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Entretien avec Mohamadi El Yacoubi sur les enjeux de la sortie du Maroc de la liste grise
Publié dans EcoActu le 24 - 02 - 2021


Interviewé par Soubha Es-Siari |
Quitter la liste grise est tout sauf une mince affaire pour le Royaume. Pour y parvenir le Maroc a dû procéder à une mise à niveau fiscale dénotant sa volonté de se doter d'un système fiscal national empreint des principes universels de bonne gouvernance fiscale. Mohamadi Rachdi El Yacoubi, Président du Cercle des Fiscalistes du Maroc (CFM) nous éclaire sur les normes fiscales internationales sur lesquelles le Maroc s'est aligné et qui lui ont prévalu d'être retiré de la liste grise de l'UE (liste des juridictions non coopératives à des fins fiscales).
EcoActu : Comment le Maroc a pu réaliser un compromis entre l'intérêt économique et les intérêts escomptés de la sortie de la liste grise ?
Mohamadi R. El Yacoubi : Notre pays a engagé depuis 2018 des réformes en ligne avec les conditions de l'UE et les standards internationaux. Cela a bien commencé avant même les troisièmes assises nationales sur la fiscalité organisées les 3 et 4 mai 2019 à Rabat. Ces assises ont amorcé une réflexion profonde sur le devenir du modèle de développement national avec la prise en compte du contexte international marqué par le durcissement des règles de conformité fiscale.
Le compromis réalisé par le Royaume reste salutaire eu égard à notre faible pouvoir de négociation. Dans la même lignée, nous pouvons considérer que cette mise à niveau fiscale dénote de notre volonté de concevoir un nouveau système fiscal national empreint des principes universels de bonne gouvernance fiscale et tant mieux.
Quelles sont les normes fiscales ou internationales sur lesquelles le Maroc s'est aligné et qui lui ont prévalu la sortie de la liste grise ?
Il s'agit de mesures précises luttant contre l'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices. Développé dans le cadre d'un projet mené par l'OCDE et le G20, 15 actions ont été mises à la disposition des gouvernements pour les équiper d'instruments nationaux et internationaux pour lutter contre l'évasion fiscale en s'assurant que les profits soient taxés à l'endroit même où ceux-ci sont générés et où a lieu la création de valeur.
Le dispositif dont on parle ici est « costaud ». Pour être exhaustif, il s'agit de relever les défis fiscaux posés par l'économie numérique, de neutraliser les effets des dispositifs hybrides et de concevoir des règles efficaces concernant les sociétés étrangères.
Par ailleurs, ces normes internationales nous poussent à limiter l'érosion de la base d'imposition faisant intervenir les déductions d'intérêts et autres frais financiers d'une part, et lutter plus efficacement contre les pratiques fiscales dommageables, en prenant en compte la transparence d'autre part. Les exigences du BEPS vont jusqu'à empêcher l'octroi aussi bien des avantages des conventions fiscales lorsqu'il est inapproprié d'accorder ces avantages, que des mesures visant à éviter artificiellement le statut d'établissement stable.
Aussi, cette standardisation vise à aligner les prix de transfert calculés sur la création de valeur et à demander aux pays d'assurer une veille fiscale à cet effet (règles de communication obligatoire d'informations, documentation des prix de transfert, élaboration d'instrument multilatéral pour modifier les conventions fiscales bilatérales).
A ce titre, notons que plusieurs dispositions législatives ont été adoptées par notre pays, touchant plusieurs régimes fiscaux nationaux dans le cadre du processus de réformes entamées depuis la loi de finances pour l'année 2018. Quitter la liste grise a été un parcours de combattant pour le Royaume !
Quelles sont les mesures prises par le Maroc pour pouvoir sortir enfin de la liste grise ? Comment le Maroc pourrait-il mettre à profit une telle décision ?
Depuis juin 2019, date de signature par le Maroc de l'accord historique pour renforcer ses conventions fiscales, les choses se sont accélérées. La convention actée, a permis au Maroc d'intégrer le projet BEPS/OCDE. Ce projet fournit des solutions aux gouvernements pour combler les failles des règles internationales existantes qui permettent aux sociétés de faire « disparaître » leurs bénéfices ou de transférer artificiellement dans des environnements à fiscalité faible ou nulle tandis que ces entreprises y ont peu – voire aucune – activité économique. Cette convention constitue l'instrument phare dans le monde pour mettre à jour les conventions fiscales bilatérales et réduire les opportunités d'évitement fiscal par les entreprises multinationales.
Pour être plus précis, voilà l'arsenal fiscal que le Maroc a presque complétement démantelé. Sur le plan des anciennes incitations fiscales, les entreprises exportatrices de produits ou de services bénéficiaient de l'exonération totale de l'IS pendant les cinq premières années, et d'un taux de 17,50% au-delà de cette période. Celles soumises à l'Impôt sur le Revenu bénéficiaient également de l'exonération totale de cet impôt pendant les cinq premières années et d'un taux réduit de 20% au-delà de cette période.
Par ailleurs, les établissements de crédit, entreprises d'assurances, les sociétés de courtage et les institutions financières implantées à Casablanca Finance City (CFC) bénéficiaient au titre de leur chiffre d'affaires à l'exportation et des plus-values mobilières nettes de source étrangère réalisées de : i)- l'exonération totale de l'Impôt sur les sociétés pendant une période de cinq exercices consécutifs, à compter du premier exercice d'octroi du statut précité et l'application d'un taux réduit de 8,75 % au-delà de cette période et ii)- l'application du taux de 10% pour les sièges régionaux ou internationaux et des bureaux de représentation des sociétés non résidentes ayant le statut de Casablanca Finance City.
D'autre part, les entreprises qui exerçaient leurs activités dans les zones franches d'exportation bénéficiaient de l'exonération totale de l'IS durant les cinq premiers exercices consécutifs à compter de la date du début de leur exploitation, et de l'application de taux spécifique fixé à 8,75% pour les vingt exercices consécutifs suivants.
Les réformes distillées dans les quatre dernières lois de finances ont presque aboli tout ce dispositif incitatif. Ceci a réduit comme peau de chagrin les avantages fiscaux qui étaient fréquemment mis en avant par le Maroc pour attirer les investissements directs étrangers (I.D.E).
Pour votre deuxième sous question : comment le Maroc pourrait-il mettre à profit une telle décision ? : Il y a un proverbe qui dit « A quelque chose malheur est bon », ce qui signifie que le malheur est bien dans certaines situations. Dans la même veine, je conseille, d'ores et déjà, à notre gouvernement de se faire accompagner par un cabinet spécialisé en communication, qui lui confectionnera les outils adaptés à une « publicité » ciblée autour de cette « réalisation ». Les dividendes à en tirer peuvent être très importants.
Quels sont les avantages que le Maroc pourrait tirer de cette décision de l'Union Européenne
Le Maroc tirera profit de cette décision de l'Union Européenne dans la mesure où cette sortie de la liste grise améliorera son image externe. Il s'agit donc d'un nouveau levier pour mieux « séduire » les I.D.E et drainer la coentreprise avec les capitaux internationaux. Néanmoins, ce retrait de la liste grise est-il vraiment un exploit ? : oui et non ! La vraie question est liée à l'évaluation du degré d'érosion de notre marge de manœuvre future en terme d'utilisation du système d'incitation fiscal. Si le Maroc souhaite encourager des activités intensives en main d'œuvre ou mettre en place des actions améliorant la productivité, la compétitivité, l'investissement, la R&D ou autre activités liées à l'économie du savoir (biotechnologies, robotique et intelligence artificielle), peut-il user des incitations fiscales sans risque d'être affiché une autre fois sur la liste grise ?
Rien n'est moins sûr ! Pourquoi l'Irlande, la Grèce, le Portugal usent de ce levier fiscal pour développer leurs économies sans aucun problème de conformité internationale. Pourquoi un pays comme la France offre un pack fiscal qui défie toute concurrence, dédié aux zones de revitalisation rurale (ZRR) ? Des questions qui restent posées !


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