Malgré leur caractère commercial, les opérations d'assurances à prime fixe échappent à la taxe sur la valeur ajoutée et sont soumises à la taxe sur les contrats d'assurances (TASS). Les taux de la TASS sont actuellement de 7%, 10% et 14% selon les types de contrats. Le PLF 2019 intègre la TASS dans le Code général des impôts. Analyse. A quelques mois des prochaines Assises sur la fiscalité prévues en avril 2019, plusieurs thématiques seront débattues dans un souci de transparence et d'équité du système fiscal au Maroc. A titre d'exemple, si l'on prend le cas du secteur des assurances, on remarque que valeur aujourd'hui ledit secteur est soumis à la taxe sur les contrats d'assurances (TASS) et échappe à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). En effet, en dépit de leur caractère commercial, les opérations d'assurances à prime fixe sont soumises à la TASS. Pourtant, l'article 87 du code général des impôts est on ne peut plus clair sur le sujet, la TVA étant une taxe sur le chiffre d'affaires qui s'applique aux opérations de nature commerciale. Seulement l'article 91 du Code général des impôts exonère sans droit à déduction les prestations réalisées par les sociétés ou compagnies d'assurances. Les questions qui se posent d'emblée : Selon quelle logique le législateur n'applique-t-il pas jusqu'à aujourd'hui la TVA au secteur des assurances ? Pourquoi, entre temps, n'a-t-il pas changé d'avis ? Sachant que contrairement à la TVA, la taxe sur les contrats d'assurances n'est pas récupérable et du coup, renchérit le coût de l'assurance et ce à l'instar de la TIC. Interrogé sur la question, Khalid Zazou, Directeur de la législation et de la coopération internationale à la Direction générale des impôts a tenu à rappeler dans un premier temps que : « La taxe sur les contrats d'assurances remonte à presque une soixantaine d'années. En effet, cette taxe a toujours été gérée par le décret n° 2.58. 1151 du 12 joumada II 1378 (24 décembre 1958) au même titre que le droit d'enregistrement et le droit de timbre. Ces derniers ont été insérés dans le CGI par contre la taxe sur les contrats d'assurances vient d'être intégrée dans le projet de la Loi de Finances 2019. Le dispositif est inséré dans le CGI à droit constant dans le but d'achever le projet de codification des textes fiscaux. Ainsi, les règles régissant la taxe sur les contrats d'assurances sont restées inchangées ». Pour le Directeur de la législation, la reconversion de la taxe sur les contrats d'assurances en TVA est un véritable sujet, qui mérite réflexion parce qu'il s'agit d'abord d'une question d'impact fiscal. Et pour cause l'assujettissement des opérations d'assurance à la TVA revient en principe à les soumettre à la TVA sur les services dont les taux varient entre 10%, 14% et 20%. Il s'avère donc nécessaire d'examiner au préalable de fond en comble toutes les caractéristiques du contrat d'assurance, faire des simulations, évaluer l'impact de la taxe relative aux contrats d'assurances sur les coûts des opérations voire sur les recettes de l'Etat. Les recettes de la taxe sur les contrats d'assurances se sont établies à 3 Mds de DH en 2017 contre 2,6 Mds de DH en 2016 et 2,5 Mds de DH en 2015. Ces recettes reviennent au Trésor de l'Etat à hauteur de 40%, le reste soit 60% est affecté à d'autres fonds et caisses. «Le problème de la non conversion de la Taxe sur les contrats d'assurances en TVA ne relève pas uniquement de la responsabilité des pouvoirs publics mais également des professionnels du secteur. Ces derniers doivent être outillés d'études pour mieux débattre avec les autorités compétentes de l'enjeu de la conversion », a précisé le Directeur de la législation. A ce titre, une réunion serait nécessaire entre différents intervenants avant les prochaines Assises fiscales pour bien cerner le sujet et voir si cela ne risque pas de se faire au détriment du consommateur final. Il est donc important de trouver le point d'équilibre. Le manque à gagner... A priori la conversion de la taxe spéciale sur les assurances en taxe sur la valeur ajoutée pourrait se traduire positivement sur l'économie nationale. En effet, la récupération de la TVA qui grèverait les primes permettra de réduire le coût des couvertures. Par ricochet, cette réduction pourrait encourager les assurés à augmenter les capitaux assurés et optimiser leur programme d'assurance. Ce qui, sans aucun doute, entraînerait une amélioration sensible des primes, aliment des compagnies d'assurance, une hausse des engagements et par voie de conséquence celle des placements. L'intégration du secteur dans le champ d'application permettra aux compagnies de réduire le coût des frais de gestion et des investissements. Cette amélioration sera traduite sur le montant des primes. Cette optimisation de la tarification créera une demande conséquente. [table id=6 /] C'est dire que la conversion épousera une amélioration des résultats des compagnies d'assurance et du coup la recette fiscale. Le coût d'opportunité occasionné par la conversion serait donc résorbé par l'amélioration des recettes. L'hésitation à intégrer la TVA, devant impacter le consommateur final, se justifie par la volonté des instances compétentes à ne pas affecter le pouvoir d'achat des Marocains. En effet, il ne faut pas perdre de vue que le secteur des assurances est prédominé par l'assurance automobile souscrite par des personnes physiques. L' amélioration du secteur consécutivement à l'introduction de la TVA et l'instauration d'une concurrence réelle dans le marché se traduiront par une prime nette revue à la baisse. En dépit de la volonté de l'Administration à se pencher sur le dossier et du gain éventuel de la conversion, un professionnel du secteur des assurances laisse comprendre : « Le remplacement de la taxe sur les contrats d'assurances par la TVA n'est pas d'actualité et qu'effectivement elle nécessite beaucoup d'études et analyses avant d'y opérer. Il s'agit d'une ancienne philosophie qui mérite aujourd'hui d'évoluer vers une TVA ». Notre source est consciente que le fait de ne pas récupérer la taxe comme d'autres secteurs est pénalisant pour la profession. « Nous avons déjà milité par le passé pour sa conversion en TVA. Ce qui nous permettrait de récupérer sur nos investissements et améliorer notre rentabilité. Le sujet ne s'est pas posé à l'occasion de l'élaboration de la LF 2019 et ne figure pas actuellement dans nos discussions avec la Direction générale des impôts », tient-elle à préciser. Il semble que les professionnels du secteur, ne disposant pas d'études d'impact, ne sont pas prêts à aborder la problématique afférente à la TVA durant les prochaines Assises. Nous sommes même tentés de dire que les assureurs sont confortés dans leur situation parce que dans d'autres pays (Belgique, Espagne, France...), il est également appliqué la TASS au lieu de la TVA. Une argutie peu convaincante parce que les réalités socio-économiques sont totalement différentes.