L'organisation de la 8ème édition du Colloque international des finances publiques portant sur les synergies entre les finances de l'Etat et les finances des collectivités locales revêt un intérêt particulier pour les Etats qui s'apprêtent à opérer des réformes sur l'organisation de leurs entités territoriales. Il s'agit de la refonte du millefeuille administratif pour la France et du projet de régionalisation avancée pour le Maroc, où la question des ressources des collectivités locales revêt une centralité majeure. Les crises économiques et financières à répétition à l'échelle mondiale ont considérablement fragilisé les Etats qui dans leur écrasante majorité s'emploient à remettre de l'ordre dans leurs finances publiques. Le Maroc observe cette même tendance en essayant tant bien que mal d'opérer les réformes fiscales à même de renflouer les caisses de l'Etat. Cette ferme volonté et la prise de conscience de l'importance des finances publiques comme paradigme clef pour ragaillardir l'économique ont conduit les autorités publiques, pour ne citer que le ministère de l'Economie et des Finances, à susciter un débat permanent et une réflexion profonde sur ce sujet majeur. C'est dans cet esprit que depuis 2007, le colloque international des finances publiques est organisé au Maroc en partenariat avec l'Association pour la fondation internationale des finances publiques (Fondafip) avec le soutien de la revue française de finances publiques (RFFP). Cet événement de premier ordre dont la 8ème édition s'est récemment tenue dans la capitale administrative avait les allures des assises de la fiscalité vu le nombre et la qualité des personnalités mobilisées. La thématique de cette année : «L'Etat territorial au Maroc et en France : synergies entre les finances de l'Etat et les finances des collectivités locales», avait réuni une belle brochette d'experts et de politiques marocains, français, tunisiens et bien d'autres nationalités. Dès l'entame du symposium, Mohamed Boussaid, ministre de l'Economie et des Finances, a tenu à rappeler l'importance de la thématique retenue pour cette année. «Les régions et les territoires sont l'avenir du Maroc», martèle-t-il. Celui-ci a aussi souligné que cette manifestation tombe à point nommé car le Royaume est résolument tourné vers la régionalisation avancée qui a comme toile de fond la réorganisation des finances locales. La question des ressources des collectivités locales dans le cadre de la décentralisation rénovée est à ce titre fondamentale, conditionnant même le succès de ce projet ambitieux et novateur. Toutefois, rompre le cloisonnement des finances de l'Etat et celles des collectivités pose de multiples défis à relever. Une synergie difficile à créer ? La problématique de l'articulation efficace des finances de l'Etat et celles des collectivités locales se pose aussi avec acuité en France. A en croire le représentant de l'Ambassadeur de France, cette recherche de synergie serait en partie à l'origine de l'actuel projet de réforme du millefeuille administratif. La nécessaire contribution des collectivités locales au redressement des comptes publics est devenue un leitmotiv dans l'Hexagone. Cela dit, lors de son allocution, Noureddine Bensouda, Trésorier général du Royaume (TGR), a fait un plaidoyer en faveur d'une refonte du système de fiscalité locale dans l'optique de mieux accompagner le transfert des compétences et celui des ressources nécessaires dans le cadre de la régionalisation avancée. Toutefois, celui-ci a tiré la sonnette d'alarme sur certains principaux écueils qui guettent cette réforme. A ce titre, il y a lieu de noter qu'une autonomie fiscale non contrôlée des collectivités locales peut accentuer les inégalités entre les entités territoriales. A cela s'ajoute un autre risque, et non des moindres, celui de voir le citoyen surtaxé. Pour sa part, Michel Bouvier, professeur et président de la Fondafip, a plaidé pour le décloisonnement entre les finances de l'Etat et celles des collectivités locales. Il prône une gouvernance en réseaux qui selon lui, est le seul moyen de remédier durablement aux difficultés financières à l'échelle nationale et locale. Par ailleurs, si l'argentier du Royaume et le TGR se sont évertués à démontrer la nécessité de garantir une certaine autonomie financière des collectivités locales, il n'en demeure pas moins qu'ils ont aussi rappelé que la régionalisation avancée devrait se réaliser en tenant compte des spécificités locales dans le cadre d'un Etat unitaire. Tel un pédagogue usant de méthodes didactiques, le TGR s'est employé à faire un balisage conceptuel. Il estime que la centralité qui caractérise un Etat unitaire implique que le centre soit au service du citoyen. Par conséquent, le rôle de l'administration centrale est d'opérer un arbitrage pour déterminer qui est l'acteur le mieux placé pour servir le citoyen. A ce titre, les collectivités locales, en raison de leur proximité avec le citoyen, ont un rôle majeur à jouer. Mais encore faut-il qu'elles en aient les moyens. A ce titre, une refonte bien ficelée des finances locales constitue un gage pour redonner aux entités territoriales la place qui leur revient dans la dynamique économique du pays, et ce pour le bien-être du citoyen.