Le Maroc a accueilli la semaine dernière deux délégations américaines. La première dirigée par le chef de l'équipe commerciale américaine chargée de la région Afrique (USDA Africa Trade Team) s'intéressait au volet agricole, tandis que la seconde, dirigé M. Robert Mallet, Secrétaire-adjoint au Département américain du Commerce, vient d'effectuer une visite de deux jours au Maroc, à la tête d'une importante délégation. Arrivé jeudi dernier à Rabat, M. Mallet a été reçu par le Premier ministre, M. Abderrahmane Youssoufi, et le ministre de l'Intérieur M. Midaoui. Ensuite, M. Mallet a participé au forum suivi d'un déjeuner de travail qui l'a réuni avec les membres de la Confédération Générale des Entreprises du Maroc (CGEM). Les PDG de l'ONE et de la RAM, MM. Benhima et Hassad, ont été également rencontrés par le visiteur américain, qui a visité aussi certaines filiales au Maroc de grandes entreprises américaines. La visite de M. Mallet vise également à soutenir les entreprises américaines soumissionnaires à des appels d'offres. C'est ainsi que General Electric bénéficie de ce soutien dans le cadre du marché de la Centrale électrique de Tahaddart, de même que la compagnie Boeing intéressée par le renouvellement et le renforcement de la flotte de Royal Air Maroc. Dans la recherche de nouvelles opportunités d'investissement, les Américains s'intéressent beaucoup à la privatisation de Maroc Telecom et de la RAM. Les observateurs expliquent ce regain d'intérêt par une sorte de prise de conscience américaine de l'importance que revêt le marché marocain. Un simple regard sur le bilan des échanges commerciaux entre les Etats-Unis, d'une part, et le Maroc et l'Algérie, de l'autre, illustre clairement cette tendance. En effet, les exportations américaines vers le Maroc ont atteint en 1998 quelque 552,3 millions de dollars contre 650,2 millions de dollars pour l'Algérie à la même période. Les importations américaines du Maroc ont représenté entre janvier et octobre 1999 la somme de 307,1 millions de dollars alors que celles en provenance d'Algérie ont atteint pour la même période quelque 1.587,9 millions de dollars. Il est vrai que le volume des importations américaines d'Algérie sont surtout gonflées par le pétrole qui en constitue l'essentiel. Eu égard aux potentialités marocaines, force est de reconnaître que la pénétration du marché américain par les produits marocains reste très timide. D'un autre côté, l'on remarque la présence américaine dans la soumission à l'appel d'offres de la 2ème licence GSM, via Motorola GTI, etc. Mais le fait que le marché fut remporté par les opérateurs espagnols et portugais grâce au consortium Méditelecom prouve que les Américains ont mal apprécié la valeur de la 2ème licence, d'autant que les adjudicataires ont été suivis de près par le consortium où figurait l'opérateur français France Telecom. Manque d'intérêt ou méconnaissance du marché marocain? On ne saurait trop dire, mais il est évident que les Américains eux-mêmes tentent dorénavant de rectifier le tir en vue de mieux se positionner sur le marché marocain. Les privatisations à venir ne manquent pas de charme : RAM, IAM, BCP, etc. D'autres opportunités d'investissements existent dans d'autres secteurs et n'attendent qu'à être mises à profit. Le secteur touristique offre dans ce sens un champ quasi vierge avec un déficit criard en matière d'infrastructures d'accueil. Les entretiens que M. Mallet a eus avec MM. Fathallah Sijilmassi, directeur des Affaires économiques au Ministère des Affaires étrangères et de la Coopération, et Hassan Bernoussi, directeur de l'Office des Investissements extérieurs, ont permis d'identifier des potentialités d'investissement innombrables. De même, la rencontre avec M. Alami Tazi, ministre de l'Industrie, du Commerce et de l'Artisanat, ouvre également de réelles perspectives quant à l'accroissement des échanges commerciaux où des obstacles existent encore, notamment dans le domaine du transport et des barrières douanières plus que contraignantes. À l'heure où le Maroc refuse de reconduire l'Accord de pêche avec l'Union Européenne et que certains pays de l'UE, notamment l'Espagne, tentent de faire obstruction à l'entrée des produits agricoles marocains en Europe, il n'est que normal, voire indispensable, de diversifier les partenaires et donner la priorité aux marchés déjà acquis à des pratiques libérales et poreux au vent de la mondialisation. À cet égard, les Etats-Unis présentent un intérêt certain pour le Maroc. D'autre part, l'Initiative Eizenstat dont l'objectif est d'aider certains pays de la région du Maghreb, notamment le Maroc, l'Algérie et la Tunisie dans le cadre d'un partenariat avec les Etats-Unis, met en uvre un financement destiné aux PME/PMI de la région. Dans ce cadre, la réunion de travail tenue à Casablanca le 28 janvier 2000 par le Secrétaire-adjoint au Département américain du Commerce et les membres de la CGEM a aussi permis de dégager des pistes de collaboration profitable aux deux parties. La visite de M. Mallet, guidée par M. Edward Gabriel, ambassadeur américain à Rabat, aura donné une nouvelle perception des relations d'affaires entre le Maroc et les Etats-Unis. La partie américaine aura ainsi découvert les multiples et intéressantes opportunités dont regorge le marché marocain, et le Maroc aura cerné de manière plus précise les canditionnalités américaines qui se déclinent en termes d'Etat de droit, transparence en matière de cession des marchés et égalité de chances pour les investisseurs. Ce sont là des domaines où le Maroc a déjà initié des réformes encourageantes qu'il suffit d'approfondir et de consolider. À noter que les échanges bilatéraux maroco-américains courant 1999 ont atteint plus d'un milliard de dollars, représentant une augmentation de 17% par rapport à 1998. C'est déjà une étape importante vers un partenariat fructueux.