, notamment le Crédit Agricole, BNP Paribas et le Groupe Société Générale respectivement représentés à travers leur filiale marocaine Crédit du Maroc, BMCI et Société Générale Maroc. Une présence sur le territoire national historique, puisqu’elle date de pratiquement 50 ans pour CDM et BMCI et de près d’un siècle pour la SGMB, la seule filiale bancaire française à ne pas être cotée à la Bourse de Casablanca. A elles trois, elles cumulent donc 200 ans de présence au Maroc.
Pourquoi alors cet intérêt pour le Royaume ? «La présence de capitaux étrangers dans les établissements bancaires nationaux s’explique non seulement par des raisons historiques, notamment pour les filiales françaises citées ci-dessus, mais également grâce à la stabilité et la santé du système bancaire marocain, eu égard à l’intérêt manifesté par de grands groupes étrangers pour des prises de participation dans des banques locales», explique un observateur.
Il faut dire, à cet effet, que sous la houlette de Bank Al-Maghrib, le système bancaire a été fortement restructuré et assaini, garantissant aux investisseurs étrangers un cadre opérationnel transparent, en phase avec les standards internationaux. Et à côté de cela, il y a surtout le potentiel de développement qu’il offre, au regard notamment du taux de bancarisation relativement faible tournant autour de 30%. Ce potentiel est d’ailleurs aujourd’hui largement exploité par les établissements bancaires qui, tout en élargissant leur réseau d’agences, offrent des produits de plus en plus innovants.
Cet environnement favorable participe évidemment à la croissance de l’activité des banques, quand bien même, au terme de ce premier semestre 2009, les performances réalisées diffèrent d’un établissement à l’autre.
Ainsi, les filiales bancaires françaises dégagent des résultats mitigés. Crédit du Maroc enregistre une évolution du PNB consolidé de 7,9% par rapport à juin 2008, pour un résultat net part du groupe qui s’établit à 214 MDH contre 249 MDH un an auparavant. BMCI réalise un PNB consolidé en hausse de 10% à 1,3 Md de DH et un RNPG qui s’établit à 449,8 MDH, en progression de 9,70% par rapport à fin juin 2008.
Pour sa part, la Société Générale dégage un PNB consolidé de 1,54 Md de DH, en hausse de 4%, tandis que le RNPG se déprécie de 17,3%% à
382,3 MDH.
Développement modeste
En rapport avec leur présence relativement longue sur le territoire national pour certaines, et comparées aux banques à capital privé majoritairement marocain, les banques étrangères semblent avoir connu un développement modeste. D’ailleurs, à fin 2008, l’examen de la concentration, en fonction du statut de l’actionnariat, montre un renforcement, en termes de total actif et de crédits, de la part des banques à capital privé majoritairement marocain. Ces dernières disposaient, selon BAM, de 62% des guichets, 53,1% des actifs, 65,6% des dépôts et de 57,3% des crédits, alors que les banques à capital majoritairement étranger couvraient 24,2% des guichets, 21,4% des actifs, 20,9% des dépôts et 24,4% des crédits. Quant aux banques à capital majoritairement public, elles concentraient 13,8% des guichets, 25,5% des actifs, 13,5% des dépôts et 18,3% des crédits.
Cela incite certains observateurs à pointer du doigt l’implication effective de certaines banques étrangères dans le développement de l’économie nationale, compte tenu notamment de leur longue présence au Maroc. D’aucuns vont plus loin. Pour cet analyste, «elles considèrent le Maroc comme un centre de profit, avec une présence motivée uniquement par des considérations financières».
De toute évidence, leur rôle semble beaucoup moins important qu’aux premières heures de l’indépendance où les banques françaises accompagnaient le développement économique des ressortissants français établis au Maroc, contribuant par là-même à la mise sur pied d’un système bancaire international et favorisant la création d’entreprises dans le tissu économique du pays.
Par la suite, confirme l’expert-comptable Abdou Soulèye Diop, «dans les années 70, et après la marocanisation, l’Etat a pris le relais à travers les organismes financiers spécialisés (BNDE, CIH, etc, …) qui ont injecté des sommes importantes dans les secteurs industriels et touristiques pour accompagner l’industrialisation et le développement du tourisme. Aujourd’hui, des banques nationales se sont développées (Attijariwafa bank, BMCE et Banque Populaire) et se sont substituées à ces OFS (Organismes Financiers Spécialisés) pour financer et accompagner le déploiement de groupes privés marocains». Dans ce sens, poursuit-il, «nous constatons, depuis quelques années, un grand dynamisme des banques marocaines (Attijariwafa bank, BMCE et Banque Populaire) dans le financement de l’économie nationale, lequel se traduit dans la croissance de leur portefeuille observée ces dix dernières années avec, parallèlement, un ralentissement de la croissance des banques à capitaux étrangers».
Si le développement des banques étrangères présentes au Maroc est actuellement moins soutenu, cela s’explique surtout par les stratégies qu’elles mènent, en droite ligne avec les consignes qu’elles reçoivent de leur maison-mère. Et cela est d’autant plus perceptible qu’en cette période de crise, les engagements des banques locales restent plus importants pour accompagner les grands chantiers du Royaume. Cela, souligne Abdou Diop, est justifié par le fait que «la banque étrangère agit suivant une logique et des instructions de groupe qui ne sont pas toujours dictées par des considérations locales. Ainsi, les banques étrangères présentes au Maroc sont tenues, en période de crise notamment, de suivre par exemple les politiques d’octroi de crédit fixées par la maison-mère, alors que ces contraintes ne pèsent pas sur nos banques locales dont le marché naturel est le Maroc; et cela s’est ressenti dans les chiffres où les niveaux de crédit à l’économie octroyés ont été plus importants dans les trois banques précitées».
Le business avant tout ?
Il est évident que tous les groupes étrangers présents au Maroc, quels que soient d’ailleurs leurs domaines d’activité, sont là pour faire du business. Donc des profits. On ne peut, dès lors, guère le leur reprocher. Surtout que l’absence d’une diversité d’outils de placement incite tout bonnement les filiales étrangères à un rapatriement massif de devises. Mais cette absence de diversité des produits de placement ne constitue pas, à elle seule, les motifs de remontée de devises. Selon Abdou Diop, elle est un élément parmi d’autres. En cela, précise-t-il, « il y a aussi la stratégie de cash pulling de la holding. Autrement dit, cette dernière gère les excédents de trésorerie des filiales en fonction des projets d’investissement en cours et de leur rentabilité, en orientant notamment lesdits excédents vers les filiales qui présentent des besoins de trésorerie». A côté de cela, «le risque pays, la convertibilité de la monnaie ou les fluctuations qu’elle peut subir, influent beaucoup sur les décisions de placer les excédents dans le pays ou de les rapatrier», conclut-il.
C’est clair, ces filiales rapportent de l’argent. Ce qui peut justifier que le Crédit Agricole n’ait jamais voulu se séparer de CDM, alors qu’il a cédé ses filiales africaines à Attijariwafa bank. Le reclassement de participations opéré lui a même permis de se renforcer dans le tour de table, mettant fin à une longue période d’incertitude sur une éventuelle cession de ses participations dans CDM. Une opération qui s’est d’ailleurs accompagnée d’ambitions autrement plus importantes, comme le soulignait Georges Pauget, Directeur général de Crédit Agricole S.A. Selon lui, «[…] compte tenu du potentiel de développement du Maroc, nous avons souhaité conforter nos positions dans ce pays où nous sommes implantés depuis longtemps […] dans les métiers de banque universelle à travers Crédit du Maroc qui a pour objectif de figurer d’ici 2010 parmi les 5 premières banques au Maroc […]».
Jean-Frédéric de Leusse, DG délégué du CA, abondait dans le même sens, précisant que «nous avons investi au Maroc dans un contexte de crise internationale; ce qui prouve les ambitions que nous avons dans ce pays et pour le développement du CDM».
A l’évidence, CDM, BMCI et SGMB continueront à faire partie du paysage bancaire national pour encore longtemps. Reste seulement à savoir quelles réponses elles vont donner face à l’agressivité commerciale de banques comme Attiajariwafa bank, le Groupe Banque Populaire, BMCE Bank ou encore Barid Al-Maghrib.


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