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Omar Farkhani, esprit «rebelle»
Publié dans Finances news le 18 - 09 - 2008

Il n'a pas la langue dans la poche et ne pense pas forcément comme Monsieur tout le monde ! C'est le moins que l'on puisse dire d'Omar Farkhani, Président de l'Ordre National des Architectes, et récemment élu Président de la Confédération des Ordres Professionnels. La fibre militante, il l'a dans l'âme. Personnage singulier, il peut être également un redoutable adversaire. «Je suis un Imazighen, ce qui signifie homme libre. On ne peut ni le corrompre, ni l’intimider». Il est donc de cette race de personnes difficiles à cerner et pourtant il n'est pas que ce qu'il semble être. Son univers n'est pas uniquement meublé de débats et de problématiques liées au métier d'architecte… Ce n'est là qu'un aperçu minimaliste d'Omar Farkhani.
Rifain de souche, (d'ailleurs son nom de famille renvoie à la région de Farkhana près de Melilia), issu d’une famille nombreuse de classe moyenne, Omar est un enfant réservé, évitant les problèmes. «Je me suis bien rattrapé depuis», lance-t-il avec un sourire malicieux. Enfant, il est familier du monde de la BD et de ses héros, qui ont contribué à former sa fibre militante. Vivant au sein d’une famille unie, il est élevé par un père qui préconise la liberté de pensée et la liberté tout court. Mais à condition … de réussir à l’école.
«Mon père nous a appris à être dignes et désintéressés. De son vivant, il n’a jamais cherché à faire fortune». Petit, ses loisirs vont de la natation au karaté, en passant par le foot pratiqué dans les terrains vagues à Casablanca (tous disparus aujourd’hui).
«Nous jouissions de plaisirs simples et pas coûteux ». Cette philosophie de la vie ne le quittera jamais. Ainsi, pour Omar Farkhani l’Etre prédominera toujours sur l’Avoir.
A l'école, Omar, enfant, se contente d’assurer le «service minimum», et ce n'est qu'après le Bac qu'il va mettre le turbo. Il n'a pas réellement réfléchi à ce qu'il voulait faire plus tard de sa vie, mais disons qu'une chose le motivait : partir, traverser la mer et voir ce qui se passe de l'autre côté du monde. Et c'est ainsi qu’il décide d’intégrer l’une des meilleures écoles d’architecture et part en 1976 s’installer à Paris. Le choix d’étudier l’architecture est un pur hasard. «Je suis passionné par mon métier d’architecte et d’urbaniste qui me comble sur tous les plans (intellectuel, artistique, technique, social…) tout en me permettant d’exercer, de manière constructive, mes devoirs de citoyen».
Lors de sa vie estudiantine, Omar Farkhani découvre ce vaste espace intellectuel et culturel qu’offrent Paris et l’Europe : liberté d’expression, grands mouvements culturels, sociaux et politiques de l’époque. Paris va le subjuguer à tel point qu’il y passera 13 ans avant de décider de regagner le Maroc «en pointillés».
«A la fin de mes études, j’ai continué à travailler dans des cabinets d’architecture et j’hésitais vraiment à rentrer au Maroc. J’avais en mémoire un Maroc qui ne correspondait pas à ce que j’étais devenu et j’étais réticent à me défaire de cette liberté d’expression et cette liberté intellectuelle qu’offrait Paris».
Alors, Omar Farkhani va multiplier les séjours au Maroc. Ce n’est qu’au début des années 1990 qu’il regagne définitivement le Maroc. Il s’installe rapidement à son propre compte. «Je ne voulais pas devenir fonctionnaire car j’avais en tête que les fonctionnaires étaient corrompus. Mais je me suis rendu compte que je m’étais lourdement trompé : la plupart des fonctionnaires sont honnêtes. Malheureusement, une poignée de corrompus porte préjudice à l’ensemble».
Les débuts au Maroc sont difficiles et même durs. Changement de pays rime aussi avec changement de mentalité, de comportement… :
«Je suis parti en France jeune et donc très tôt j’ai baigné dans cette société française relativement cartésienne. Je revenais au Maroc pour me retrouver dans une tout autre logique, d’autres valeurs… J’en ai tellement souffert que cela m’avait souvent donné envie de repartir». Aujourd’hui, il ne regrette pas d’être revenu au bercail. Bien au contraire, il ne quitterait le Maroc, pour rien au monde. «Le Maroc est un Eldorado pour ceux qui veulent entreprendre dans tous les domaines. Le pays présente des opportunités pour ceux qui ont la réelle volonté d’agir, de changer et révolutionner leur environnement. Le Maroc a acquis une liberté d’expression et d’action très large. Alors qu’en France ou en Europe, il existe cette espèce de saturation et d’impression que tout a déja été fait. Au Maroc, tout est à faire». Naturellement, Omar Farkhani est très rapidement propulsé au-devant de la scène. Le militantisme dont il fait preuve lui vaudra la confiance de ses confrères qui l’ont mandaté à plusieurs reprises pour les représenter. Et c’est probablement ce côté militant médiatisé que l’on connaît le plus de lui. Mais il serait injuste de résumer ainsi sa personnalité. Artiste et intellectuel dans l’âme, comme beaucoup de ses confrères, il déplore la rareté des commandes architecturales. « Les clients sont plus souvent demandeurs de constructions que d’architecture». Grand dévoreur de livres, il adore fouiner dans les librairies. Pour lui : «lire un livre c’est converser avec les plus brillants esprits de tous les temps».
En 2007, Omar Farkhani est décoré du Ouissam national du Mérite de l’Ordre d’officier.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire, Omar Farkhani n’adhère à aucun parti politique : « Il y a une dizaine d’années, j’ai vécu une expérience décevante au sein d’un grand parti dans lequel j’ai constaté un énorme fossé entre les discours et la pratique sur le terrain.
Ceci dit, cet architecte urbaniste suit de près la politique. Normal, vu ses responsabilités. Et ce qui est à son honneur c’est qu’il ne sacrifie jamais au « politiquement correct». Il salue ainsi l’initiative d’Ali Al Himma en qui il voit un « fils du peuple » qui a su bousculer l’Establishment politique. Ou encore un autre fils du peuple, Miloud Chaâbi, «self made man» qui, à partir de rien, a bâti un empire.
Mais la personne à laquelle il voue peut-être le plus d’admiration est l’athlète marocain Saïd Aouita. «C’est un homme à qui l’on ne rend pas suffisamment hommage et pourtant, c’est le premier à avoir démontré qu’un Marocain peut occuper la première place mondiale et y rester longtemps. En collectionnant les titres mondiaux, il a fait sauter un énorme verrou psychologique et a ouvert une brèche : tout devient possible à un Marocain animé de la volonté nécessaire! Et justement, le grand défi des Marocains aujourd’hui est d’avoir confiance en eux-mêmes et en leurs capacités».
Lui-même en est un peu la preuve vivante. Enfant ordinaire, devenu adulte, il a su, sans renier ses valeurs, changer sa vie et essaye autant que
faire se peut de contribuer à changer son environnement !


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