La concentration des levées du Trésor durant les trois premiers mois de l'année 2019 sur les maturités à long terme a induit un accroissement de la durée de vie moyenne de la dette intérieure qui s'est établie à 6 ans et 2 mois à fin mars 2019 contre 6 ans à fin 2018. Au cours des dernières années la dette publique a emprunté un trend haussier qui inquiète la sphère économique et politique. Continuer à emprunter à tour de bras, c'est prendre en otage l'avenir des générations futures. Au moment où les pouvoirs publics rassurent quant à la soutenabilité de la dette publique, les chiffres restent têtus et donnent matière à réflexion. La dette accroit les vulnérabilités Il faut dire que depuis la crise financière qui a secoué le monde en 2008-2009, des mots lourds tels que dette insoutenable, surendettement...surgissent chaque jour dans l'actualité économique. Dans le continent africain, les vulnérabilités associées à la dette publique commencent à atteindre un niveau particulièrement grave. La semaine dernière, une conférence de haut niveau consacrée à l'avenir de la gestion de la dette a été organisée à Dakar (Sénégal). Elle a été organisée à l'occasion du dixième anniversaire du mécanisme de gestion de la dette de la Banque mondiale. La situation de l'endettement des pays en développement se caractérise aujourd'hui par des taux d'intérêt de plus en plus élevés et le risque de voir s'alourdir les charges de remboursement de la dette. Pis encore, les créanciers sont diversifiés, ce qui rend la coordination pour les efforts de restructuration de la dette difficiles. La dette interne domine Le Maroc n'est pas en reste et les derniers chiffres publiés par les institutions concernées notamment ceux de la Trésorerie générale du Royaume n'apportent pas du baume au coeur. A fin avril 2019, la dette extérieure a été de 3,9 Mds de DH. Les remboursements du principal du financement extérieur ont atteint 3,7 Mds de DH et les tirages ont été de 7,6 Mds de DH, dont 6,9 Mds de DH auprès de la BIRD et 661 MDH auprès de la BAD. S'élevant à 558,3 Mds de DH, l'encours de la dette intérieure est en hausse de 1,7% par rapport à son niveau à fin décembre 2018. Ceci s'explique par le recours au marché des adjudications pour un montant net de 8,1 Mds de DH. Un trend haussier qui se confirme dans le temps face aux besoins sans cesse croissants d'une économie peu productrice de richesses. La dette totale du Trésor a atteint 728,7 Mds de DH à fin mars en hausse de 7,7 Mds de DH par rapport à fin 2018. Il est à noter que la structure de cette dette reste dominée par sa composante intérieure avec une part de 80,1% alors que la dette extérieure représente 19,9% de l'encours global de la dette. A noter par ailleurs que la concentration des levées du Trésor durant ces trois premiers mois de l'année 2019 sur les maturités à long terme a induit un accroissement de la durée de vie moyenne de la dette intérieure qui s'est établie à 6 ans et 2 mois à fin mars 2019 contre 6 ans à fin 2018. Aujourd'hui suite à la programmation de la loi cadre sur la fiscalité (Assises fiscales 2019) qui ambitionne de corriger les défaillances et les incohérences des dépenses et recettes publiques, nous pouvons espérer une réduction des dépenses publiques voire du déficit budgétaire à travers les mesures phares qui visent un élargissement de l'assiette fiscale. Le Maroc est appelé à réduire la dette du Trésor à moins de 60% du PIB d'ici 2021 et en se désendettant vis-à-vis des intitutions internationales publiques et privées, pour placer les finances publiques sur une trajectoire soutenable et optimiser l'utilisation des appuis budgétaires que ces organismes accordent au Maroc. Ce désendettement permettrait de préserver la souveraineté économique du pays. En voici quelques recommandations du groupe Al Mountada, dans un travail portant sur le diagnostic des finances publiques, pour limiter le poids de la dette publique dans le PIB : * Rendre la dépense publique efficace et renoncer aux dépenses qui ne donnent pas de résultats ou d'effets macroéconomiques. Ceci passerait notamment par la mise en place des structures dédiées à l'évaluation des politiques publiques ; * Produire rapidement des statistiques des finances publiques consolidées, y compris celles de la dette publique des administrations centrales et locales ; * Réguler l'investissement à travers le choix des investissements publics rentables et orienter les investissements des marocains ou des IDE vers les secteurs productifs : agriculture, industrie et énergie. Les chiffres relevés ci-dessus ne prennent pas en considérations la dette des entreprises et établissements publics (EEP). Au moment où certains plaident pour la sommation de la dette du Trésor avec celle des EEP pour avoir un indicateur précis sur l'endettement du pays, d'autres estiment que les chiffres seraient tout simplement erronés. Avant de procéder à une telle opération, il faut d'abord s'assurer que la richesse des entreprises et établissements publics soit intégrée dans le PIB. Lire également : ENCORE DES DETTES POUR FINANCER L'INVESTISSEMENT