431.876 élèves ont abandonné les cycles de l'enseignement scolaire public en 2018 (la mobilité privé-publique a été prise en compte) sans avoir de certification. Les défis à relever pour remettre en marche le principal ascenseur social du pays à savoir l'enseignement sont nombreux. Réussir cette énième réforme n'est plus un choix mais un impératif eu égard aux effets perceptibles de la défaillance du système sur l'avenir de toute une génération. Les chiffres donnent froid dans le dos. Parmi les indicateurs qui inquiètent, le nombre d'abandons et de décrochage scolaire. Ce fléau continue chaque année de priver des milliers d'enfants d'un droit constitutionnel celui d'une éducation équitable et de qualité. Il ressort du dernier rapport de « L'atlas territorial de l'abandon scolaire », que 431.876 élèves ont abandonné les cycles de l'enseignement scolaire public en 2018 (la mobilité privé-publique a été prise en compte) sans avoir de certification. Cette étude menée par l'Instance nationale d'évaluation du système d'éducation, de formation et de recherche scientifique a permis de faire une analyse globale de l'abandon par niveau d'enseignement mais aussi par région. Les efforts déployés par le gouvernement pour réduire les déperditions dans le système éducatif n'ont pas donné les résultats escomptés. « L'effet des programmes variés d'appui social déployés par les pouvoirs publics reste limité et le problème du ciblage actuel associé à ces dispositifs ne permet pas toujours d'atteindre les groupes les plus à risque d'abandon du moment que ce ciblage se base sur des critères de niveau communal et non individuel », lit-on dans le rapport de l'enquête. Malheureusement, les conséquences de l'abandon sont graves pour ne citer que le risque de sombrer dans la délinquance, la violence et l'analphabétisme. Lire également : NAJAT VALLAUD BELKACEM : « LE RAPPORT PISA N'EST PAS L'ALPHA ET L'OMEGA » L'enquête sur les ménages et l'éducation réalisée par l'INE en 2018 auprès de 3.000 ménages révèle que l'abandon scolaire constitue le deuxième problème le plus grave auquel fait face le système d'éducation au Maroc pour 45% des parents enquêtés. Les parents considèrent même que l'abandon est le premier défi à relever du système d'éducation. Le rapport précise que l'éradication du fléau passe par la mise en place d'une batterie de dispositifs innovants, efficaces et ciblés. Mais pas seulement, il faudra éradiquer les principales raisons de l'abandon notamment l'échec de l'enfant suite à une faiblesse dans la qualité des apprentissages, qualité d'accès aux établissements dans le rural, pauvreté des familles... A noter que Atlas expose, pour la première fois, une cartographie territoriale très fine de l'abandon au Maroc, se déclinant jusqu'au niveau communal. Evolution de l'abandon entre 2014 et 2018 En 5 ans, l'abandon dans le système scolaire public a connu deux tendances. Une baissière en 2016 avec une dégradation significative de 7,1% passant de 508 300 abandons tous cycles confondus en 2015 à 407 674 un an après. Sauf que la tendance s'est inversée à partir de 2017 et s'est poursuivie en 2018 avec une hausse du nombre d'abandons de 7,4% de l'ensemble des élèves des 3 cycles pour atteindre 431 876 élèves. Il ressort que 78% des abandons soit 338 000 élèves ont eu lieu aux cycles primaire et collégial, cycles qui sont censés retenir les enfants en classe au moins jusqu'à l'âge de 15 ans. « Si le nombre d'abandons du primaire a diminué depuis 2015 pour se stabiliser en 2017 et 2018 autour de 126 000 abandons, le nombre d'abandons au collégial continue son augmentation inquiétante pour atteindre un seuil de 212 000 en 2018, dépassant celui de 2015 », révèle l'Atlas. Et contrairement au primaire et au collège, l'abandon au secondaire est plus maîtrisé avec un nombre de 93 000 en 2018, en raison notamment du « filtre » qui s'opère en amont au niveau collégial et qui pousse des milliers d'enfants à abandonner l'école avant d'accéder au lycée. Quant à la répartition territoriale, c'est sans surprise que c'est au niveau rural que le taux d'abandon est le plus élevé notamment au niveau des cycles primaire et collégial. En chiffres, le taux d'abandon enregistré était de 4,8% dans le primaire rural alors qu'il était de 2,2% dans le primaire urbain en 2018. Pis encore, le taux d'abandon en 6ème année primaire dans le milieu rural est parmi les taux les plus élevés dans ce cycle (18,1%) comparativement à ce même taux dans le milieu urbain (5,9%). Dans le secondaire collégial, l'abandon en 2018 a touché 16,8% des élèves dans le rural contre 12,9% dans le milieu urbain. Et dans ce cycle, c'est toujours le niveau terminal (3ème année collégiale) qui est le plus concerné par l'abandon et de manière très prononcée dans le rural (22,7%) contre 17,7% en 3ème année collégiale du milieu urbain. Et comme dans le niveau d'enseignement les filles arrivent à s'accrocher plus que les garçons. En 2018, 11,6% et 8,8% des filles abandonnent sans achever les cycles collégial et qualifiant respectivement alors que les garçons atteignent des taux de 16,6% et 11,9% respectivement.