Les stress tests sont menés régulièrement par les banques marocaines depuis 2012 et s'affirment de plus en plus comme un outil indispensable à l'évaluation de leur situation prudentielle. Encadrés rigoureusement par Bank Al-Maghrib, ils concernent toutes les natures de risques et permettent de corriger les vulnérabilités détectées. Le risque de liquidité, au coeur du dispositif Bâle III, est éprouvé mensuellement. La publication des résultats des stress tests réalisés par les banques est en revanche laissée à la discrétion des établissements bancaires. 15 septembre 2008 : Lehman Brothers fait faillite, provoquant par contagion l'une des plus graves crises financières de tous les temps. Ce «cataclysme» a permis de mettre en évidence les insuffisances du dispositif de Bâle II, notamment en termes de qualité des fonds propres des banques et aussi en termes d'appréhension de certains risques, au premier desquels figure le risque de liquidité. Dans ce contexte, la mise en place de règles prudentielles renforcées est vite apparue comme une impérieuse nécessité. Dès 2010, les régulateurs du comité de Bâle mettent sur pied la réforme Bâle III afin d'assurer une plus grande solidité financière du système bancaire international et d'augmenter sa capacité de résilience face aux chocs. Outre les nouvelles exigences en fonds propres des banques et la gestion du risque de liquidité, les régulateurs ont préconisé la mise en place d'un dispositif de stress tests (tests de résistance) pour évaluer la robustesse des banques face aux différents risques qui les menacent. Le système bancaire marocain n'y échappe pas et Bank Al-Maghrib n'a pas tardé à mettre en place cette pratique. Sa réactivité en matière d'implémentation des préconisations du comité de Bâle n'est plus à démontrer. En effet, dès 2010, la Banque centrale a publié la directive n°2/G/10 relative à la pratique des stress tests par les banques. Contactée par nos soins, BAM nous en rappelle le principe : «ces stress tests doivent être établis sur la base d'un éventail de scénarii selon différents degrés de sévérité en fonction des caractéristiques des risques évalués». Ces tests doivent, en outre, «être prospectifs et incorporer les changements potentiels dans la composition des portefeuilles de l'établissement, ainsi que les risques qui ne découlent pas de l'analyse historique». Deux ans à peine après la publication de la directive, le dispositif est prêt à l'emploi, dans la mesure où BAM a fixé le modèle du reporting à transmettre périodiquement par les banques et conçu des scénarios minimums pour chaque type de risque (crédit, concentration, liquidité, taux, etc...). Elle en a déterminé le niveau de sévérité à appliquer par l'ensemble des établissements. Signalons qu'à côté de ces stress tests réalisés par les banques, BAM a «développé ses propres outils pour effectuer des stress tests de la résilience du secteur bancaire dans le cadre de sa fonction de surveillance macro prudentielle». Voilà pour le cadre réglementaire. Des fréquences variables Sur le plan opérationnel, et depuis 2012, les stress tests sont «menés régulièrement par l'ensemble des banques», affirme la Banque centrale. Cette pratique est aujourd'hui bien ancrée dans le système financier marocain. En effet, selon BAM, «les stress tests font partie intégrante du dispositif de gouvernance des banques et de gestion des risques, et constituent désormais un outil incontournable pour l'appréciation de la situation prudentielle de chaque établissement». Interrogée sur la périodicité des stress tests réalisés par les banques marocaines, BAM nous apprend que celles-ci procèdent à ces tests suivant une fréquence variable, selon la nature du risque. Ainsi, ces tests «doivent au minimum être effectués semestriellement pour les risques de crédit, concentration et marché, trimestriellement pour le risque de taux d'intérêt et mensuellement pour le risque de liquidité». En 2014, et après deux ans de pratique donc, l'heure est aux premiers bilans. Et à en croire la Banque centrale, ces stress tests se révèlent être d'une grande utilité, puisqu'ils «sont de nature à révéler de manière précoce des vulnérabilités et inciter les banques à entreprendre des actions pour les atténuer». «Si des vulnérabilités sont révélées, elles font l'objet d'un plan d'action mis en place par la banque, sous la supervision de la Banque centrale, soit pour réduire son exposition aux risques concernés, soit pour accroître les matelas de fonds propres ou de liquidité pour les couvrir», explique-t-elle. Renforcer, tester (régulièrement), corriger : tel est le nouveau triptyque de la supervision bancaire. Se pose alors la question de la publication par les banques des résultats des stress tests. La question n'est pas simple car elle touche à la notion de confiance, notion si délicate dans le secteur bancaire: faut-il informer les investisseurs des résultats, quitte à ce que les banques exposent leurs éventuelles fragilités comme c'est le cas en Europe ou, au contraire, la protéger de sorte qu'elle puisse corriger ses fragilités sans rompre la confiance ? Face à cette interrogation, BAM estime qu' «à ce stade, la latitude est laissée aux banques de communiquer les résultats de leurs propres stress tests au marché pour lui permettre de mieux comprendre leur profil de risque». Sans surprise, les banques marocaines ont fait le choix, pour l'instant en tout cas, de ne pas communiquer les résultats des tests. De son côté, BAM rappelle qu'elle a communiqué sur les résultats globaux de ses propres stress tests dans le cadre du rapport de stabilité financière publié en juillet 2014. Celui-ci stipulait que le système bancaire marocain continuerait à maintenir sa résilience et à respecter les exigences de solvabilité, à horizon 2015, en dégageant des ratios de solvabilité de 12,7% en 2014 et 12,5% en 2015. Enfin, concernant l'exercice de simulation réalisé pendant l'été 2014 avec l'aide de la Banque mondiale (BM), BAM nous apprend que «les premiers résultats montrent que le dispositif de gestion de crise et les mécanismes de coordination sont appropriés». Quant à la publication par la BM des conclusions détaillées de cet exercice de simulation, «elle est attendue pour les prochaines semaines», assure-t-on à la Banque centrale.