■ Des mesures sont à l'ordre du jour en matière de contrôle. ■ La convertibilité totale du Dirham suppose la mise en place d'un dispositif approprié. Détails. La réglementation de change ne cesse de susciter des débats. Et pour cause, le déficit de notre balance commerciale ne cesse de se creuser. Chiffres à l'appui : le taux de couverture est passé de 51,2% à fin 2010 à 47,3% à fin septembre 2011. Et les prémices de la reprise ne semblent pas être au rendez-vous. En vue d'y voir plus clair, l'Association des experts-comptables à invité J. Hamri, Directeur de l'Office des changes afin de débattre des enjeux de la réglementation dans un contexte marqué par une mondialisation qui avance à pas de géant, et par son corollaire le démantèlement douanier. Le Directeur de l'Office des changes est aussi appelé à répondre aux opérateurs sur la question suivante : quelle politique de change faut-il désormais mettre en place ? Conscient du rôle de l'Office des changes dans l'attraction des investissements et l'augmentation du volume des exportations, J. Hamri a tenu à rappeler la mission de l'Office, ses chantiers ainsi que les règles qui demeurent suspendues dans l'attente d'une libéralisation totale. «Nous sommes très conscients des difficultés qui persistent et de notre rôle, mais il faut savoir que l'Office adopte une politique de libéralisation progressive», annonce-t-il. La perception des opérateurs de l'Office est négative. Ils sont nombreux à prétendre que l'Office dispose de pouvoirs très étendus, qu'il utilise de manière arbitraire, d'une réglementation très complexe voire incompressible et même qu'il s'agit d'un office qui sanctionne, mais qui n'accompagne pas les opérateurs. À noter que l'OC traduit la politique de change en réglementation (circulaires, instructions…) et veille à son application à travers sa mission de contrôle. Mais les responsables sont tout de même conscients qu'ils ont encore du pain sur la planche. Un contrôle de change assumé D'après J. Hamri, une convertibilité totale du Dirham n'est pas à l'ordre du jour. Il rappelle à ce titre qu'elle signifie la levée des restrictions sur les exportations de capitaux et l'abandon de l'obligation de rapatriement des recettes des exportations de biens et services (une des principales sources de devises). Et donc face à un affaiblissement des réserves de change de 200 Mds de DH en 2007 à 192 Mds de DH à fin septembre 2009, il est illusoire de penser à une convertibilité totale du Dirham. Cette dernière suppose la mise en place d'un dispositif approprié permettant de rémunérer l'adéquation de l'épargne nationale, de renforcer l'attractivité de l'investissement et de consolider les avoirs extérieurs. Ce qui n'est pas encore le cas. «C'est ce qui explique que le Maroc a choisi d'aller vers une libéralisation de change progressive, pragmatique et irréversible», explique J. Hamri. Il s'empresse d'ajouter : «Ce dosage judicieux entre la libéralisation progressive et un contrôle de change soucieux de préserver les équilibres extérieurs, a permis la stabilité de l'économie marocaine et sa résistance face aux aléas de la crise internationale». Mais cela n'empêche pas pour autant que depuis décembre 2010, plusieurs mesures ont été prises par l'Office des changes en vue d'accompagner les investisseurs, et plusieurs chantiers ont été ouverts. Les nouveaux chantiers Parmi les nouveaux chantiers de l'Office des changes, on peut citer la refonte du dispositif législatif relatif à la répression des infractions et à la redéfinition de ses fonctions. «Les textes qui régissent le fonctionnement de l'Office des changes datent de 1939-1949. Il s'agit de textes qui n'ont jamais été modifiés». «Ajoutons à cela le fait que le cadre législatif donne un pouvoir exorbitant à l'Office, ce qui est en soi dangereux», s'empresse d'ajouter J. Hamri. Au niveau de la réglementation, on assiste à un éparpillement de textes et à une redondance des dispositions difficilement accessibles aux opérateurs. Pis encore, les termes employés demeurent peu adaptés aux normes internationales. Dans les semaines qui viennent, il sera mis à la disposition des opérateurs un document unique, simplifié et plus lisible. «On n'a pas modifié le contenu, mais on a assuré la lisibilité des textes», explique-t-il. L'autre chantier, et qui n'est pas des moindres, est la mise en place d'un système d'information au cœur du contrôle. Le niveau des échanges de données entre la banque, les opérateurs et l'Office des changes ne permettait pas un contrôle ciblé à même d'identifier les zones à risques. Il s'agit, la plupart du temps d'un contrôle tatillon, lourd et inefficace sans réel impact sur les réserves de change. Il se traduit parfois par la pénalisation des entreprises exportatrices pour le rapatriement parfois de montants insignifiants. Aussi, l'Office a créé une cellule qui va collaborer avec les banques en matière de rédaction de textes, de formation des formateurs et de contrôle. Le but étant de faire de l'Office des changes un instrument facilitateur pour les opérateurs. La dotation pour voyage des PME est passée de 60.000 DH à 10% du chiffre d'affaires dans la limite de 200.000 DH/ an. En ce qui concerne les personnes physiques, des mesures sont en cours de concrétisation. La circulaire 1606 mentionne que les Marocains recrutés par une entité étrangère et détachés au Maroc peuvent désormais transférer leurs économies au même titre que les personnes étrangères résidentes. Aussi, les expatriés pourraient transférer librement les charges sociales dues aux caisses. Une chose est cependant sûre : la libéralisation totale du régime de change n'est pas pour sitôt. Encore faut-il que les agrégats macro-économiques fassent preuve de plus de robustesse. ■ Soubha Es-siari Réglementation de change : un levier important… mais non suffisant La promotion de l'exportation n'est pas tributaire uniquement de la mise en place d'un cadre réglementaire favorable en matière de réglementation des changes, mais dépend également dans une large mesure du dynamisme de l'entreprise exportatrice elle-même. Celle-ci doit faire les efforts nécessaires pour se doter des compétences requises et adopter des méthodes de gestion pour mieux s'adapter au contexte de la mondialisation et saisir les opportunités qui s'offrent à elle. Elle dispose sur le plan change d'un cadre propice pour réussir le pilotage de son activité dans un marché de plus en plus globalisé : convertibilité du Dirham pour les opérations courantes et même pour nombre d'opérations en capital, possibilité de disposer d'une trésorerie en devises; libre accès au marché international pour la mobilisation de financements extérieurs et existence d'un assortiment d'instruments de couverture contre les risques financiers liés aux transactions commerciales et financières internationales.