Evaluer le poids de la dette publique dans le PIB par la simple somme de la dette publique du Trésor à celle des entreprises et établissements publics s'avère erroné. Au-delà de l'analyse chiffrée, la Cour des comptes est appelée à s'assurer de la performance des dettes contractées par les EEPs. Le taux de la dette publique continue de susciter la discorde entre pouvoirs publics et faiseurs d'opinion. Au moment où les premiers parlent d'un taux oscillant autour de 60%, les autres évoquent un taux de plus de 80%. Il faut dire que dans un environnement très préoccupant, ce taux est surveillé de très près par les analystes toutes catégories confondues qui reprochent aux pouvoirs publics de communiquer plus sur la dette du trésor, faisant fi de celle des établissements et entreprises publics. Procéder à la somme de la dette publique du Trésor à celle des établissements et entreprises publiques pour aboutir à un taux d'endettement de plus de 80% du PIB est qualifié d'erroné par certains experts. Avant de procéder à une telle opération, il faut d'abord s'assurer que la richesse des entreprises et établissements publics soit intégrée dans le PIB. Interpellée sur la question en marge de la conférence relative au PLF 2019, Fouzia Zaâboul, Directrice du Trésor a confirmé que la somme de la dette publique du Trésor à celle des EEPs ne reflète aucunement la réalité. Elle informe qu'aujourd'hui il y a une prise de conscience générale de l'intérêt de la consolidation de la dette et que bientôt il y sera procédé à travers un calcul plus adéquat. Au-delà même du problème du calcul de la dette publique, force est de constater que d'année en année, le déficit s'aggrave et la tendance haussière de l'endettement se poursuit. D'ailleurs, l'objectif aujourd'hui est de ramener le taux de la dette du Trésor par rapport au PIB à 60% à l'horizon 2021. Etablissements et entreprises publics vs Trésor Rapporté au PIB, l'encours de la dette du Trésor s'est établi à 65,1% à fin 2017 contre 64,9% à fin 2016. Ce ratio a atteint 50,7% au titre de la dette intérieure et 14,4% au titre de la dette extérieure contre respectivement 50,8% et 14,1% à fin 2016. Il ressort du PLF 2019 que la maîtrise de l'évolution du taux d'endettement au cours des dernières années a été réalisée dans un contexte très difficile et ce grâce à la politique gouvernementale accordant une importance cruciale au rétablissement des équilibres macroéconomiques. En ce qui concerne l'encours de la dette des établissements et entreprises publics, elle a continué à progresser avec un rythme plus important que celle du Trésor, soit un accroissement de 6,4% par rapport à 2016. A fin 2017, l'analyse de la dette extérieure montre que les EEPs demeurent le premier groupement d'emprunteur du secteur public avec un encours de 178,3 Mds de DH. Près de 81% de l'encours de cette dette est détenu par cinq emprunteurs à savoir l'ONEE (24%), l'OCP (23%), ADM (12%), l'ONCF (12%) et MASEN (10%). La question qui se pose d'emblée : les dettes contractées ont-elles été utilisées à bonne fin ? Dans un contexte marqué par la rareté des ressources financières et la rationalisation de la dépense publique, il faut que la Cour des comptes ne se limite pas uniquement à analyser l'évolution de la dette sur une période donnée, mais de réaliser des missions d'audit des grands projets financés par les bailleurs de fonds. Mieux encore, évaluer dans quel cadre les établissements se sont-ils endettés ? Y a-t-il eu des études de faisabilité auparavant pour s'assurer de la pertinence et de l'objectivité des dettes ? L'introduction des indicateurs de performance serait même souhaitable. Et c'est tout le mal que nous souhaitons à l'équipe de Driss Jettou.