Où en sont les projets e-gouvernement ? Quelles seront les orientations de la nouvelle stratégie «Maroc Numeric 2020»? Le point avec Boubker Badr, Directeur de l'économie numérique au ministère de l'Industrie, du Commerce, de l'Investissement et de l'Economie numérique. Finances News Hebdo : L'e-gov a du mal à pénétrer et à s'ancrer dans les habitudes de l'administration, des entreprises et des particuliers. S'agit-il d'un problème d'offre ou bien d'un manque de confiance ? Boubker Badr : Un ensemble important de services e-gov ont été réalisés et mis à la disposition des entreprises et des particuliers. Ils sont tous répertoriés dans la rubrique e-services du site maroc.ma. Malheureusement, ces services restent encore inconnus du grand public, car une communication à grande échelle n'a pas été réalisée. Elle s'est faite principalement par le canal Web, via notamment le compte Tweeter Maroc_e-gov, premier compte institutionnel en nombre de followers (plus de 51.000 followers), la page Facebook e-gov Maroc (plus de 16.000 mentions like), le site e-gov.ma pour faire connaîre le programme e-gov et le site maroc.ma, point d'entrée de l'administration marocaine. Mais le canal Web n'est pas suffisant pour vulgariser ces services. Il faut mettre en place et déployer un vrai plan de communication pour que l'e-gov soit ancré dans les habitudes des usagers. F.N.H. : Chaque ministère a son propre système d'information (SI), sa propre charte graphique, etc. N'y a-t-il pas lieu d'unifier le SI de l'ensemble des départements ministériels, dans une logique de coordination et de recoupement des données ? A quand un «data center national» au Maroc ? B. B. : Dans le cadre du programme e-gov, un ensemble de projets mutualisables ont été mis en place. Sur le plan normatif, citons d'abord la Charte commune qui comporte un ensemble de règles de base auxquelles devront se conformer l'ensemble des sites de l'administration. Il y a également un cadre général d'interopérabilité qui fixe règles de conformité quant à l'usage de normes, de standards ou encore de références dans le développement des systèmes d'information. S'agissant maintenant du volet applicatif, un ensemble de solutions mutualisables ont été adoptées par plusieurs administrations. Citons à ce titre la plateforme de gestion des réclamations qui permet aux citoyens de soumettre leurs requêtes et d'en suivre l'avancement en ligne. Qu'elles soient adressées aux administrations centrales ou bien aux communes. Cette solution est déployée aujourd'hui au niveau de l'administration de la Douane (www.douane.gov.ma/reclamations), le ministère de l'Equipement et du Transport (reclamations-met.local-trust.com), la Commune de Tétouan (reclamation.tetouan.ma), le ministère chargé des relations avec le parlement et la société civile (reclamation.mcrpsc.gov.ma), l'Agence nationale des ports (www.anp.org.ma/Publications/Pages/Reclamation.aspx) et le ministère de la Communication (hreclamations.mincom.gov.ma/index.php5?page=citoyen.Accueil). Il y a également une plateforme de prise de rendez-vous en ligne (http://rendezvous-sante.ma) active dans neuf hôpitaux publics, qui permet aux citoyens de prendre des rendez-vous avec les médecins spécialistes au niveau des hôpitaux provinciaux, par internet, par application mobile, via téléphone ou sur place. De son côté, le guichet électronique de commande de documents administratifs (watiqa.ma) est déjà opérationnel dans plus de 160 communes pour la demande de deux documents, l'extrait d'acte de naissance et la copie intégrale de l'acte de naissance. Quant à la Gateway gouvernementale, une plateforme en cours de réalisation, elle sera bientôt mise à la disposition des administrations. Elle aura pour vocation la création simplifiée de services en ligne à destination des entreprises ou des citoyens, l'échange de messages entre administrations afin d'éviter de demander à l'usager de fournir une information déjà détenue par l'administration, un «one-stop-shop» pour les citoyens ou entreprises vers les services électroniques de l'administration, un bouquet de services transversaux pour les citoyens/entreprises (coffre-fort, SSO, Agenda, etc.). Enfin, concernant le Data centre national, on peut considérer aujourd'hui que c'est un prérequis pour disposer de toutes les chances de réussir les projets de transformation digitale au Maroc aussi bien dans le secteur privé que celui public. F.N.H. : Un récent rapport de la Cour des comptes reproche au gouvernement un certain retard dans l'exécution de la stratégie «Maroc Numeric 2013». A quoi est-ce dû à votre avis ? B. B. : Sans entrer dans le détail des chantiers structurants et de la stratégie «Maroc Numeric 2013» et des actions qui en découlent, il y a lieu de rappeler que ce Plan s'est fixé 18 initiatives déclinées en 51 mesures. C'est aussi une collaboration basée sur le volontariat où chaque acteur gère son propre budget. Le ministère de l'Industrie, du Commerce, de l'Investissement et de l'Economie numérique a assuré le suivi et le pilotage des différents projets identifiés. Les projets qui ont connu du retard dépendent de plusieurs départements ministériels, ce qui complique les choses. F.N.H. : Vous êtes en train de finaliser la stratégie «Maroc Numeric 2020», pouvez-vous nous décrire ses grandes orientations et en quoi se distinguera-t-elle de celle de 2013 ? B. B. : Tout d'abord, «Maroc Numeric 2013» a permis de dégager une vision dont les technologies de l'information constituent un véritable projet de société, générateur de richesses et de développement économique. Elle a permis aussi de fournir des services administratifs en ligne au citoyen, de placer le Maroc sur les radars des sociétés de renommée internationale en matière de technologies de l'information (TI) et d'améliorer le classement du Maroc sur les indices TI internationaux. La nouvelle vision «Maroc Numeric» sera bien sûr construite avec une approche participative basée sur les réalisations et les enseignements tirés de la stratégie «Maroc Numeric 2013». Elle mettra l'accent sur l'accompagnement des efforts de l'administration en matière de simplification des procédures administratives, de dématérialisation et de mutualisation; l'amélioration de l'infrastructure IT et de la qualité de la connexion, le soutien des entreprises marocaines dans l'utilisation des TI et dans la création de contenus numériques marocains, l'accompagnement des SSII marocaines pour exporter leur savoir-faire; sans omettre le renforcement du cadre législatif et réglementaire. La nouvelle vision «Maroc Numeric 2020» ambitionne de consolider le positionnement du Maroc comme leader régional en matière des technologies de l'information.