* Larticle 91 de la loi 31-08 stipule quen cas de contestation sur lexécution du contrat principal de vente ou de prestation de services, le tribunal compétent pourra, jusquà solution du litige, suspendre lexécution du contrat de crédit. * Les sociétés de financement pointent du doigt cette sorte de solidarité entre la société de crédit et le prestataire de biens. * Si larticle 91 passe lors de la session printanière, le crédit affecté sera sur la sellette. Après plusieurs années de gestation, le projet de loi 31-08 sur la protection du consommateur est enfin ficelé et se trouve devant le Parlement. Mais cela nempêche quil a suscité la polémique dans son article 91 relatif au crédit affecté (octroi de crédit subordonné à lacquisition dun bien ou service). «Si ledit article passe devant le Parlement, je vous garantis que ce sera la mort de ce que lon appelle le crédit affecté», explique M. Melsa délégué de lAPSF. Aucun établissement de crédit ne pourra financer demain lachat dun bien dont il sait pertinemment que le client, pour un oui ou un non, pourra suspendre le remboursement. En guise de rappel, le projet de loi 31-08 sur la protection du consommateur tourne autour de nombreux axes. Il comporte plus de 200 articles avec, au menu, plusieurs innovations juridiques. Crédit affecté : quelle évolution ? Près de 41 Mds de DH : cest lencours global des crédits à la consommation accordés par les établissements de crédit, selon la dernière étude de la Direction des études et des prévisions financières (DEPF). Celle-ci sest attelée à examiner lévolution du secteur sur 10 ans (1995 à 2006). Ce montant représente plus de 35% du montant total des crédits accordés aux ménages (116 Mds de DH) et 35% du total des crédits à léconomie. En effet, lencours des crédits affectés accordés par les sociétés de financement représente 34,2%. En hausse de 28%, ils sélèvent à hauteur de 9,2 Mds de DH. A fin septembre 2008, le total prêts affectés a atteint 565 MDH (voir tableau). Cette hausse est la résultante de la consommation, dynamisée par la reprise de limmobilier et donc de laccession à la propriété. Parmi ceux-ci, lencours du crédit automobile a atteint près de 7 Mds de DH, en progression de 39,2%. Cette hausse résultait essentiellement de la LOA. Les opérateurs sont désormais convaincus que la période des vaches grasses est terminée, en particulier après le surcoût de la TVA introduit en 2008. Aujourdhui encore, les sociétés de financement sinquiètent de lentrée en vigueur de la loi 31-08. «Si les dispositions prévues dans le projet de loi semblent globalement cohérentes, il nen demeure pas moins quune limitation majeure réside au niveau de larticle 91», apprend-on au niveau de lAPSF. Un texte : deux lectures ! Le texte de loi stipule à cet effet quen cas de contestation sur lexécution du contrat principal de vente ou de prestation de services, le tribunal compétent pourra jusquà solution du litige suspendre lexécution du contrat de crédit. Dans pareil cas, la Justice pourra ordonner le gel des paiements jusquà lissue du procès en question. M. Melsa, délégué de lAPSF, pointe du doigt cette sorte «de solidarité de droit» entre la maison de crédit et la société qui vend le bien. Une solidarité qui, il faut bien noter, na aucun sens parce que selon lAssociation, les sociétés de financement ont un rôle de facilitation dacquisition dun bien et non de détecter les vices cachés dun bien acheté. En vue dy voir plus clair, nous avons interrogé M. Benkaddour, président de lAssociation des Consommateurs. Ce dernier répond que dans le cas de lexistence dun vice caché dans un bien, la société de crédit nen est en aucun cas responsable. Et le tribunal ne peut en aucun cas ordonner le gel des paiements. Il peut au contraire arrêter son jugement en tenant compte des clauses contenues dans le contrat de vente. Il ajoute que «le projet contient une meilleure protection du consommateur contre les clauses abusives pouvant êtres insérées dans un contrat de vente». La nouvelle mouture fixe également les conditions et procédures relatives à lindemnisation et la réparation des dommages pouvant toucher les victimes de manuvres dolosives lors dachats. Le volet information occupe également une place de choix : tout renseignement sur une prestation à fournir devrait être clair et approprié pour tous les produits (biens et services) quune personne souhaite acquérir. En attendant, le vote du projet de loi 31-08 lors de la session printanière, les sociétés de financement aspirent à un changement de justesse de larticle 91. Une chose est sûre : on ne peut transcender dans notre pays une loi ayant réussi dans des pays comme la France sur le climat des affaires étant donné les différences ethniques et culturelles. Pour quune loi soit bien respectée, les opérateurs qui sont censés lappliquer doivent être intellectuellement, psychologiquement et pratiquement ouverts à cette loi, conclut M. Melsa.