Les dépenses du Budget général ont atteint un niveau préoccupant qui dépasse les recettes ordinaires et nécessite le recours de plus en plus accru à l'endettement. Dans un contexte marqué par la raréfaction des liquidités au niveau du système bancaire, le financement du Trésor exerce un effet d'éviction. Le colloque consacré au «pilotage des réformes en finances publiques» a débattre des défis à relever en la matière. Le colloque international sur les finances publiques, organisé récemment, par le ministère de l'Economie et des Finances, en partenariat avec l'Association pour la Fondation internationale des finances publiques (Fondafip) a tenu sa 7ème édition. Un rendez-vous devenu incontournable pour les experts avides de débattre des enjeux des finances publiques dans un contexte très aléatoire. Le leitmotiv de cette rencontre de grande envergure est de limiter les effets induits par la crise qui peuvent être transmis d'un pays à un autre. Et surtout de transformer les contraintes en véritables opportunités. «D'où l'urgence de poursuivre les réformes structurelles et de les piloter en toute responsabilité afin de stimuler la croissance», souligne Aziz Akhannouch, ministre de l'Economie et des Finances par interim. Ajouté à cela, le périmètre des exigences du monde arabe qui s'accroît de plus en plus et induit l'impérieuse nécessité de se remettre continuellement en cause par rapport à des convictions confortablement établies. Il est temps d'intégrer le processus de réforme et de pilotage des finances publiques à l'effet d'accélérer le rythme et la cadence de mise en œuvre des politiques publiques afin que le citoyen puisse en ressentir rapidement les effets. Des chiffres préoccupants «L'un des risques majeurs serait de s'imaginer qu'il suffirait de disposer d'un modèle technique sophistiqué ayant éventuellement fait ses preuves ailleurs pour que la réussite soit assurée», annonce Michel Bouvier, président de Fondafip. Il entend, par là, qu'une réforme n'a aucune chance de réussir si elle ne prend pas en considération le fait que tout contexte national a ses propres particularités. A l'instar des autres pays, le Maroc n'est pas mieux loti. A fin 2012, les finances publiques ont été marquées par l'essoufflement de son système de gestion fondé, depuis longtemps, sur la logique de moyens et de répartition des crédits. Les dépenses du budget général ont atteint un niveau alarmant qui dépasse les recettes ordinaires et nécessite le recours de plus en plus accru à l'endettement aussi bien interne qu'externe. Elles sont ainsi passées de 114,7 Mds de DH en 2001 à 264,2 Mds de DH en 2012, avec une prédominance des salaires (40% en moyenne) et des charges de la compensation en hausse depuis 2005 (13% en moyenne). On assiste, par ailleurs, au passage d'une épargne longtemps positive à une épargne budgétaire négative (-16,7 Mds de DH) à juin 2012. Pour une meilleure appréciation des engagements de l'Etat en matière d'endettement, il convient de tenir compte de la dette des établissements publics, des Collectivités locales et des organismes de retraite. A noter que les montants annuels mobilisés par le Trésor, dans le cadre du marché des adjudications, ont enregistré une forte augmentation puisqu'ils sont passés de 41,9 Mds de DH en 2007 à 120,3 Mds de DH en 2012. Or, dans un contexte marqué par la raréfaction des liquidités au niveau du système bancaire, le financement du Trésor exerce un effet d'éviction. Au niveau des recettes, force est de constater que les prélèvements ou la pression fiscale ont atteint des niveaux élevés. Un fait qui devient pernicieux dans un contexte très concurrentiel. Il ressort, ainsi, que les principaux indicateurs des finances publiques présentent certaines fragilités similaires à celles ayant prévalu durant les années quatre-vingt. C'est ce qui explique d'ailleurs, le projet de réforme de la Loi organique des Finances (LOF), mais qui tarde encore à voir le jour. Parmi les instruments de déploiement d'une telle réforme, on peut citer les systèmes intégrés d'information développés par la Trésorerie Générale du Royaume, notamment la gestion intégrée des dépenses, la gestion intégrée des recettes, le système de paie du personnel et le programme de dématérialisation de la commande publique. D'après Noureddine Bensouda, trésorier général du Royaume, «tels que conçus et développés actuellement, ces systèmes d'information favoriseront largement la mise en place de la LOF». Cette dernière est également fondée sur la performance, l'efficience et l'efficacité de l'action publique. Hormis la LOF et ses soubassements, la corrélation des dépenses avec les recettes constitue l'un des éléments de culture qu'il faudrait imprimer aux comportements des gestionnaires des finances publiques. Une chose estsûre : une conjoncture aussi difficile que celle que traverse aujourd'hui le Maroc ne tolère plus de se comporter avec désinvolture à l'égard de nos dépenses publiques.