Le gouvernement table sur un taux de croissance de 4,5% et un déficit de moins de 5%. Ces objectifs restent subordonnés à l'évolution de la campagne agricole et à la stabilisation économique en Europe. Il reste moins de dix jours pour présenter le projet de Loi de Finances 2013 au Parlement, comme le stipule la Constitution. Le ministère des Finances n'a pas encore finalisé le texte. Ce qui était rarissime en pareille période lors des précédentes Lois de Finances. Vu la conjoncture économique difficile, le gouvernement est obligé de faire des arbitrages entre les budgets des différents départements. Malgré les mesures d'austérité lancées auparavant, plusieurs budgets sectoriels seront soumis à une cure d'amaigrissement. Nizar Baraka a reconnu que «la situation économique du Maroc passe par des moments délicats, impactée en cela par la crise internationale, surtout en Europe où le marasme sévit depuis 5 ans». Le ministre des Finances a défini les grandes lignes du projet de Loi de Finances qui table sur un taux de croissance de 4,5%. Pour ce faire, l'équipe de Benkirane veut maintenir le niveau d'investissement public à travers une nouvelle approche. La nouvelle démarche vise essentiellement à améliorer la rentabilisation des investissements déjà réalisés et avoir un meilleur contenu pour une meilleure valorisation des effets produits. «Théoriquement, ce niveau de croissance est réaliste, mais encore faut-il qu'il soit réalisable dans la pratique», a expliqué Mohamed Amrani, professeur universitaire. Il souligne que «cet objectif reste intimement lié à l'évolution de la campagne agricole. Les autres secteurs, notamment ceux tournés vers l'export, ne sont pas arrivés à un niveau leur permettant d'assurer un développement indépendant des aléas climatiques». Il note que «toutes les projections estiment que la crise persistera en Europe en 2013. De ce fait, le Royaume devra subir les contrecoups, notamment dans les secteurs fortement touchés comme le tourisme, par exemple». L'orthodoxie financière adoptée par le Maroc exige de mettre un terme aux dérapages des indicateurs macroéconomiques, à commencer par le déficit budgétaire qui risque d'atteindre au terme de cet exercice des niveaux inquiétants. On parle déjà de 6%, mais le seuil des 10% reste probable. Le gouvernement table sur un retour à la normale à l'horizon 2016, soit un niveau de 3%. Pour 2013, le déficit programmé dans la LF 2013 est de 4,8%. «Les engagements de l'Etat sont importants et cela nécessite des efforts en matière de dépense. Les mesures d'austérité ont des effets limités et, parfois, elles ont des effets contraires car elles impactent la demande intérieure qui est une véritable dynamo de la croissance. Les recettes fiscales ne peuvent pas évoluer considérablement car ceux qui payent l'impôt sont les mêmes et ils sont surtaxés, et les autres payent faiblement ou échappent à toute forme d'imposition», souligne Amrani. «Dans la conjoncture actuelle, il est difficile de respecter le niveau de déficit à moins de 5%. Le salut ne peut venir que des privatisations ou des réformes radicales des postes budgétivores comme la compensation», a rapporté Amrani. La tendance est de réduire le nombre de dérogations fiscales qui continuent de présenter un manque à gagner de près de 30 Mds de DH pour le Trésor. L'autre indicateur fortement inquiétant et qui a interpellé les autorités est lié aux avoirs en devises. Il y a quelques années, le Maroc disposait d'une position confortable dans ce domaine avec un volume qui frôle les 12 mois d'importations. Actuellement, ce niveau se rapproche des 4 mois d'importations, marquant la nette dégradation en continu de ce compartiment. A titre préventif, le gouvernement s'est prémuni en concluant un accord de 24 mois avec le FMI pour obtenir la ligne de précaution et de liquidité (LPL), d'un montant de 6,21 milliards de dollars. Pour stopper la chute des avoirs extérieurs, le gouvernement veut lancer des mesures permettant d'avoir des contrats de croissance avec les entreprises, de renforcer et d'accélérer les stratégies sectorielles en faveur de l'export, de s'inscrire dans de nouveaux contrats-programmes dans des secteurs à forte capacité d'exportation et de réduire le contenu en importations au niveau des investissements publics. Par C. Jaidani Trois objectifs prioritaires : Gouvernance, compétitivité et égalité sociale Le projet de la LF 2013 vise trois objectifs prioritaires portant sur la mise en œuvre des réformes structurelles nécessaires et l'amélioration de la gouvernance, tout en veillant au rétablissement des équilibres macroéconomiques et financiers, l'amélioration de la compétitivité de l'économie nationale et la réduction des disparités sociales et sectorielles. Cela, à travers la poursuite de la mise à niveau du système éducatif, à l'effet d'assurer un accès équitable à l'éducation, la lutte contre l'analphabétisme, la pauvreté et la précarité, la facilitation de l'accès aux services de santé de base et au logement, le renforcement des mécanismes de solidarité et l'amélioration des conditions de vie de la population, notamment en milieu rural et dans les zones enclavées. Dans ce même cadre, les ressources du Fonds d'appui à la cohésion sociale seront renforcées pour lui permettre de finaliser la généralisation du Ramed, l'élargissement de la base des bénéficiaires du programme d'aide monétaire en faveur de la scolarisation des enfants démunis et l'appui direct aux familles à besoins spécifiques. Les moyens financiers du Fonds de développement rural et des zones de montagne seront renforcés, ainsi que ceux du Fonds Solidarité habitat dont le champ d'intervention sera étendu aux habitats menaçant ruine. Par ailleurs, de nouveaux dispositifs sont prévus pour renforcer le contenu de la croissance en emploi.