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Exécution du budget 2017 : Ce que la Cour des comptes pointe du doigt
Publié dans EcoActu le 23 - 10 - 2018

La Cour des Comptes dévoile le rapport de l'exécution du Budget de l'Etat devant le parlement. Parmi les défaillances relevées, les communications discordantes du ministère de l'Economie et des Finances particulièrement entre la DTFE et la TGR.
La Cour des comptes rend public son rapport sur l'exécution du Budget de l'Etat au titre de l'année 2017. Ledit rapport vient d'être présenté aujourd'hui mardi 23 octobre 2018 par Driss Jettou, président de la Cour, devant les deux chambres au Parlement.
Elaboré conformément aux dispositions de la Constitution notamment ses articles 147 et 148, et loi n°62.99 formant Code des juridictions financières ce rapport sur l'exécution du budget au titre de l'année 2017 soulève plusieurs constats.
Résultats
Il ressort du rapport une amélioration du déficit, mais une progression continue de la dette.
« L'exécution du budget de l'Etat au titre de l'année 2017 s'est soldée par un déficit budgétaire de 37.843 MDH. Par rapport à 2016, le déficit budgétaire a poursuivi sa trajectoire d'amélioration, entamée depuis 2012, avec une baisse de 6.053 MDH, soit 13,9%. Cette amélioration est due à une évolution favorable de 56,1% du solde ordinaire qui s'est établi à 24.125 MDH, contre 15.545 MDH à fin 2016. Elle s'explique par une augmentation des recettes ordinaires (+11.464 MDH) plus importante que celle des dépenses globales (+6.021 MDH) », lit-on dans un communiqué de la Cour des comptes.
Quant à la dette du Trésor, elle a poursuivi sa trajectoire haussière avec un volume additionnel de 34.860 MDH pour atteindre un total encours de 692 MMDH, soit un accroissement de 5,3% par rapport à 2016. Cette progression continue du volume de la dette du Trésor a été atténuée, en 2017, par une augmentation significative du PIB par rapport à 2016. Ainsi, le ratio de la dette du Trésor par rapport au PIB a connu une légère hausse passant de 64,9 % en 2016 à 65,1 % en 2017.
Néanmoins, la charge de la dette a continué de régresser depuis le pic enregistré en 2013. En 2017, elle s'est établie à 127.871 MDH en diminution de 1.105 MDH par rapport à 2016 ayant enregistré une charge de 128.976 MDH.
Il ressort du rapport que ce niveau d'endettement du Trésor n'intègre pas les créances de l'Etat envers les EEP et les autres entreprises du secteur privé en matière de TVA et d'IS. En effet, malgré les efforts entrepris par le gouvernement, ces dernières années, pour apurer ces créances, les dettes de l'Etat vis-à-vis des EEP et du secteur privé s'élèvent à 51.800 MDH, dont 32.200 MMDH au titre du crédit de TVA des EEP.
De même, la dette des EEP a continué de progresser avec un rythme plus important que celui de la dette du Trésor. Elle a atteint 277.755 MDH à fin 2017 contre de 261.233 MDH en 2016 à, soit un encours additionnel de 16.522 MDH et un accroissement de 6,4%. La dette en devises, ayant totalisé 178.300 MDH soit 16,7% du PIB, représente 53,9% de l'endettement public extérieur.
En conclusion, la situation de la dette montre globalement une continuité dans l'accroissement de l'endettement du Trésor et celui des EEP. Par ailleurs, le coût de la dette a continué de profiter des conditions favorables des dernières années que traduit la légère diminution des charges de la dette.
Recettes
Le rapport révèle que les recettes ordinaires sont en progression, mais fortement concentrées.
« En 2017, les recettes ordinaires du budget général se sont élevées à 229.886 MDH, en progression de 5,2% par rapport à 2016. Cette progression s'explique principalement par l'évolution des recettes fiscales nettes qui sont passées de 188.958 MDH à 200.535 MDH, alors que les recettes non fiscales réalisées sont restées quasi-stables en s'établissant à 25.809 MDH contre 25.896 MDH.
En effet, l'augmentation des recettes fiscales est due principalement à la progression des recettes collectées au titre de l'impôt sur les sociétés ayant rapporté un surplus de 7.009 MDH par rapport à 2016, grâce aux résultats des entreprises du secteur financier, des sociétés pétrolières, de l'agence nationale de la conservation foncière, des cimenteries, des sucreries et des sociétés de télécommunications. De même, les recettes de la TVA ont enregistré une amélioration de 4.037 MMDH en raison de l'augmentation de la consommation des ménages.
Néanmoins, les recettes fiscales provenant de certains impôts présentent un risque de pérennité en raison de leur concentration sur un nombre restreint de contribuables. C'est le cas notamment de l'impôt sur les sociétés qui présente un taux de concentration très élevé. En effet, en 2017, la moitié du produit de l'IS a été payée par seulement 74 contribuables, soit moins de 2 ‰ des assujettis à cet impôt. De même, 75% du produit de ce même impôt a été payé par seulement 654 contribuables et 80% par 1.069, alors que le nombre d'entités soumises à l'IS, ayant déposé au moins une déclaration pendant les quatre dernières années, est de 338.779.
Dépenses
Elles ont augmenté avec un niveau d'exécution modeste des dépenses d'investissement. En 2017, les dépenses globales, hors amortissement de la dette à moyen et long terme, se sont établies à 272.640 MDH, dépassant les recettes ordinaires de 42.754 MDH, soit 18,6 %. Elles se composent à hauteur de 38,4% de dépenses du personnel, 24,5% de dépenses d'investissement, 21,6% de dépenses en biens et services, 9,9% des intérêts de la dette publique et 5,6% de dépenses de compensation.
Par rapport à 2016, les dépenses globales ont augmenté de 6.021 MDH, soit 2,3%. Cette augmentation est imputable essentiellement aux dépenses d'investissement (+3.228) MDH, aux dépenses de ‟Matériel et Dépenses Diverses" (+ 1.841 MDH), aux dépenses de compensation (+1.233 MDH) et aux charges d'intérêts (+142 MDH), alors que les dépenses de personnel ont baissé de 261 MDH.
De ce fait, les dépenses du personnel demeurent le premier poste de dépenses budgétaires, en 2017, avec 104.598 MDH, soit une baisse de -0,2% par rapport à 2016. Néanmoins, ce montant ne reflète pas la réalité du poids de ces dépenses. En effet, en prenant en considération les cotisations patronales de l'Etat employeur, la part des dépenses de personnel dans les subventions de fonctionnement aux établissements publics administratifs dépendant du budget général de l'Etat et les dépenses du personnel imputés sur certains comptes spéciaux du Trésor, les dépenses de personnel réellement supportées par l'Etat en 2017 dépasseraient les 136.392 MDH, soit une légère progression de 1% par rapport à 2016.
Par conséquent, la masse salariale globale par rapport au PIB s'est établie à 12,8% en baisse de 0,5% par rapport à 2016. Néanmoins, cette réduction ne résulte pas d'un effort particulier de maîtrise de ce type de dépense, mais de la croissance du PIB enregistrée durant cette année.
Par ailleurs, en 2017, le niveau d'exécution des dépenses d'investissement reste modeste même s'il affiche des taux d'émission et de réalisation respectivement de 83% et 79%. Ces derniers sont substantiellement dopés par l'importance des transferts des budgets des ministères et du chapitre des charges communes – investissement vers les comptes spéciaux du Trésor et les EEP. En effet, en neutralisant l'impact de ces transferts, les taux d'émission et de réalisation se réduisent considérablement passant respectivement à 55% et 59%.
Enfin, l'augmentation des dépenses de la compensation est imputable principalement à la hausse de la subvention au gaz butane qui est passée de 6.716 MDH en 2016 à 9.910 MDH en 2017, soit plus 47,5%. En revanche, l'appui à l'ONEE a diminué de 1.500 MDH.
Comptes spéciaux du trésor
Il ressort que les CST continuent d'accumuler des soldes reportés considérables. Rapportées aux recettes et aux dépenses ordinaires du budget général, les recettes et les dépenses des comptes spéciaux du Trésor ont représenté en 2017 respectivement 33,9% et 25,9%. Les recettes des comptes spéciaux du Trésor se sont ainsi établies à 77.871 MDH et les dépenses à 70.672 MDH.
Certains comptes d'affectation spéciale sont dotés de recettes dont les montants dépassent significativement ceux de leurs dépenses. Cette situation reflète une carence dans le processus d'allocation des ressources. Cet excès de recettes sur les dépenses conduit à l'accumulation de soldes créditeurs importants. Ainsi, au titre de la gestion de l'année 2017, les comptes d'affectation spéciale ont dégagé un solde excédentaire de 12.823 MDH contre une prévision de 8.237 MDH, soit un écart de 56%.
De ce fait, le solde cumulé des comptes spéciaux du Trésor a poursuivi sa tendance haussière en atteignant à fin 2017 un montant total de 130.835 MDH, en augmentation de 6,6% par rapport à 2016.
Services gérés de manière autonome
En dépit de leur faible importance par rapport aux autres composantes du budget de l'Etat, les SEGMA peuvent constituer un levier d'amélioration de certains services publics.
La gestion des SEGMA se caractérise par les insuffisances suivantes :
-Les prévisions de la loi de finances en termes de recettes et de dépenses sont souvent minorées par rapport au potentiel. En 2017, les prévisions ont représenté 38,1% des recettes recouvrées ;
-Un taux d'exécution des budgets ne dépassant pas les 46%.
Communications discordantes du ministère de l'Economie et des Finances
Le reporting sur l'exécution du budget de l'Etat se fait à travers la situation des charges et
des ressources du Trésor publiée par la DTFE et le bulletin mensuel des statistiques des
finances publiques publié par la Trésorerie générale du Royaume (TGR).
Ces deux communications ne concordent pas sur certaines données tant en termes de prévision qued'exécution.
Ces discordances ne facilitent pas la lisibilité et l'exploitation des données relatives au
budget de l'Etat surtout que les différences, souvent non expliquées, concernent plusieurs
composantes dont certaines sont très importantes pour une analyse pertinente de l'exécution du budget.
A titre d'illustration, en matière d'exécution des recettes ordinaires, la SCRT fait état d'un
montant de 229.886 MDH contre 222.724 MDH dans le reporting de la TGR, soit un écart de
7.162 MDH. De même, le solde ordinaire s'élève respectivement à 24.125 MDH et 15.826 MDH dans
la première et la deuxième sources, soit un écart de 8.299 MDH.
Par ailleurs, la présentation des résultats de l'exécution du budget, au niveau de la SCRT,
n'est pas suffisamment détaillée pour appréhender la réalité du poids de chacune de ses
composantes.
Ainsi, les recettes fiscales y figurent en montants nets, ce qui ne permet pas de renseigner
sur l'importance de la contribution de l'économie et de l'effort de recouvrement de l'Etat.
Cette situation concerne essentiellement les recettes de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA),
de l'impôt sur les sociétés (IS), de l'impôt sur le revenu (IR) et de la taxe intérieure sur la consommation (TIC) des produits énergétiques.
Ainsi, pour l'exercice 2017, les recettes nettes recouvrées en faveur du budget général de
l'Etat (BGE), au titre de la TVA, figurent pour un montant net de 56.885 MDH alors que leur
montantbrut est de 81.264 MDH. Pour l'IS et l'IR, les recettes nettes recouvrées sont
respectivement de 49.971 MDH et 39.307 MDH pour un équivalent en brut respectivement de
50.991 MDH et 40.109 MDH.
En outre, la SCRT ne fait pas ressortir le détail des dépenses en matériel et dépenses
diverses.
Elle agrège lesdites dépenses, dont l'individualisation reste nécessaire, avec les charges
communes hors charges de compensation sous l'intitulé "autres dépenses en biens et services".
En 2017, elle comporte un montant de 58.755 MDH au titre des "autres biens et services" alors
que celui exécuté en dépenses de matériel et en dépenses diverses n'est que de 39.262 MDH.
Le rapport en langue française ainsi que sa synthèse en langue arabe et française sont consultables sur le site web de la Cour des comptes : www.courdescomptes.ma


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