L'Alliance des Economistes Istiqlaliens tire la sonnette d'alarme. Le pilotage de l'économie doit se concentrer sur les réserves de change. Selon l'Alliance des Economistes Istiqlaliens (AEI), l'économie marocaine pourrait être au bord d'un accident macro-économique sérieux sauf si les décideurs changent le cap de la politique économique. C'est ce qui ressort en substance de la dernière rencontre de l'AEI avec la presse afin d'exposer son analyse de la situation financière actuelle du Maroc et ses recommandations. L'environnement macroéconomique mondial a évolué défavorablement pour le Maroc depuis 2011, ce qui a modifié l'équilibre macroéconomique de notre pays de façon significative. «Le premier et le plus grave n'est pas le déficit budgétaire, ni sa résultante, la dette publique, contrairement à ce qui est lu ici ou là. Le premier danger, de loin le plus critique, est le retard pris dans la construction des métiers exportateurs (8 secteurs clés identifiés) ainsi que la forte croissance de nos importations. La fonte rapide de nos réserves de change nous conduit vers la situation de 1980», déclare Adil Douiri, président du bureau exécutif de l'Alliance. De facto, si le Maroc ne réagit pas avec vigueur et autorité, les réserves de change passeront sous un seuil critique qui conduira à un début de mise sous tutelle de l'économie nationale par les institutions financières internationales. Un deuxième risque macroéconomique, mais de bien moindre ampleur et de bien moindre gravité, est apparu : une succession de plusieurs années de déficits budgétaires élevés qui conduit à faire remonter la dette publique (en % du PIB) vers la limite supérieure admissible. La cause principale est la forte hausse des cours internationaux des produits pétroliers qui n'est pas répercutée sur les consommateurs, mais supportée par le budget de l'Etat. L'AEI considère qu'il ne faut pas se tromper d'objectif ni se focaliser sur plusieurs objectifs en même temps. «Le pilotage de l'économie marocaine doit se concentrer intensément sur les réserves de change, c'est-à-dire sur les exportations de biens et de services», précise Douiri. De ce fait, l'AEI préconise trois corrections de la politique économique actuelle. La première serait la modification de la mise en œuvre de certains plans exportateurs critiques pour le chiffre d'affaires à l'export. Modifier la méthode de mise en œuvre signifie, toujours selon Douiri, «accélérer la mise en œuvre et cette accélération ne peut venir que d'une implication directe de l'Etat dans certains projets (exemple : le complexe industriel de Renault à Tanger-Med dans lequel même le capital de la société a été partiellement souscrit par le secteur public marocain)». La deuxième correction favorise le déplacement de l'effort d'investissement public de l'Etat, pendant quelques années, de l'infrastructure pure vers la concrétisation de projets de construction des unités industrielles et des stations touristiques. En troisième lieu, le Maroc a vécu 10 années de forte hausse de la consommation des ménages; maintenant, la priorité absolue, selon l'AEI, doit se tourner vers la construction des unités productives (créant ainsi des emplois) et vers l'exportation. «Tous les leviers doivent être mis en œuvre pour ralentir et freiner la hausse des importations des biens de consommation, notamment par des mesures douanières ou un glissement de la valeur du Dirham. Un léger freinage du rythme de croissance de la consommation des ménages est à présent incontournable pour éviter un accident macroéconomique sérieux», conclut Adil Douiri.