* Forte croissance du nombre de cartes, du nombre de GAB, des TPE...Au tableau de bord du marché de la monétique, tous les indicateurs sont au vert. Pourtant, la pratique du paiement par carte reste en deçà des attentes des professionnels du secteur. * Tour d'horizon avec Rachida Benabdallah, Directeur général du Centre Monétique Interbancaire (CMI). Finances News Hebdo : Comment qualifiez-vous le développement du secteur de la monétique au Maroc ? Rachida Benabdallah : La monétique marocaine est à un tournant très important dans son développement. Tous les indicateurs sont au vert : croissance soutenue du nombre de cartes marocaines en circulation, du nombre de guichets automatiques bancaires (GAB), des terminaux de paiements électroniques (TPE), des opérations de retraits ou de paiements effectuées par les porteurs de cartes bancaires marocaines ou étrangères. Les chiffres définitifs 2006 ne sont pas encore disponibles, car ils sont consolidés suite à la déclaration des banques, mais on s'attend à un encours de cartes en progression de plus de 25% par rapport à fin 2005, un élargissement du réseau de GAB de 30%, plus de 2.000 TPE supplémentaires installés en 2006, une augmentation des opérations monétiques, tous types confondus, de 27% pour les cartes marocaines et de 16% pour les cartes étrangères. F. N. H. : Quel est le rôle du CMI dans le développement de cette industrie et surtout dans la vulgarisation du paiement par carte ? R.B : Le rôle du CMI est bien entendu le développement de l'usage de la carte bancaire au Maroc pour les deux aspects : le paiement et le retrait. En ce qui concerne le paiement, la plate-forme de traitement du CMI et les TPE permettent l'acceptation des cartes de paiement Visa, MasterCard, Diner's, JCB et d'un certain nombre de cartes de paiement privatives marocaines en plus d'Amex. Le CMI est également le switch national pour l'interopérabilité nationale des retraits GAB puisque les retraits interbancaires sont réalisés via le centre de traitement CMI. Le CMI est enfin prestataire de services pour les banques qui utilisent les passerelles internationales du CMI vers les réseaux Visa et MasterCard pour traiter notamment les opérations des porteurs marocains à l'étranger et les opérations des porteurs étrangers au Maroc sur les GAB des banques. Les efforts du CMI visent donc globalement le développement de cette industrie, bien que le CMI axe actuellement ses efforts davantage au niveau du développement de l'usage des cartes bancaires marocaines en tant que moyen de paiement. F. N. H. : Constat : l'utilisation de la carte bancaire pour le règlement des achats ne représente que 7% de l'ensemble des opérations monétiques. Quel est votre commentaire ? R.B : Ce constat est vrai et les efforts du CMI et des banques vont dans le sens d'améliorer ce ratio. Rappelons que Bank Al-Maghrib, le GPBM et le CMI ont organisé il y a un an une campagne nationale de sensibilisation pour une meilleure utilisation de la carte bancaire. L'objectif de cette campagne vise juste à sensibiliser les commerçants, les porteurs de cartes et autres acteurs sur les avantages du paiement par cartes bancaires et instituer la carte bancaire en tant que moyen de paiement alternatif efficace par rapport au cash et au chèque. Comme nous l'avons signalé, le CMI encourage particulièrement l'usage des cartes bancaires marocaines auprès des commerçants. Cette activité a représenté en 2006 un volume de 2,6 milliards de DH contre 4,1 milliards de DH pour les cartes étrangères. L'usage des cartes marocaines est fortement concentré auprès des supermarchés à hauteur de 45% et des restaurants, prêt-à-porter et stations -service à hauteur de 10% pour chacun de ces trois secteurs. Notre action actuelle et future vise à encourager notamment les secteurs pétrolier (stations) et médical (pharmacies, laboratoires d'analyses, cliniques, médecins) pour une acceptation plus large des cartes de paiement. Nous visons l'amélioration de la part des cartes marocaines dans l'activité Paiement qui est aujourd'hui de 38% contre 62% pour les cartes étrangères. F. N. H. : Que paient les commerçants pour disposer d'un TPE ? R.B : Le TPE est mis gratuitement à la disposition des commerçants ainsi d'ailleurs que les consommables ; les prestations du CMI sont rémunérées par une commission prélevée sur les montants des paiements effectués. Le taux de commission est convenu entre le CMI et le commerçant au moment de l'établissement du contrat d'adhésion aux systèmes de paiement, et ce taux est fonction de l'activité du commerce et du volume attendu. F. N. H. : Et la fraude dans tout cela ? R.B : L'un des objectifs assignés au CMI est la lutte contre la fraude par cartes bancaires, à savoir le développement de la monétique dans un environnement sécurisé. La fraude est mesurée par le ratio des transactions frauduleuses par rapport à l'activité totale. En 2004, ce ratio était de l'ordre de 0,40% et positionnait le Maroc en tant que détenteur du plus haut taux de fraude sur les cartes étrangères dans la région Afrique/Moyen Orient/Europe Centrale et de l'Est. Le démarrage du CMI en tant que plate-forme unique de traitement des transactions de paiement, conjugué à la mise en place de solutions techniques innovantes, et la formation d'une équipe dédiée à la prévention de la fraude et une excellente coopération entre le CMI, la police et la gendarmerie ont permis de réduire le taux de fraude à 0,05% actuellement, le taux le plus bas de la région, soit un taux inférieur au taux moyen mondial. Le passage à la norme EMV (migration de la carte à piste magnétique à la carte à puce) avec la sécurisation de la transaction de paiement par la saisie d'un code confidentiel sur le TPE est aussi un élément déterminant dans la lutte contre la fraude par cartes bancaires. Au Maroc, plus de 90% du parc TPE est conforme à la norme EMV.