Aujourd'hui, l'arrivée des fintechs, blockchain et autres technologies bouscule les codes de la finance classique. Mais comment exploiter de façon optimale ces outils technologiques pour en tirer un avantage concurrentiel? La réflexion a été entamée lors de la la 5e édition du Meeting sur l'information financière, organisé vendredi dernier par Maroclear, la Bourse de Casablanca et Finances News Hebdo. «Le Maroc dispose d'assez de ressources pour consommer mais aussi pour produire de la technologie », déclare Fathia Bennis, PDG de Maroclear, lors de la 5e édition du Meeting sur l'information financière. Cette rencontre, organisée par Maroclear, la Bourse de Casablanca et Finances News Hebdo, discute les enjeux, impacts et défis de la révolution numérique pour le Maroc, mais surtout pour le secteur financier. À ce titre, Nouaman Al Aissami, directeur adjoint à la Direction du Trésor et des finances extérieures, a attesté que le royaume est prêt pour cette mutation et qu'il est même arrivé à un tournant stratégique qu'il faut savoir négocier à l'avance. Le Maroc a jusque-là connu deux vagues de digitalisation. La première concerne l'évolution incrémentale qui vise l'utilisation des nouvelles technologies pour devenir plus performant et rapide. «Nous étions dans une optique d'usage; nous sommes actuellement dans une optique radicale», souligne Al Aissami. Cela fait de cette seconde vague la phase de questionnement des usages actuels afin de «faire autrement». D'ailleurs, le Trésor est désormais familiarisé avec des termes tels que blockchain, fintech, intelligence artificielle, qui «reviennent assez souvent dans les discussions concernant nos réformes puisque nous sommes conscients que ces nouvelles technologies bousculent notre mode de fonctionnement», admet Al Aissami. Des réformes qui s'articulent autour de la stabilité financière, du développement du marché et de l'inclusion financière. La bonne volonté de la part des acteurs du secteur est ainsi avérée, de même que celle des régulateurs. Dans un marché où le total des actifs financiers représente le double du PIB national, l'intégrité et la sécurité du système financier restent une priorité. Les grandes instances qui régissent le marché ont également entamé leur mue à l'instar de l'ACAPS, l'AMMC ou encore Bank Al-Maghrib, qui verra ses pouvoirs se renforcer à travers ses nouveaux statuts, bientôt annoncés. Il faut dire que la Banque centrale s'intéresse particulièrement au monde des fintechs puisque celles-ci devraient stimuler la concurrence sur le marché et contribuer à la réduction des coûts des services financiers. L'introduction de ces services a ainsi mis le défi réglementaire en perspective. La Banque centrale a fait un premier pas en adoptant la nouvelle loi bancaire (Loi 103-12) introduisant deux concepts indispensables pour que la Fintech au Maroc ait un avenir: les établissements et les agents de paiement. Une réglementation adéquate L'autre technologie très attendue sur le marché marocain n'est autre que la blockchain. Appliquée aux marchés financiers, la blockchain permet aux détenteurs de titres de procéder à des échanges instantanément, sans intermédiaire financier. Les objectifs attendus sont une plus grande fl uidité et rapidité dans les transactions, un renforcement de la sécurité, une amélioration de la transparence et une réduction des coûts de transaction. Au-delà de la finance, les applications de la technologie blockchain sont multiples: assurance, immobilier, énergie, santé, télécommunications, transports, vote en ligne ou même climat. Au Maroc, des discussions auraient été entamées entre Maroclear, le Fonds monétaire international et Bank Al-Maghrib afin de se positionner sur cette nouvelle technologie. La Banque centrale devrait ensuite se pencher sur la mise en place d'une réglementation adéquate et assurer la sécurité de la chaîne de valeur. L'AMMC, de son côté, est déjà convaincue que c'est la bonne technologie à adopter, mais elle manque de compétences. Si la réglementation classique semble prendre beaucoup de temps, la réflexion est aujourd'hui dirigée vers les regtechs. Leur vocation est d'aider les entreprises à adapter leurs outils et leurs processus aux règles juridiques et aux juridictions. En effet, partout dans le monde, l'effervescence autour des regtechs est à mettre en parallèle avec celle des fintechs. Loin de constituer une tendance éphémère, les regtechs sont en passe de révolutionner le secteur de la finance en permettant aux banques d'adopter les dernières technologies tout en demeurant en conformité avec les réglementations croissantes. Des solutions technologiques innovantes seront ainsi proposées aux acteurs financiers pour, au-delà du respect à moindre coût de ces réglementations (ou au contraire de l'optimisation des vides réglementaires laissés), améliorer le pilotage des risques et la gestion de l'activité financière. La révolution digitale est donc en marche, comme l'a rappelé Fathia Bennis. Le dépositaire central est d'ailleurs en pleine campagne pour promouvoir la blockchain. Lors de son 5e Forum des dépositaires centraux mondiaux, tenu il y a quelques semaines à Marrakech, le constat était clair: les nouvelles technologies s'imposent à tous. Pour ce faire, une certaine technicité est requise. Seules les start-up innovantes sont capables d'amorcer cette transformation. D'ailleurs, les banques de la place enchaînent les hackatons pour faire émerger ces pépites. Cependant, l'effort reste modeste.