A l'occasion de la Conférence internationale sur la politique et droit de la concurrence qui s'est tenue les 13 et 14 novembre, Abdellatif Jouahri, wali de BAM a tenu à partager avec l'assistance quelques idées qui l'interpellent en tant que responsable de la régulation du système bancaire. Il commence par la révolution digitale qui transforme de manière progressive mais profonde les processus de production et l'organisation des marchés et des échanges. « La digitalisation des services, l'ubérisation de l'économie, et les multiples risques de la cybercriminalité entre autres, posent des défis d'une complexité sans précédent en matière de régulation », rappelle A. Jouahri. D'après ses propos, la régulation des industries et des services émergents nécessite une approche qui allie la souplesse indispensable, pour permettre leur éclosion et leur développement, à la rigueur nécessaire pour éviter tout dérapage et minimiser les effets néfastes sur les consommateurs, l'activité et la stabilité économique. En parlant des enjeux et des défis de la digitalisation, A. Jouahri donne l'exemple de la crypto-monnaie qui donne du fil à retordre aux autorités nationales et même les institutions internationales à définir une approche appropriée pour appréhender toutes les conséquences qui peuvent en découler. Autre exemple édifiant est le domaine financier qui en sus des implications de la digitalisation, la multiplication des difficultés dans le sillage de la crise financière de 2008 a conduit à un resserrement sans précédent de la régulation bancaire. « Alors que les appels se multipliaient pour la poursuite de ce resserrement, la résurgence des difficultés économiques et l'atonie du crédit bancaire viennent militer plutôt pour l'assouplissement dans l'espoir de redonner vigueur à la demande et à la croissance », précise-t-il. C'est pour dire que les régulateurs sont appelés à jouer aux équilibristes entre le durcissement des règles prudentielles pour la stabilité, primordiale au demeurant, du système bancaire et financier et leur assouplissement pour faciliter davantage le financement et contribuer à la relance de l'économie. De surcroit, le développement de la Fintech et les exigences en matière de lutte contre le changement climatique, ainsi que celles de plus en plus renforcées pour combattre le financement du terrorisme et le blanchiment des capitaux compliquent davantage la mission des régulateurs. Assurer la conformité avec les standards internationaux tels que ceux du GAFI ou encore ceux imposés par certaines grandes économies, tel que la loi américaine FATCA, constitue un véritable défi pour les systèmes financiers des pays émergents et en développement. Une chose est sûre: pour un pays aspirant à l'émergence par une plus grande ouverture et une plus large insertion dans les chaines de valeur mondiales comme le Maroc, cette conformité est une nécessité qui requiert des efforts et des arbitrages souvent difficiles pour les autorités de régulation. Le Conseil de la concurrence, de par sa mission transversale, joue un rôle central dans ce sens et contribue à la consolidation de l'Etat de droit. Il travaille de concert avec les régulateurs sectoriels tels que la Banque centrale à laquelle, il est lié par une convention de coopération depuis quelques années déjà et que nous sommes en train de mettre à jour compte tenu précisément des évolutions auxquelles nous assistons.