Lahcen Daoudi revient pour Finances News Hebdo sur les préparatifs de son parti aux prochaines échéances électorales. Selon le vice-secrétaire général du PJD, le Maroc est assez mûr pour une bipolarisation de l'espace politique. Il se dit en faveur d'alliances pré-électorales et appelle tous les partis à choisir leur camp sans plus tarder. Il s'explique également sur la tenue du Congrès extraordinaire de son parti en mai prochain. Compte-rendu. Les élections législatives arrivent à grands pas et les principaux partis politiques marocains entament les grandes manoeuvres. Le parti de la lampe n'est pas en reste, puisqu'il va tenir très prochainement, au cours du mois de mai, un congrès extraordinaire. Rappelons que le congrès ordinaire devait se dérouler initialement en juillet 2016. Cette date correspond également à la fin du mandat de Abdelilah Benkirane à la tête du PJD. Le congrès extraordinaire de mai devrait permettre de modifier les statuts du parti afin de prolonger le mandat de l'actuel Chef de gouvernement à la tête du PJD. Lahcen Daoudi justifie ce choix par une question d'organisation et de timing. En avançant le congrès de quelques mois et en renouvelant le mandat de Benkirane, le PJD pourra se concentrer sur la campagne électorale qui s'annonce rude : «un congrès extraordinaire est très facile à organiser. Plus facile qu'un congrès ordinaire. Or, nous devons bientôt commencer à sélectionner les candidats pour le Parlement. Il est difficile de conduire les deux choses à la fois», explique-t-il. Est-ce à dire que ce changement de date figurait parmi les préférences de l'actuel ministre de l'Enseignement supérieur ? Non visiblement. «Il y a dans le parti des voix qui étaient pour et d'autres contre. Ma proposition était de maintenir un seul congrès, après les élections législatives. J'avais personnellement proposé la date de décembre 2016. Mais des questions pertinentes ont été posées sur ma position : serons-nous capables de tenir notre congrès si l'on est chargé de former un gouvernement» Ainsi, au final, le mois de mai aura été retenu pour la tenue du congrès. Cette approche du parti de la lampe soulève néanmoins quelques interrogations légitimes quant à la succession de Benkirane à la tête du parti. N'y a-t-il pas d'autres profils capables de prendre efficacement la relève ? Est-ce la seule alternative ? L. Daoudi pense que le parti est capable de faire émerger des leaders, «mais dans l'imaginaire de certains, le succès du PJD est lié à la personne de Benkirane. Il est vrai qu'il a sa valeur ajoutée». Et d'ajouter : «l'essentiel est que Benkirane conduise la campagne électorale. Ensuite, il incombera au Roi de choisir qui mènera le prochain gouvernement pour les cinq prochaines années». Quant à savoir si lui-même était prêt à prendre la relève à la tête du parti, il répond sans ambages : «Non ! Au PJD, ils me connaissent et ils savent que je ne suis pas un adepte de la chefferie» (ndlr: Daoudi utilise le terme de michiakha, sic). En tout cas, Daoudi ne cache pas son optimisme quant aux résultats des prochaines élections et pense qu'ils devraient être dans la lignée de ceux des élections communales de 2015. «Je ne vois pas réellement d'alternative au PJD. La lampe est aujourd'hui une marque qui se vend très bien sur le marché». Chacun doit choisir son camp Les préparatifs aux prochaines échéances électorales posent aussi la question des alliances. Sur ce point précis, Lahcen Daoudi souhaite que tous les partis montrent patte blanche, sans plus tarder, et dévoilent leurs intentions, dans un souci de clarté pour les électeurs. «En France, vous avez la gauche et la droite. Je suis en faveur d'une bipolarisation de l'espace politique. Le Maroc est assez mûr pour avoir 2 pôles. Il faut que la classe politique arrête les bricolages», pense-t-il. Une bipolarisation qui s'articulerait autour du PAM et du PJD. «Il faut que les choses soient distinctes. Même les partis qui veulent s'allier à nous doivent le dire maintenant et ne pas attendre l'issue des élections. Le Mouvement Populaire l'a fait, le PPS aussi. Ils seront nos alliés que nous soyons dans le gouvernement ou dans l'opposition», fait-il savoir. Et le RNI, membre de la coalition gouvernementale, mais dont les rapports avec le PJD se tendent jour après jour ? «Le RNI ne l'a pas fait», répond-il laconiquement. Pour Daoudi, les alliances pré-électorales sont nécessaires dans un souci de clarté vis-à-vis des électeurs. «Il faut que cela soit clarifié pour les électeurs marocains. Le citoyen ne sait pas encore où se positionner à quelques mois des élections. Ce n'est pas normal. Il ne faut pas attendre les élections pour faire les alliances. Chacun doit choisir son camp», insiste-t-il. L'idée d'une bipolarisation exclurait donc de facto un rapprochement entre le PJD et le PAM. Une incompatibilité que confirme Daoudi : «Il y a le PJD d'un côté, et le PAM de l'autre. Il faut qu'il advienne quelque chose d'extraordinaire pour assister à un rapprochement entre les deux formations. Quelle est la contrainte pour voir demain un rapprochement PJD-PAM ? Les combinaisons sont-elles si rares pour n'envisager que cette possibilité ?», s'interroge-t-il. «Il y a mille autres combinaisons possibles», argumente-t-il. Dans cette configuration, le PJD a encore besoin d'un autre allié, d'une autre «pièce» pour compléter le puzzle. Il pourrait s'agir de l'Istiqlal. «L'Istiqlal a toujours été un parti proche du PJD. La raison a fini par l'emporter», souligne Daoudi. Plus surprenant, même Al Adl Wal Ihsan (le mouvement Justice et Bienfaisance), qui évolue en marge du jeu politique marocain, peut être un allié pour peu qu'il intègre le système politique. «Si demain Al Adl Wal Ihsan était intégré au champ politique, cela serait une bonne chose», soutient-il. Enfin, ne dites surtout pas au ministre que son parti représentera le pôle conservateur contre un pôle progressiste. «Le PJD est plus progressiste que le PAM», tonne-t-il.