Dans un pays à vocation agricole comme le Maroc, les Chambres dagriculture sont supposées jouer un rôle déterminant pour accompagner le processus induit par la mondialisation. Néanmoins, avec des missions aux contours mal circonscrits, des moyens financiers insuffisants, un personnel peu formé elles ont plus que jamais besoin de se mettre à niveau. Etablissements financés par les deniers publics, les Chambres dagriculture sont sous tutelle administrative, technique et financière de lÉtat. Pour lhistoire, les premières Chambres dagriculture ont été créées en 1913 par arrêté résidentiel. Elles étaient appelées communément Chambres françaises de commerce, dindustrie et dagriculture. Leurs membres, Français, étaient nommés par le Résident général. Mais, après lindépendance, le dahir du 24 octobre 1962 donna un nouveau statut aux Chambres dagriculture. Depuis cette date, le texte les régissant a été enrichi par plusieurs amendements. Quant aux missions qui leur sont dévolues, elles sont généralement peu ou mal effectuées lorsquelles ne manquent pas dunité et de cohérence. Dans le cas despèce, lon constate que ces missions sont déjà réalisées par dautres intervenants publics ou privés, sans que le partage des compétences et la répartition des responsabilités soient clarifiés. Pour preuve, dès leur création, lorganisation juridique et financière de ces établissements pouvait déjà présager des difficultés de fonctionnement. En clair, limplication et le contrôle de lEtat offraient peu despace de manuvre à la direction de ces organismes dont les attributions relèvent beaucoup plus de la représentation et de la consultation. Aujourdhui, les Chambres dagriculture doivent accompagner les changements quimpose la mondialisation. Certes, il existe des organisations professionnelles agricoles au Maroc, mais les actions de ces dernières doivent être menées de concert avec les Chambres dagriculture. Manque de moyens Lon na pas besoin de démontrer le rôle quelles auront à jouer, encore faut-il quon leur donne les moyens. Sur le plan financier, les moyens proviennent exclusivement des subventions publiques et représentent actuellement quelque 16 millions de dirhams, soit environ 430 000 dirhams par chambre annuellement. Budget bien dérisoire puisquil permet de couvrir à peine les dépenses de fonctionnement. En lan 2000, il y a eu un projet-décret qui prévoyait une taxe parafiscale sur les produits agricoles afin de financer les associations (70%) et les Chambres (30%). Signé par le ministère de lIntérieur et celui de lAgriculture, le projet na pas encore vu le jour. En attendant des jours meilleurs, lon peut encore puiser dans les caisses du fonds de développement agricole. Pour lanecdote, certaines Chambres ne disposent même pas de fax. Cependant, pour ce qui est du personnel, cest une autre paire de manches. Le niveau de la formation, si ce nest la formation, tout court fait surtout défaut. Les Chambres disposent au total de 260 agents dont environ 80% soumis au statut du personnel des Chambres; le reste étant mis à la disposition de celles-ci par le ministère de lAgriculture. Une analyse concernant les organisations professionnelles agricoles émanant du ministère de lAgriculture laisse apparaître que près de la moitié du personnel nont pas dépassé le niveau du collège, 13% nont aucun niveau détudes et seulement 11% ont une licence ou le niveau équivalent. Cest gravissime pour un pays à vocation agricole. Ceci explique que la faible qualification et le manque de profils spécialisés handicapent fortement les Chambres dans lexercice de leurs missions. Ledit rapport souligne également labsence dune véritable politique de recrutement et de formation continue. Quant à la représentativité, si de prime abord elle savère insuffisante, le dahir de la création des Chambres prévoyait que seul le citoyen marocain ayant un lien direct avec la terre y soit éligible. De ce fait, contrairement à dautres pays, certains organismes et personnes ayant des activités liées étroitement à lagriculture ne sont pas éligibles aux Chambres dagriculture. Cest le cas pour les coopératives agricoles, les producteurs hors-sol, les salariés des exploitations et groupements professionnels agricoles. Pour ainsi dire, les Chambres dagriculture sont loin dêtre représentatives de toute la diversité du monde agricole. Non pas quelles soient des «coquilles vides», des coquilles vidées de toute leur substance, mais des entités pour lesquelles toutes les chances de réussite ont été écartées dès le départ. Pourquoi les a-t-on créées alors ? Certes, lon pourrait considérer que le monde agricole sort dune longue période basée sur une politique publique interventionniste et quil se trouve directement exposé à tous les risques du libéralisme économique, lorsquil ne sagit pas des aléas climatiques. En tout état de cause, les Chambres dagriculture doivent jouer le rôle qui leur sied sinon elles seront appelées à disparaître. Pour linstant, la faiblesse des moyens laisse peu despoir aux grandes actions.