Il est devenu évident pour le Maroc que la dernière version proposée par le Plan Baker afin d'aboutir à un règlement pacifique et consensuel du problème du Sahara ne pourra être accepté. L'alternative que le Maroc doit nécessairement formuler au Plan de l'ancien secrétaire d'Etat américain aux affaires étrangères doit essayer de dépasser le cadre des obstacles liés à la « personnalité » de l'émissaire onusien pour cette affaire. L'Algérie et l'Espagne, les deux pays les plus hostiles à l'achèvement de l'intégrité territoriale du Maroc ont tous les deux effectués des rapprochements spectaculaires à l'égard de l'Administration américaine. En effet, le gouvernement de José Maria Aznar s'est rallié sans conditions aux points de vue américains après les attentats du 11 septembre 2001 et toute l'hégémonie militaire américaine qui s'en est suivie, tandis que la visite du président algérien Bouteflika restera « historique » pour le F.L.N. algérien (Front de Libération National) du moment que les Américains les ont soutenus dans leur guerre contre le terrorisme. Il est vrai que « Washington n'imposera pas de règlement sur la question du Sahara occidental » comme l'a affirmé le président américain, cependant les pressions américaines sont d'une autre nature. « La solution acceptable pour le Maroc peut être trouvée », mais la formule adoptée par J. Baker n'est pas sans équivoque. Le ton de Kofi Annan et de son émissaire qui ont nettement changé montrent que la diplomatie marocaine n'a pas proposé de solutions alternatives. C'est ainsi que la résolution 1495 estimée comme faisant « peser des risques majeurs pour la sécurité et la stabilité de la région » est en fait une solution logique aux peines qu'avaient éprouvé l'ONU à organiser un référendum au Sahara. Il ne faut pas oublier que le Maroc considère toujours que le conflit du Sahara est « artificiel » et donc le référendum restera toujours sans logique interne convaincante. Pourtant, aux yeux de l'ONU, le camp de Tindouf est un lieu où les « réfugiés » sahraouis sont obligés d'y rester tant que la solution proposée par J. Baker ne revêt pas de caractère consensuel. Dans le discours que SM le Roi Mohammed VI a adressé à la nation à l'occasion de l'anniversaire de la Marche Verte, le souverain a réaffirmé l'attachement du Maroc à la recherche d'une solution politique au conflit artificiel du Sahara, qui respectera la souveraineté du Maroc sur ses provinces du Sud : « Nous réitérons, encore aujourd'hui, que nous sommes déterminé, dans l'esprit de la Marche Verte, à préserver dans la voie pacifique, notamment dans le cadre du processus onusien en cours, processus pour le succès duquel, nous ne ménageons aucun effort et auquel nous contribuerons avec sincérité et esprit de pleine coopération ». La logique de l'Etat démocratique, que le Royaume s'efforce de mettre en avant et dont le monarque rappelle les grandes lignes chaque fois qu'il le juge nécessaire, oblige le Maroc à faire preuve de beaucoup de patience dans le traitement final de ce dossier. Il faut avouer que la diplomatie marocaine n'a pas su s'ouvrir sur le travail important des ONG. Comme le constate le politologue M. Darif « Dans sa gestion du dossier du Sahara, le Maroc a compté sur la diplomatie officielle. Les officiels marocains ont toujours considéré que le problème du Sahara est un problème sécuritaire. La diplomatie populaire n'avait pas sa place. Les partis politiques et les ONG n'ont jamais été impliqués dans la gestion de ce dossier. Par contre l'Algérie et le Front Polisario, à travers les ONG et des partis politiques ont pu gagner le soutien des ONG et des parlementaires espagnols et américains grâce à leur travail de terrain ». Ce constat fort significatif est en fait synonyme de l'effort considérable qui attend la diplomatie marocaine afin de pouvoir intégrer le point de vue de toutes les sensibilités politiques et associatives nationales. Le Plan Baker ne garantit certes pas l'intégrité territoriale du Maroc, mais d'un autre côté ne pourra réaliser une désintégration économique et sociale que le Maroc a assuré aux populations sahraouies depuis 28 ans. La réponse aux tentatives désespérées de l'émissaire onusien américain est que l'action diplomatique marocaine soit plus concentrée sur l'aspect économique et social du problème du Sahara, et non seulement se focaliser sur son caractère politique. Encadré Tifirati a souffert Pour la première fois depuis la création du mouvement séparatiste en 1973, le Polisario a tenu son XIème congrès général de l'organisation, non pas en Algérie, mais sur le territoire national marocain. C'est ainsi, que pendant les 4 jours du 12 au 15 octobre 2003, la zone de Tifariti a abrité les assises générales du Polisario. Bien que partie intégrante du Sahara marocain, Tifariti, située à quelques encablures de la ville historique de Smara, échappe actuellement au contrôle des autorités marocaines. Elle est située lors du mur de sécurité érigé par le Royaume autour de la majeure partie de ses provinces du Sud. De ce fait le Maroc ne pouvait pas réagir aux congressistes provocateurs, sans être accusé de rompre le cessez-le feu en vigueur entre les deux parties depuis 1988.