Une circulaire assez imprécise, mais qui rapporte quand même des sous. Le résultat fiscal comme assiette de calcul. Inéquité fiscale, imposition en cascades (sociétés-mère + filiales)... sont autant d'éléments qui fâchent les contribuables. La situation actuelle des relations économiques et financières du Maroc avec le reste du monde se traduit par de forts déséquilibres qui ont des effets négatifs sur le financement de l'économie nationale. D'après les analystes, les perspectives de 2012 et 2013 ne présagent pas d'enrayer les déséquilibres internes et externes qui ont toutes les chances de s'aggraver. Le creusement du déficit courant risque de s'amplifier avec la dégradation du taux de couverture des importations par les exportations, les risques sur les recettes voyage et les risques de stagnation voire de baisse des recettes des MRE. Pis encore, cela risque de pousser le Maroc à trop puiser dans ses réserves de change et de ne pouvoir exclure le recours à l'emprunt international dans un contexte encore marqué par la crise. Face à cette situation qui se profile, le gouvernement a procédé à la création d'un fonds de cohésion sociale dans le cadre de La Loi de Finances 2012. Ce fonds est essentiellement destiné à permettre la contribution au financement des dépenses afférentes à la mise en œuvre du régime d'assistance médicale (RAMED), l'assistance aux personnes en situation de handicap en leur permettant l'acquisition d'appareillages spécifiques et autres aides techniques, l'amélioration des conditions de scolarisation, l'incitation à leur insertion professionnelle, la promotion d'activités génératrices de revenus... Ledit fonds est également destiné à la lutte contre l'abandon scolaire, notamment par l'octroi de manuels et de fournitures scolaires par les aides financières directes au profit des élèves scolarisés issus des familles démunies. Parmi les sources de financement du fonds, on note la contribution pour l'appui à la cohésion sociale, mise à la charge des sociétés soumises à l'I.S. Le montant de la contribution est assis sur le montant du bénéfice net de l'exercice comptable déclaré, au titre de l'impôt sur les sociétés en 2012. Ladite contribution est de 1,5% du résultat net pour les sociétés dont le bénéfice est compris entre 50 et 100 MDH. Elle est de 2,5% pour celles dont le bénéfice net est supérieur à 100 MDH. A fin septembre 2012, le solde dégagé par le fonds d'appui à la cohésion sociale est de 2 Mds de DH. Cette mesure paraît prometteuse parce qu'elle permet de remédier, en partie, au déficit courant évoqué ci-dessus. Mais encore faut-il qu'elle soit claire et transparente pour les assujettis.. Depuis sa publication, de nombreux contribuables se plaignent du fait que la circulaire ne donne pas assez d'explications sur les modalités de calcul de la taxe (résultat comptable ou fiscal). Interrogé à cet égard, Houssaine Houssifi, expert-comptable explique : «la lecture de la circulaire émise par l'administration fiscale laisse le contribuable sur sa faim. En effet, le texte afférent à la contribution désigne le résultat net déclaré au titre de l'exercice 2012 comme assiette de calcul. Il ne précise pas s'il s'agit du résultat net comptable ou du résultat fiscal. La différence entre les deux grandeurs est parfois de taille», précise-t-il. D'après lui, et du moment qu'on parle de cohésion sociale, il convient de traiter le résultat net comptable. Celui-ci correspond à la rémunération des actionnaires en contrepartie des capitaux investis. Il s'agit donc d'un transfert de la richesse des nantis vers les démunis. Si, par contre, on opère la contribution sur le résultat fiscal, les actionnaires risquent d'être pénalisés et de voir leur participation effective dans le fonds plus importante que les quotités prévues par le barème. A ce sujet, une source proche du dossier nous confirme qu'il s'agit du résultat fiscal. Un autre écueil est signalé par les contribuables, au sujet de la constitutionnalité du fonds. Pour les entreprises ayant un exercice comptable à cheval, le bénéfice déclaré est basé sur l'exercice allant du1er avril 2011 jusqu'au 31mars 2012. Or, le fonds a été institué au mois de mai 2012. Ce qui remet en cause le principe de la non-rétroactivité de la loi. Les entreprises qui ont un exercice à cheval, au Maroc, sont en nombre infime. Cartier SAADA est dans ce cas. Contacté par nos soins, un responsable au sein de la société a laissé entendre «nous n'avons pas atteint le seuil d'imposition et donc nous ne sommes pas assujettis». Pour les contribuables ayant un exercice coïncidant avec l'année civile, le paiement de la contribution doit se faire au plus tard le 31/01/2013. Il est utile de rappeler que maintes sociétés ne disposent pas des informations nécessaires à l'établissement de la déclaration du fait que l'arrêté des comptes n'est définitif que le 31/03/2013. Est-ce que le contribuable est dans la possibilité d'effectuer la déclaration sur la base des éléments provisoires et de procéder aux régularisations nécessaires en temps opportun ? Là encore la circulaire ne répond pas. Hormis ces questions, notre expert-comptable soulève un autre point, également important, à savoir celui de l'inéquité fiscale. La contribution étant exigée des assujettis relevant de l'impôt sur les sociétés, ceux étant soumis à l'IR n'étant pas concernés. «Il s'agit à notre sens d'une discrimination fiscale pouvant rompre avec l'équité fiscale. En effet, deux contribuables exerçant la même activité et réalisant les mêmes performances en terme de résultats seront appréhendés différemment, en fonction de leur statut juridique, au regard des dispositions concernant la contribution», affime H. Houssifi. Cette disposition intervient malheureusement dans un contexte marqué par l'encouragement des entreprises soumises à l'impôt sur le revenu à passer sous le régime de l'impôt sur les sociétés. Les règles de concurrence et de compétitivité seront alors momentanément biaisées. Un autre bémol a été souligné par les banques lors de la présentation des résultats du premier semestre de l'année en cours. Elles subissent la taxation à plusieurs niveaux, dans la mesure où la société-mère et les filiales paient l'impôt pour la cohésion sociale. Il reste à préciser que la contribution n'est pas déductible fiscalement. Cette disposition est logique. En effet, pour conférer à cette contribution le caractère de solidarité et d'adhésion à la cohésion, la déductibilité ne peut être admise.