L'équité a été placée en tant que thématique centrale lors des Assises de la fiscalité tenues récemment au Palais des congrès à Skhirat. Le sujet de l'équité fiscale concerne notamment plusieurs volets, dont la collecte de l'impôt, son traitement ou encore sa distribution. Un sujet qui a poussé le Maroc à engager plusieurs démarches en vue de la réforme de sa fiscalité pour se conformer en premier lieu à son économie, et ensuite à ses engagements internationaux, suite notamment à la fameuse liste grise des paradis fiscaux de l'Union européenne, dont le Royaume fait partie. Le principe de l'équité induit qu'il faut que la fiscalité soit neutre, même quand il s'agit de prendre des décisions économiques. Autrement dit, il faudrait que l'ensemble des opérateurs soit imposé de la même manière; il ne faut pas qu'il y ait des préférences entre acteurs économiques, qu'ils soient marocains ou étrangers, exportateurs ou non. Une voie que le Maroc tente d'engager malgré les difficultés.
Incitation ou équité fiscale ? Mais là se pose toute la difficulté : comment assurer une équité tout en gardant des mesures fiscales incitatives pour espérer continuer à attirer les porteurs de capitaux? Doit-on mettre de côté les incitations fiscales pour assurer une équité entre les acteurs économiques et, in fine, se conformer aux standards internationaux en matière fiscale ? Les points de vue des experts divergent à propos de cette problématique. Certains n'envisagent guère la viabilité d'une économie sans mesures fiscales incitatives. «Personnellement, je pense qu'une fiscalité sans incitations est impossible. Et on ne peut pas aujourd'hui dire à un (gouvernement) : vous n'avez pas le droit d'accorder une incitation fiscale quelconque. Une telle posture serait contraignante pour la viabilité de notre économie», précise Mohamed Hdid, président de la Commission de la fiscalité et du régime de change-CGEM, lors d'une interview qu'il nous a récemment accordée. Pour Mustapha Aman, directeur du Contrôle fiscal à la Direction générale des impôts, qui intervenait dans un panel lors des Assises «l'idée est de choisir les incitations fiscales qui sont efficaces, correspondant aux normes, et porteuses de valeur ajoutée pour les secteurs concernés». Selon la DGI, l'essentiel est d'avoir des incitations ciblées, avec une étude pour bien évaluer l'impact de ces mesures avant et après leur instauration, afin de savoir si elles correspondent à l'objectif recherché.
Rationalisation des incitations fiscales Au final, les recommandations issues des Assises, et en lien avec le volet des incitations, sont venues définir un cadre normatif pour les conditions d'octroi des incitations fiscales et leur encadrement. Il s'agira d'évaluer l'ensemble des incitations fiscales pour supprimer celles qui n'ont pas donné les effets escomptés, en plus de la mise en place d'un dispositif institutionnel d'évaluation des impacts socio- économiques des incitations fiscales, et privilégier le soutien par l'appui budgétaire direct. Ces mesures de rationalisation concernent l'ensemble des activités exportatrices que le Maroc devra revoir de manière plus approfondie pour aspirer à plus de conformité. Une voie que le pays a déjà balisée dans la Loi de Finances 2019. En effet, rappelons que le Royaume a adopté plusieurs mesures fiscales allant dans le sens de la conformité, dont la suppression du régime fiscal des banques offshores et des sociétés holding offshores, la suppression des exonérations octroyées aux banques offshores et aux sociétés holding offshores. Dans le même registre, il y a l'imputation de l'impôt étranger, la suppression du régime fiscal des centres de coordination, la définition des règles de territorialité et la clarification de la TVA transférée en cas de fusion, de scission ou de transformation. De même, le Royaume s'engage, suite aux Assises, à «normaliser» les régimes préférentiels appliqués à l'export, aux zones franches d'exportation et à Casablanca Finance City, la place financière casablancaise, dont les membres bénéficient d'une série d'avantages fiscaux. ◆