La confirmation de la notation du Maroc par l'agence internationale «Fitch Ratings» intervient dans un contexte très particulier pour les pays arabes. La crise a remis en cause la crédibilité des agences de notation, mais la résilience du Maroc face à la crise est un signal que le Royaume mérite sa note. L'Agence internationale de notation «Fitch Ratings» a confirmé récemment la note du Maroc, avec une perspective «stable», affirmant que le Royaume continue de bénéficier de solides fondamentaux en comparaison avec les autres pays de la région. Cette notation est intervenue dans un contexte empreint d'inquiétudes et d'hésitations eu égard à ce qui se passe dans certains pays du monde arabe. Dans ce contexte, Fitch Ratings a mis en exergue la stabilité sociale et politique dont jouit le Royaume, soulignant ainsi qu'il a réussi, au cours des dix dernières années, à réduire la pauvreté et à lutter contre le chômage. «L'agence de notation, qui a maintenu la note (BBB-) pour la dette en devises du Royaume, s'attend à ce que les autorités marocaines procèdent à l'augmentation des dépenses sociales et des charges de compensation afin de lutter contre les inégalités sociales», apprend-on dans un communiqué publié par la MAP. Aussi, la Directrice du département des fonds souverains de Fitch Ratings avait récemment souligné que le Maroc peut se prévaloir d'un taux d'inflation inférieur à ceux des autres pays d'Afrique du Nord, faisant observer qu'une solide demande interne a aidé le Royaume à se prémunir de la crise financière internationale. Cette confirmation de la notation ne peut que nous réconforter en tant que pays émergent aspirant à mieux se positionner dans l'échiquier international. Mais cela ne nous empêche pas de nous poser la question : jusqu'à quel degré pouvons-nous continuer à nous fier aux notes des agences de rating ? La crise asiatique de 1997-98, le scandale d'Enron en 2001 et plus récemment la débâcle des subprimes de 2007-2008, ont révélé l'influence de la notation financière sur les marchés de capitaux tout en démontrant les limites. A rappeler que jusqu'aux années 1970, les revenus des agences étaient tirés essentiellement de la vente de leurs publications aux investisseurs. La plupart des notations étaient non sollicitées, voire attribuées sans le consentement des émetteurs. Le début des années 70 constitue un tournant majeur pour les agences de notation qui vont désormais facturer leurs services aux émetteurs de dette obligataire. Certains, qui n'étaient pas notés, ont trouvé des difficultés pour émettre sur le marché des obligations. En conséquence, elles étaient obligées de solliciter les agences afin d'obtenir un rating contre une rémunération. Et, justement, parmi les critiques adressées aux agences de rating, c'est que leurs revenus proviennent essentiellement des émetteurs de dettes qu'elles notent. Ce qui remet en cause leur objectivité. Une autre critique a trait à la forte concentration de la notation dominée par trois agences qui s'accaparent près de 94% du chiffre mondial de l'industrie de la notation. Interrogée à cet égard sur la crédibilité de cette notation, Djamila Chekrouni, professeur universitaire, a précisé à ce sujet que dans un tel contexte, le Maroc doit percevoir comme une bonne nouvelle le maintien de la dette en devises par Fitch Ratings. D'après elle, cette confirmation est une reconnaissance des retombées positives d'un certain nombre de réformes engagées par le Maroc, s'agissant notamment de la rationalisation de la gestion budgétaire. Et pour ceux qui craignent un effet de contagion dans l'ensemble des pays arabes, cette confirmation ne peut que les rassurer. Le Maroc, qui se veut être le bon élève soucieux de fluidifier ses accords de libre-échange et son ouverture sur le système libéral international, est très sensible à l'opinion que l'étranger se forge sur son image, qu'il s'agisse de droits de l'homme, du système judiciaire, du risque politique, de la stabilité… Pour ce faire, et en dehors de la notation, le Maroc doit persévérer en opérant des réformes plus ou moins profondes, plus ou moins apparentes, plus ou moins crédibles pour essayer de neutraliser les argumentaires qui essayent, de bonne foi ou pour des raisons inavouées, de porter atteinte à son positionnement international et à son potentiel compétitif.