Prévoir avec exactitude le taux de croissance que connaîtra le pays en 2014, relève d'une prouesse difficile à réaliser en raison de la prégnance des incertitudes. Cela est corroboré par l'existence d'écart pouvant aller jusqu'à 2 points de PIB. L'année 2013 est derrière nous, diront sans doute ceux qui sont plus portés vers le présent et l'avenir. Sauf que le passé peut avoir une forte emprise si ce n'est un déterminisme sur le futur et, surtout, quand il s'agit de perspectives économiques qui sont fortement marquées du sceau du moyen et du long terme. Cela dit, avec le recul, faudrait-il faire la fine bouche devant les performances réalisées par l'économie nationale l'année dernière ? Sans doute pas. Et pour cause, le taux de croissance annoncé se situerait entre 4,5 et 5%. Naguère les comptes extérieurs qui brillaient par leur dégradation ont renoué, en 2013, avec une amélioration de leur déficit. En cela, celui du compte courant devrait s'établir à 7,4% à fin 2013 contre 10% en 2012. Ces quelques données, quoique partielles, montrent quelque part que l'année 2013 ne marquera pas une page sombre de l'histoire économique du pays, même si le déficit budgétaire de 5,5% du PIB est encore jugé élevé par certains économistes. De plus, la réduction significative des charges de compensation dans le budget de 2013 (baisse de 22,4% pour se situer à 35,6 Mds de DH à fin octobre) restera sans doute l'une des réalisations phares qui sera mise à l'actif de l'actuel gouvernement. Maintenant que nous y sommes, qu'augure 2014 en termes de perspectives économiques ? Les experts économiques et les institutions spécialisées les plus réputées du Royaume tentent d'apporter des éléments de réponse à cette question qui en turlupine plus d'un. 2014, l'année des incertitudes ? Pour l'heure, impossible de se faire une idée précise du taux de croissance que le Royaume connaîtra cette année. Les prévisions divergent d'une institution à l'autre. Le HCP reste catégorique sur le taux de 2,5%. Quant à BAM, elle table sur 3%. Ces chiffres contrastent radicalement avec celui du gouvernement qui prévoit une croissance de plus de 4%, témoignant d'un certain optimiste pour certains. Pour sa part, l'assureur Euler Hermès prédit une croissance de 4,5% pour 2014. Quelle crédibilité accordée à ces chiffres à profusion avec des écarts pouvant atteindre deux points de PIB ? Pour les conjoncturistes, ce manque d'exactitude dans les prévisions n'est que la résultante du profil de croissance du pays, essentiellement tirée par le secteur primaire, notamment l'agriculture. Or celle-ci reste foncièrement tributaire des aléas climatiques. Des scénarios tablent d'ores et déjà sur une production agricole de 70 millions de quintaux pour la campagne 2014 qui serait en baisse de 38,6% par rapport aux 97 millions de quintaux enregistrés en 2013. De ce point de vue, la croissance pourrait accuser une contraction. Cela dit, tout le monde sait que l'économie nationale affiche un taux d'ouverture élevé (supérieur à 40%). Partant, l'activité économique des principaux partenaires économiques du Royaume conditionne l'évolution de la demande adressée au pays et sa croissance. A ce stade, il est utile de rappeler que le FMI table sur une croissance mondiale en hausse (3,6% en 2014 contre 2,9% en 2013). Elle sera essentiellement tirée par les pays émergents (Brésil, Inde, Chine, etc.) qui importent de plus en plus du phosphate (engrais et produits dérivés) en provenance du Royaume. La bonne nouvelle pour l'économie nationale est la reprise que connaîtra le premier client du Royaume (UE) en 2014 (1% de croissance contre 0,4 en 2013), ce qui est de bonne guerre pour les exportations. En revanche, l'autre facteur d'inquiétude réside dans les prévisions du HCP pronostiquant une baisse de la demande intérieure (consommation des ménages et investissement public). Et pourtant, celle-ci constitue le moteur de la croissance du pays. Ainsi, la contribution de la consommation nationale finale à la croissance ne devrait se situer qu'à 2,1 points cette année contre 4,2 points en 2013. Compte tenu de ce qui précède, il est clair que la balance penche en faveur d'une croissance qui sera moins soutenue que celle de 2013. Des agrégats contrastés Pour l'heure, il n'existe aucune donnée à même de présager de l'évolution des crédits bancaires qui constituent un baromètre phare du niveau de financement de l'économie nationale. En revanche, les derniers chiffres de BAM font ressortir une progression de 3,1% du crédit bancaire durant le quatrième trimestre 2013 contre 2,6% en moyenne durant le trimestre précédent. Pour certains experts, cela consolide le mouvement de redressement amorcé depuis août 2013 qui pourrait se poursuivre au premier trimestre 2014. En faisant un zoom sur la ventilation du crédit bancaire par agent économique, il ressort de façon édifiante une augmentation du rythme de croissance des prêts accordés au secteur privé (+3,5% au 4 ème trimestre 2013) au détriment du secteur public qui voit un repli des prêts qui lui sont accordés. Cela présage-t-il du recul de l'effet d'éviction tant décrié sur l'échiquier national ? Rien n'est moins sûr si l'on se réfère au projet de Loi de Finances 2014 qui table sur un déficit budgétaire de 4,9% sur la base d'une hypothèse de croissance de 4% fortement remise en cause. Or, tant que ce déficit persistera, le Trésor public sera contraint de lever les fonds nécessaires au fonctionnement de l'Etat sur le marché intérieur, réduisant ainsi l'accès du privé au financement. Dans un autre registre, il convient de noter que l'économie nationale devrait tirer profit de la baisse du cours moyen du pétrole qui devrait chuter à 97,6 $/baril en 2014 contre 102,6 $ en 2013, d'après les prévisions du HCP. Cette baisse allégera dans une certaine mesure les fortes tensions qui pèsent sur les coûts de production des entreprises qui doivent faire face à une augmentation annuelle de 8% des coûts salariaux unitaires. Concernant l'inflation, l'année 2014 ne constituera pas une entorse à la mission de BAM, celle de la confiner entre 2 et 3%. Le taux prévu pour cette année est de 2,5%.