ν Après plus de trois ans de va-et-vient, le projet de réforme de la loi 06-99 sera discuté en Conseil de gouvernement, début octobre, puis mis sur le circuit de validation. ν Avec 128 articles, le projet dote le Conseil d'autonomie morale et financière lui conférant le rôle de vrai organe de régulation. Fini le rôle consultatif, le CC est attendu pour renforcer l'Etat de doit dans le monde des affaires. L'idéal serait que la loi passe en session d'automne, ou celle d'avril 2013 au plus tard. Quatre années laborieuses que celles que vient de vivre le Conseil de la concurrence depuis sa réactivation en 2008 ! Dès le milieu de l'année 2009, et à peine constituée, l'équipe dirigeante du Conseil de la concurrence avait préparé une nouvelle mouture du texte de la loi 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence. En effet, la réforme du cadre réglementaire qui régit le travail du Conseil était érigée en priorité par son président Abdelali Benamour. Et pour cause, avec un statut d'organe consultatif, le Conseil ne pouvait réellement remplir son rôle d'organe de régulation de la concurrence avec tout ce que cela implique comme prérogatives d'arbitrage et d'env quête dans les cas de concurrence déloyale. De 2009 à 2011, les choses semblaient alors être à la traîne et la proposition de projet du Conseil était restée quasiment au point mort jusqu'au 16 avril, date à laquelle le président du CC avant été reçu par SM le Roi. Une audience durant laquelle le Souverain avait souligné la nécessité d'une opérationnalisation optimale du Conseil pour qu'il puisse accomplir les missions qui lui sont dévolues, en particulier le contrôle des concentrations économiques, la création d'un climat propice à la concurrence loyale, la liberté d'entreprise, l'égalité des chances, la lutte contre l'économie de rente et contre les différentes formes de monopole et de privilèges indus, et ce dans le cadre d'un dispositif institutionnel national cohérent de bonne gouvernance économique. Ce fut l'élément qui devait donner un coup d'accélérateur à la révision du cadre juridique régissant cette institution, dans le sens du renforcement de son autonomie et de l'élargissement de ses compétences, y compris celle de l'autosaisine. Cette révision devrait également permettre à cette instance de disposer des moyens humains et matériels nécessaires, et des mécanismes juridiques efficients dont elle a besoin pour qu'elle puisse remplir au mieux les prérogatives qui sont les siennes. Et avec l'avènement de la Constitution, il a fallu reprendre le projet de loi et y intégrer tous les éléments nouveaux apportés par le texte constitutionnel. Et depuis le 4 septembre, l'avant-projet de la loi modifiant la loi no 06-99 sur la liberté des prix et de la concurrence est soumis à commentaire sur le site du Secrétariat général du gouvernement, et ce pour une période de 30 jours à compter de la date sus-mentionnée. L'occasion pour les acteurs économiques, la société civile, les associations de protection du consommateurs et le grand public de prendre connaissance de ce projet de loi et le commenter. Une nouvelle loi, un nouveau destin L'avant-projet se donne pour objet de définir les dispositions régissant la liberté des prix et d'organiser la libre concurrence, tout en définissant les règles de protection de la concurrence afin de stimuler l'efficience économique et d'améliorer le bien-être des consommateurs. Il tend également à assurer la transparence et la loyauté dans les relations commerciales. Le projet pose ainsi tout au long des 128 articles qui le composent la notion de liberté des prix et définit clairement les pratiques anticoncurrentielles qui tombent sous le coup de la loi. Il rend également obligatoire la notification des opérations de concentrations économiques au Conseil de la concurrence avant même qu'elles ne soient réalisées afin qu'il examine si elles pourraient être de nature à porter atteinte à la concurrence, notamment par la création d'une position dominante sur leur marché. Evidemment, ces principes ont également été contenus dans la loi actuelle mais rendus plus explicites dans le projet de loi. La différence est qu'entre vœux pieux et actions concrètes sur le terrain, il y avait l'obstacle du caractère consultatif du Conseil. Aujourd'hui, ce verrou saute et de plus l'article 24 du projet dispose qu'il est institué une autorité administrative indépendante, dénommée Conseil de la concurrence, aux attributions décisionnaires et consultatives. Ainsi, après une lutte acharnée de l'équipe du CC, le Conseil se voit enfin doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière. Des attributions qui vont changer énormément le rôle du CC, en plus de la saisine et auto-saisine, c'est le pouvoir d'enquêter et d'ordonner de mettre fin aux pratiques concurrentielles dans un délai déterminé ou imposer des conditions particulières. Et si les mesures conservatoires ne sont pas respectées, il peut prononcer une sanction pécuniaire. Mais quand il s'agit de faits graves, comme fausser le jeu de la concurrence sur tout un secteur ou empêcher l'accès à un marché donné, comme les pratiques visées aux articles 6 et 7 de l'avant-projet de loi, le CC adresse le dossier au procureur du Roi près le tribunal de première instance compétent aux fins de poursuites conformément à l'article 93 du projet de loi 06-99. Les attributions sont nombreuses, importantes et incluent notamment des aspects relatifs à la protection du consommateur. Puisque le CC a désormais l'attribution de contrôle des pratiques commerciales déloyales. Cela pose notamment la question du champ d'action du Conseil et des moyens qui lui seront attribués, humains et techniques, pour s'acquitter de cette tâche. La loi préserve le rôle d'advocacy du Conseil et de sa proximité de l'opinion publique puisqu'il établit chaque année, avant le 30 juin, un rapport d'activité qu'il adresse au Roi, au Parlement et au Chef du gouvernement. Ledit rapport fait ainsi l'objet d'un débat au Parlement et est par la suite rendu public. Une adoption à la mi-2013 souhaitable Il est essentiel pour un pays qui a opté pour l'économie de marché de se doter d'un organe de régulation de la concurrence qui soit fort et qui contribuera au renforcement de l'Etat de droit, notamment dans le domaine des affaires, la mise à niveau de l'économie nationale, sa modernisation et la consolidation de sa compétitivité et de sa capacité d'incitation et d'attraction de l'investissement productif. Ce n'est qu'ainsi que le pays pourra augmenter le rythme de sa croissance économique. D'où la nécessité d'accélérer la cadence de discussions de cet avant-projet de loi qui devrait être discuté en Conseil de gouvernement début octobre avant d'être présenté devant le Parlement pour discussion et adoption. L'idéal serait que la loi passe durant cette session d'automne et au plus tard durant celle d'avril 2013. En effet, la loi n'entrera en vigueur que six mois après sa publication au Bulletin Officiel. Un temps précieux qu'il faut mettre à profit pour le monde économique marocain qui a plus que jamais besoin d'une instance forte pour l'accompagner et lui assurer des conditions optimales d'investissement et de développement.