* Les restaurateurs liés par des contrats avec ADM se plaignent de la concurrence introduite par les stations-service. * Ces contrats ne comportent aucune clause d'exclusivité, selon une source de l'ADM. * Concurrence, loyers élevés, baisse de la fréquentation, baisse du chiffre d'affaires, les restaurateurs ne sont guère optimistes. À l'entrée de l'aire de repos au niveau de Bouznika, un choix cornélien se pose pour les usagers de l'axe autoroutier Rabat-Casablanca. S'installer à la cafétéria-restaurant en face du parking ou prendre un expresso dans l'espace annexé à la station-service ? Un choix fortuit pour les uns, mais qui impacte sérieusement le chiffre d'affaires de l'un ou de l'autre. En effet, depuis que certaines stations-service ont aménagé des cafétérias dans leurs espaces de self-service, les restaurateurs d'à-côté ont enregistré une baisse vertigineuse de leur chiffre d'affaires. Déjà qu'ils se plaignent du loyer très élevé versé à Autoroutes du Maroc, société gestionnaire de ces espaces, de la baisse de fréquentation et des importants investissements dédiés à l'entretien des lieux. Une fois sur place, on comprend mieux la situation. Bien que le parking de l'aire de repos soit bondé de voitures, notamment celles des MRE, on constate que la cafétéria-restaurant La Bonne Route est presque déserte. Son gérant, M'Barek Jirari, lance un signal de détresse. « Si les choses continuent à ce rythme, nous serons obligés de fermer boutique», explique-t-il. Il ne peut s'empêcher de raconter avec amertume son parcours. Pendant plus d'une vingtaine d'années, il a trimé à l'étranger avant de décider de rentrer investir au Maroc. De retour au pays il y a une dizaine d'années, il investit ses économies dans une société de droguerie, quincaillerie, électroménager, fournitures générales d'électricité... Il a également été intéressé par la restauration au niveau des aires de repos. Ce qu'il fit. Il gère depuis la cafétéria-restaurant La Bonne Route sur l'aire de repos au niveau de Bouznika. Il se rend rapidement compte que les charges et le loyer sont élevés alors que le chiffre d'affaires ne suit pas. Mais l'aménagement de restaurants et de cafétérias au niveau des stations-service semble être la goutte qui a fait déborder le pot. Car depuis, il a enregistré une baisse de la fréquentation de son restaurant. Il note la même tendance chez les autres restaurateurs. «Cette concurrence n'était pas prévue et ne figurait pas dans le contrat que nous, restaurateurs, avions signé avec ADM », souligne-t-il. Et le loyer a été de plus révisé à la hausse, comme le stipule le contrat. Mais une source au sein dADM souligne : «À ma connaissance, aucune clause d'exclusivité ne figure sur les contrats». Conclusion : ADM est dans son droit selon cette même source. Jirari verse près d'un million de DH de loyer à ADM chaque année et doit également faire face aux charges de fonctionnement, payer les salaires de plus d'une dizaine demployés, assurer l'entretien et la sécurité au niveau de son restaurant. «C'en est trop !», s'écrie-t-il. Il avait nourri des espoirs quant à un bon chiffre pour la saison estivale. En vain. Il dit souffrir d'une rude concurrence, non pas que son offre soit chère, mais parce que les pompistes recrutent les clients. Une chose avérée, puisque dès que l'on s'engage sur l'aire de repos, un pompiste fait un signe vers la cafétéria de la station. Il ne nous barre pas le chemin pour autant. « Ils ont un grand avantage, ils sont à l'entrée de l'aire de repos. Et les automobilistes qui viennent pour s'approvisionner en carburant vont automatiquement prendre le café ou des viennoiseries sur place», souligne-t-il, avant de conclure que si les choses restent ainsi, il va vite mettre la clé sous le paillasson même s'il dit avoir de la peine pour ses employés. Au niveau du magasin self-service, le caissier se défend : «Les stations-service ont été obligées en quelque sorte de diversifier les prestations pour avoir d'autres sources de revenus pour réaliser un chiffre d'affaires convenable. Surtout en été, car c'est pour nous la haute saison étant donné que pour le reste de l'année, la fréquence des visites est plus réduite». Les clients ont également leur mot à dire. Malgré des tarifs très élevés, la bouteille d'eau minérale de 50 cl est à 7,5 DH, le croissant à 12 DH, certains usagers préfèrent le self-service. «Je préfère cet espace puisqu'il est mieux aménagé, climatisé et puis il est d'un certain standard», nous explique un automobiliste. Au niveau de La Bonne Route, la clientèle est composée essentiellement de familles. Une MRE installée à une table souligne qu'elle a été touchée par le serveur qui lui a donné gratuitement une bouteille d'eau pour désaltérer son enfant, épuisé par la chaleur et la fatigue d'un long trajet. Alors elle a décidé de déjeuner avec sa famille au restaurant. « Les prix sont raisonnables et le repas est très correct », affirme-t-elle. Les restaurateurs ont envoyé plusieurs courriers à ADM. En vain !