* Le Maroc ne dispose pas de sécurité d'approvisionnement proprement dite, mais plutôt de contrats de fourniture. * Les choix en matière de politique énergétique doivent résulter d'une prospective énergétique qui constituera un outil indispensable pour explorer les diverses solutions face à des défis comme la sécurité d'approvisionnement à long terme. * La diversification des partenaires, mais aussi des ressources d'énergie, est une piste parmi d'autres. La maîtrise de la demande future de l'énergie et des conditions d'approvisionnement constitue un enjeu économique et politique majeur pour un pays comme le Maroc qui ne dispose pas encore de ressources fossiles. Le Maroc assure son approvisionnement grâce à des contrats de fourniture signés avec ses partenaires. Mais à l'heure où le pays a entamé de grands chantiers socio-économiques aux grands enjeux, des choix en matière de politique énergétique ne pourraient résulter que d'une prospective énergétique qui constituera un outil indispensable pour explorer les diverses solutions face à des défis comme la sécurité d'approvisionnement à long terme. Ainsi, comme le souligne Moulay Abdallah Alaoui, Président de la Fédération de l'Energie, qui salue au passage le travail fourni par les autorités compétentes, le Maroc n'étant pas un pays producteur de pétrole, ni détenteur de puits pétroliers en dehors de son territoire, doit engager des efforts importants pour encourager les entrepreneurs nationaux à avoir des prises de participations dans des sociétés d'exploration ou à faire partie du tour de table de grandes multinationales évoluant dans ce secteur de façon à instaurer une réelle sécurité d'approvisionnement pour le pays. «Pourquoi ne pas envisager avec l'Algérie, par exemple, des investissements croisés, avec l'Espagne aussi?», dixit Alaoui. Pour lui, le Maroc doit offrir les garanties nécessaires aux investisseurs marocains désirant pénétrer ce secteur pour assurer les besoins du marché national en énergie et passer d'un système de fourniture énergétique à un système d'approvisionnement au sens propre. «Depuis la crise de 2004, le gouvernement avait procédé, pour assurer la continuité de la fourniture en produits pétroliers, par signature de contrats à long terme et ouverture des marchés. Depuis, nous avons une fourniture diversifiée», ajoute Alaoui, pour qui il est temps de passer à une étape supérieure en assurant une présence marocaine dans les multinationales pétrolières pour pouvoir couvrir les besoins du marché national. S'exprimant sur la stratégie énergétique du pays, Dimitri Xylinas, Administrateur Directeur Général de Total Maroc et Président du Groupement des pétroliers du Maroc, souligne pour sa part que le Maroc a effectivement ce souci de ne pas disposer de ressources pétrolières en interne. «Mais il n'est pas le premier ni le dernier pays à ne pas avoir de ressources en interne. Je dirais même qu'il y a des pays producteurs de produits pétroliers qui sont très malheureux dans leur gestion. Aujourd'hui, la politique énergétique telle qu'elle est définie par le gouvernement marocain est claire. Elle vise à avoir une grande palette de produits énergétiques pour les besoins du pays. On utilise ainsi le charbon au lieu de l'électricité, on pousse à l'utilisation du gaz naturel, qui est déjà employé à la centrale de Tanger et dans d'autres secteurs de l'économie nationale. Le pays s'oriente vers les énergies renouvelables et couvre la sécurité en termes de produits pétroliers avec la SAMIR, mais aussi grâce aux importations d'Afriquia et Total». «Cette palette de solutions permettra au Maroc de faire face à ses besoins énergétiques», ajoute Xylinas. En effet, la production de produits pétroliers par la raffinerie SAMIR n'est pas suffisante pour couvrir la totalité de la demande du pays ni en quantité ni en typologie de produits. Concrètement, il y a besoin d'importer quelques qualités et quelques quantités de produits pour couvrir la demande actuelle. Quelle taille pour le Maroc aux yeux des multinationales ? Qui importe ? Toutes les sociétés n'importent pas ou toutes les sociétés n'importent pas de manière significative. «Celles qui importent aujourd'hui de manière significative, donc qui trouvent des ressources à l'extérieur du pays en dehors de la raffinerie de la SAMIR, sont la SAMIR elle-même qui importe des fois des produits pétroliers, ainsi que les sociétés Afriquia et Total Maroc», explique Dimitri Xylinas. La SAMIR possède d'importantes capacités d'importation à Mohammedia, c'est-à-dire un espace de stockage avec accès à la mer et une facilité de recevoir les bateaux qui arrivent et qui déchargent les produits dans ses aires de stockage. Pour Afriquia et Total, elles sont co-actionnaires à 50/50 de la société d'entreposage de Jorf Lasfar qui a des capacités de stockage et d'importation puisqu'elle est sise au port de Jorf Lasfar permettant ainsi aux bateaux d'Afriquia et de Total d'y accéder et d'y décharger leurs cargaisons. «Nous, Total Maroc, sommes ancrés ici depuis 80 ans. Nous sommes une société marocaine qui appartient au Groupe Total. Le fait est que nous avons des objectifs de service et de rentabilité au sein de Total Maroc, nous faisons tout pour satisfaire ces objectifs. Nous sommes une très grande filiale ; elle est la première en qualité de service parmi les dix grandes filiales du Groupe en Afrique. La plus grande filiale du groupe en Afrique est celle de l'Afrique du Sud, ensuite viennent celles du Nigeria, de Turquie et du Maroc. Nous défendons au sein du groupe Total notre présence marocaine», souligne Xylinas. Le fait qu'une majorité de pétroliers marocains soient adossés à des multinationales peut être un avantage pour le Maroc du fait que ce dernier ne possède pas de ressources internes, ni externes. Et pour cause, «il est évident que c'est plus facile pour une société qui a des raffineries ailleurs comme une multinationale d'assurer les besoins en énergie. Nous n'avons pas de raffinerie au Maroc, mais Total compte des raffineries en France, en Angleterre, en Espagne à travers CPSA, en Italie Donc, dans des régions assez proches du Maroc, nous avons des outils de raffinage qui appartiennent au Groupe», affirme Xylinas. Ces raffineries produisent des produits qui peuvent être orientés vers le marché marocain. De plus, si l'on prenait toujours l'exemple de Total Maroc, c'est qu'au-delà de cet outil de raffinage dont la société dispose en interne, le groupe Total a une longue expérience de commerce international. C'est une société internationale qui a accès à tous les marchés internationaux avec sa structure de commerce internationale, «donc, nous pouvons également trouver des produits en dehors de notre propre système de raffineries», conclut Xylinas. Le fait d'être une filiale d'une grande multinationale présente effectivement des avantages concrets pour avoir des ressources de produits pétroliers à l'extérieur du pays.