Le budget général de l'Etat entre l'inconstitutionnalité de la parafiscalité et les impératifs de la réalité économique. Dans un souci de résorber le déficit budgétaire et permettre à l'Etat de remplir ses fonctions, les entreprises et établissements publics (EEP) toutes catégories confondues sont sollicités, à l'occasion de chaque Loi de Finances, à passer à la caisse. Le Projet de Loi de Finances 2019 ne déroge pas à la règle. Le montant des recettes ordinaires escomptées au titre de l'exercice 2019 est estimé à 253,42 Mds de DH. Lesdits EEP y contribueront à hauteur de 11,45 Mds de DH. Ces recettes prennent la forme des produits des monopoles, parts de bénéfices ou contributions des établissements publics. En examinant la liste des contributeurs, on note l'existence de plusieurs entités financées en quasi-totalité par des taxes parafiscales. Il est question à titre indicatif de l'Office des changes financé par la « commission de change », de l'Etablissement autonome de contrôle et de coordination des exportations (EACCE) financé par la Taxe d'importation, l'Office national interprofessionnel des céréales et des légumineuses (ONICL) financé par la taxe de commercialisation, le Comité national de la prévention des accidents de la circulation (CNPAC) financé par la taxe dite « contribution des entreprises d'assurances »... [table id=7 /] Si l'Etat fait appel à ces établissements et entreprises publics, c'est parce qu'ils dégagent dans le cadre de leur exécution budgétaire une trésorerie pouvant être qualifiée de pléthorique. Et pour cause, les dépenses budgétaires autorisées de ces établissements sont sans aucun rapport avec les recettes. Ces dernières sont conditionnées par des facteurs exogènes liés à la conjoncture économique. D'ailleurs cette distorsion entre les dépenses budgétaires et les recettes issues de la parafiscalité constitue la critique phare adressée à la parafiscalité. Mais quid de la parafiscalité... La parafiscalité est définie comme étant les prélèvements obligatoires, institués par voie d'autorité et affectés à des organismes distincts de l'Etat ou des collectivités locales, dans un but économique ou social. D'après la définition ci-dessus, nous sommes dans la légitimité de nous poser la question si l'Etat à travers la contribution des EEP financée par la parafiscalité n'est pas en situation de financer en partie son budget indirectement par une taxe parafiscale. Dans l'affirmative, l'Etat recourt donc à un mode d'imposition qui prône l'affectation qui est prohibé par les dispositions de l'article 8 de la Loi Organique des Finances. Ce dernier stipule : « Il est fait des recettes du montant intégral des produits sans contraction entre les recettes et les dépenses, l'ensemble des recettes assurant l'exécution de l'ensemble des dépenses ». Autrement dit, toutes les dépenses et recettes sont imputées indifféremment au Budget général. Agissant de la sorte, l'Etat transforme la parafiscalité d'un prélèvement affecté à un prélèvement non affecté et prive ainsi la parafiscalité de son caractère d'affectation reconnu par le droit fiscal. Cette recette comptabilisée pour le compte de la Direction du Trésor et des Finances Extérieures DTFE et la Direction des Entreprises et Etablissements Publics et de la Privatisation DEPP ne laisse pas indifférente une autre direction du Ministère de l'Economie et des Finances, en l'occurrence la Direction générale des impôts. En effet, cette contribution au budget général de l'Etat est interprétée comme une distribution occulte des dividendes, soumise à la fiscalité des capitaux. Seulement comment imaginer des distributions de dividendes sans l'aval des conseils d'administration desdits établissements qui croulent, dans la majorité des cas, sous des résultats financiers déficitaires. Et comme nous sommes égaux devant l'impôt, la mesure associée à la contribution n'épargne même pas les petits établissements publics qui exercent dans le Maroc profond et ont besoin de toutes leurs ressources pour conduire des politiques nationales et régionales comme celui de la Centrale d'achat et de développement de la région minière de Tafilalet et de Figuig (CADETAF). Cette dernière est invitée à débloquer 5 MDH au profit de l'Etat. Au moment où tous les courants sont unanimes sur l'inconstitutionnalité de la parafiscalité, au Maroc on continue à en faire une recette qui coule de source. LIRE EGLAMENT : CNPAC : UNE DES VICTIMES DE LA CONVOITISE DE L'ETAT