Depuis 2016, la Cour des comptes élabore un rapport sur l'exécution du budget de l'Etat au titre du dernier exercice clos, sur la base des données provisoires disponibles. Elle vient de rendre public le rapport sur l'exécution du budget 2019. Ledit rapport permet d'aider les pouvoirs publics à améliorer la programmation, la prévision et l'exécution budgétaire. Il ne faut pas le confondre avec le rapport accompagnant le projet de loi de règlement. Il a été élaboré sur la base des données provisoires disponibles à la fin du 1er trimestre 2020. Déficit budgétaire maîtrisé Il ressort ainsi que la trajectoire du déficit budgétaire est maîtrisée grâce à des mécanismes de financement innovants. Le déficit budgétaire a été maîtrisé presque au même niveau enregistré une année auparavant. Il s'est établi à 41.672 MDH (y compris les recettes de privatisation) contre 41.658 MDH en 2018. Cette maîtrise s'explique par une amélioration conséquente des recettes ordinaires (+16.832 MDH) ayant permis de couvrir l'augmentation des dépenses globales (+15.536 MDH) et la baisse du solde des comptes spéciaux du Trésor (-1.310 MDH). Le rapport de la Cour des comptes fait également savoir que la maîtrise du niveau du déficit budgétaire résulte d'un classement, parmi les recettes non fiscales, des recettes des opérations de financement dites « innovantes » conclues par l'Etat, avec la CDG et la CMR, pour un montant de 7 Mds de DH. Si on reclasse ce montant en recettes de financement, le niveau du déficit budgétaire de 2019 serait de 48.678 MDH, soit une aggravation de 7.014 MDH (16,8%) par rapport à 2018. Ce qui correspond à un taux de déficit de 4,2% du PIB contre le taux affiché de 3,6%, soit 0,6 pt de PIB de plus. L'encours de la dette du Trésor a continué sa tendance haussière avec une progression de 25.376 MDH (+3,5%) par rapport à 2018, dont 53% sous forme de dette extérieure. En effet, depuis 2009, l'encours de la dette a plus que doublé passant de 345.177 MDH à 747.996 MDH, soit un taux annuel moyen de progression de 8% sur ladite période. Le ratio de la dette s'est, ainsi, établi à 65,4% du PIB, en quasi-stabilité par rapport au niveau atteint en 2018. L'encours des dettes de financement des EEP est, quant-à-lui, passé de 279,2 Mds de DH en 2018 à 284,1 Md de DH en 2019, ce qui représente 24,6% du PIB, alors que la dette garantie a culminé à 160,2 Mds de DH, ce qui représente 13,9% du PIB. Les recettes fiscales en faible progression Les recettes ordinaires du budget général de l'Etat se sont élevées à 249,9 Mds de DH, en progression de 16,8 Mds de DH par rapport à 2018, soit une évolution de 7,2%. Cette progression s'explique principalement par une hausse de 1,3% des recettes fiscales, qui sont passées de 209,1 Mds de DH à 211,9 Mds de DH, et de celle des recettes non fiscales ayant progressé de 14 Mds de DH, soit une hausse de l'ordre de 61,6%. «Cette amélioration des recettes non fiscales est due notamment aux recettes des opérations de financement dites « innovantes » et aux recettes de la privatisation qui ont drainé au Trésor un flux financier de 5,3 Mds de DH», nous apprend le rapport de la Cour des comptes. En ce qui concerne les recettes fiscales, il est à signaler que le surplus enregistré est le plus faible durant les dix dernières années où les recettes fiscales ont crû d'au moins 6 Mds de DH. Pour ce qui est des recettes non fiscales, elles ont été améliorées par des opérations de financement. En effet, 2019 a été marquée par l'inscription de certaines opérations de financement dans les recettes non fiscales. Le Trésor a, en effet, conclu au cours de cette année, trois opérations de cession-bail (lease-back) auprès d'investisseurs institutionnels. Cette nature d'opérations consiste en la cession de biens publics à des investisseurs qui consentent à en laisser l'usage à l'Etat, en contrepartie du versement d'un loyer, tout au long d'un terme convenu. A l'issue de ce terme, l'Etat retrouve la pleine jouissance de ses biens. Deux desdites opérations ont été réalisées avec la Caisse Marocaine des Retraites (CMR), la première a comme biens sous-jacent les Centres Hospitaliers Universitaires (CHU) en contrepartie d'un montant de 4,6 Mds de DH sur une durée de 40 ans, alors que la deuxième se trouve adossée à certains bâtiments administratifs de l'Etat pour une contrepartie financière de 670 MDH portant sur la même durée. La troisième opération a, quant-à-elle, été conclue avec la Caisse de Dépôts et de Gestion (CDG) sur d'autres bâtiments administratifs de l'Etat contre un versement de 1,7 Md de DH sur une durée de 30 ans. Ces recettes prises en charge parmi les recettes non fiscales s'apparentent davantage, au sens des référentiels internationaux des statistiques des finances publiques, à des opérations de financement de type crédit-bail, classées parmi les dettes. Les dépenses globales en hausse Les dépenses globales se sont établies à 293.903 MDH dépassant les recettes ordinaires de 43.927 MDH. Ces dépenses ont augmenté de 15.536 MDH par rapport à 2018, soit une hausse de 5%. Cette augmentation est imputable à la hausse des dépenses ordinaires de 10.725 MDH et des dépenses d'investissement de 4.811 MDH. La hausse des dépenses ordinaires est due à une augmentation des dépenses en autres biens et services pour un montant de 7.089 MDH et des dépenses du personnel pour un montant de 5.294 MDH, alors que dépenses liées à la compensation ont baissé de 1.646 MDH. Concernant les dépenses du personnel, elles se sont établies à 111.526 MDH sous l'effet de l'augmentation générale des salaires décidée dans l'accord tripartie (gouvernement, CGEM et syndicats) consécutif au dialogue social. Or, la masse salariale réellement supportée par le budget de l'Etat, en 2019, est estimée à 149.270 MDH, soit une progression de près de 6% par rapport à 2018, et 12,9% du PIB. Par ailleurs, le niveau d'exécution des dépenses d'investissement reste modeste. En effet, même s'il affiche un taux d'émission et de réalisation respectivement de 86% et 78%, ces dépenses continuent d'être réalisées principalement par le biais des transferts des budgets des ministères et du chapitre des charges communes – investissement vers les comptes spéciaux du Trésor et les EEP. En neutralisant l'impact de ces transferts, les taux d'émission et de réalisation se réduiraient considérablement, passant respectivement à 70% et 63%.