Seules 5% des associations communiquent des informations sur l'état des lieux de leur financement alors qu'elles sont environ 60.000 à bénéficier de subventions publiques. Un système normatif dépassé, une négligence des pouvoirs concernés et une complicité très envisageable entre tous ceux qui profitent de cette rente associative témoignent d'une mauvaise gouvernance. Le rapport de la Cour des comptes de 2012 publié en février 2014 a tiré la sonnette d'alarme sur l'opacité autour des subventions étatiques versées aux associations. Il révèle l'absence d'une vision globale relative à l'octroi de ces subventions ainsi qu'une défaillance du contrôle et du suivi sur l'usage des deniers publics. En effet, elles sont 60.000 associations sur 100.000 à bénéficier des aides publiques estimées à 3 milliards de DH. Or, d'après le Haut-commissariat au plan (HCP), plus de 95% des associations ne communiquent aucune information sur l'état des lieux ou l'origine de leur financement. Une situation que Lahbib Choubani, ministre chargé des Relations avec le Parlement et la société civile, juge d'opaque. «Derrière ce constat de mauvaise gouvernance, on trouve un système normatif dépassé, une négligence des pouvoirs concernés, et surtout une complicité très envisageable entre tous ceux qui profitent de cette rente associative», nous avoue-t-il. D'autant plus que les critères requis pour identifier les associations éligibles ne sont pas clairement définis, comme il a été mentionné dans le rapport. «Il a été constaté que les services communaux n'ont effectué aucun contrôle postérieur ... Les associations ne présentent pas leur comptabilité à la commune à l'occasion de la demande de la subvention», cite le rapport de la Cour des comptes. Un vide qui bien évidemment, profite à certains, mais porte préjudice à d'autres. Preuve en est que sur les 60.000 associations bénéficiaires, seules 20% s'accaparent 2,4 Mds de DH, soit 80% du budget. Ce qui laisse plusieurs questions en suspens. Face à ce constat alarmant et dans un contexte marqué par la rareté des ressources financières, le gouvernement a décidé de prendre le taureau par les cornes et de procéder à un suivi plus rigoureux de ces associations. L'objectif étant de rendre leur activité plus transparente et de mettre en place des pratiques de bonne gouvernance. Parmi les mesures mises en place par le gouvernement, le ministre affirme que le dialogue national sur la société civile et les nouvelles prérogatives constitutionnelles ont permis d'avoir un diagnostic participatif inédit et un plan d'action réaliste et réalisable pour une réforme globale, dont le volet de la bonne gouvernance financière a eu sa bonne part de mesures juridiques et institutionnelles pour renforcer l'égalité, la transparence et la recevabilité. En effet, c'est cette inégalité criante dans ce secteur que déplorent certaines associations. C'est dans ce sillage, et dans le but d'éclaircir les zones d'ombre, que le Chef du gouvernement, Abdelilah Benkirane, avait signé une circulaire au mois de mars dernier appelant les ministres à fournir à la Cour des comptes les listes des associations bénéficiaires, les montants des subventions et des aides accordées à ces associations. D'après le ministère de tutelle, la circulaire du Chef du gouvernement a déclenché le processus d'émission des rapports concernant la situation des subventions et des partenariats entre l'Etat et les ONG. Des centaines de documents ont ainsi été envoyés à la Cour des comptes, comme stipulé dans la circulaire. «Ce n'est que le début. Un projet de code de la vie associative, d'environ 200 articles, est en cours de finalisation sur la base des recommandations du dialogue national. Il sera, une fois voté par le Parlement, la réponse adéquate qui mettra de l'ordre dans ce secteur longtemps livré à la négligence et sans encadrement juridique et institutionnel», précise Lahbib Choubani. En effet, le renforcement du cadre réglementaire est l'une des priorités du gouvernement. Rappelons que la loi sur les associations, élaborée au début de l'indépendance, est en décalage avec le contexte actuel, d'où la nécessité d'adopter de nouvelles lois. Dans l'optique d'accélérer la réforme, Lahbib Choubani a été convoqué, mercredi 23 juillet, par le Comité permanent pour le contrôle des finances publiques de la Chambre des représentants pour discuter du budget des subventions allouées aux associations. Une bonne gouvernance pour une meilleure équité L'enquête nationale sur les associations à but non lucratif réalisée en 2009 par le Haut-commissariat au Plan (HCP) a révélé que près de 32% de leurs ressources financières proviennent des dons et transferts courants émanant des ménages (12,7%), des administrations publiques (6,1%), des entreprises (5,7%), de l'extérieur (5%) ou d'autres associations (2,5%). Malgré l'essor que connait le tissu associatif ces dernières années, les associations restent confrontées, dans leur majorité, à de multiples contraintes pour la réalisation de leur mission. Ces contraintes concernent, principalement, l'absence d'équipements pour le fonctionnement et l'accès au financement. En effet, plus de 8 associations sur 10 déclarent souffrir de l'insuffisance des équipements essentiels et trouver des difficultés à accéder au financement.