Ecrit par L. Boumahrou | La réussite du chantier de la généralisation de la couverture sanitaire dépendra de la mise à niveau du système de santé. Pour remédier aux dysfonctionnements dont souffre le système, le ministre de Santé a concocté un projet de loi. 2022 est une année cruciale pour la mise en œuvre du chantier de la généralisation de la couverture sanitaire. Un chantier vital pour des millions de Marocains qui ne bénéficient pas du droit constitutionnel d'accès aux soins. Aujourd'hui et grâce à ce chantier, 22 Marocains qui étaient hors couverture disposeront de l'AMO et ainsi accéderont aux soins de santé, aux allocations familiales ainsi qu'à la retraite. Sauf que la réussite de ce chantier dépendra de la mise à niveau du système de santé. Un système qui rappelons-le souffre de plusieurs maux et qui ne répond pas aux attentes des Marocains. Le dernier rapport de la Cour des comptes sur le système de santé avait décelé plusieurs dysfonctionnements concernant principalement la mise en place, l'opérationnalisation et l'efficacité des instances de gouvernance et des outils de gouvernance et de planification tel que prévu par la réglementation. Conscient de l'impératif de revoir le système de santé pour réussir le chantier de la généralisation de la couverture sanitaire et remédier aux manquements et défaillances, le ministre de la Santé et de la Protection sociale a présenté devant Sa Majesté le Roi, lors du Conseil des ministres, un projet de loi-cadre relatif au système national de santé. Ce projet de loi élaboré en exécution des Hautes instructions Royales a pour objectif la révision du système de santé pour qu'il soit à la hauteur du chantier de la généralisation de la protection sociale ordonné par le Souverain. Ce projet de réforme structurant est basé sur quatre piliers fondamentaux. Ainsi le premier pilier concerne l'adoption d'une bonne gouvernance visant le renforcement des mécanismes de régulation de l'action des acteurs et la consolidation de la gouvernance hospitalière et la planification territoriale de l'offre sanitaire sur tous les niveaux. Un pilier qui permettra de remédier au constat de la cour des comptes qui a stipulé que « la majorité des organes de gouvernance en matière de fonctionnement et de gestion du système de santé et de l'offre de soins prévus n'a pas été instaurée. Quant à ceux qui ont été instaurés, ils ne sont pas tous fonctionnels, et quand ils le sont, ils restent peu dynamiques et peu efficaces ». Pour y faire face, ce projet de loi prévoit la création d'une Haute Autorité de la santé, d'une Agence des médicaments et des produits de santé et d'une Agence du sang et produits dérivés du sang. Il sera également question de réviser au niveau central les missions, les fonctions et l'organisation de l'administration centrale. Sur le plan territorial, il est question de créer des groupements sanitaires territoriaux, qui seront chargés principalement de l'élaboration et de l'exécution du programme national régional et du renforcement des mécanismes de coopération et de partenariat entre les secteurs public et privé. Le deuxième pilier de ce projet est relatif à la valorisation des ressources humaines. Rappelons que le Maroc souffre d'une pénurie aiguë en personnel de santé. Chiffres à l'appui, le déficit est estimé à 32.000 médecins et 65.000 infirmiers, couplé à un déséquilibre dans leur affectation dans les régions et une disparité régionale de l'offre sanitaire qui ne répond pas aux aspirations des citoyens. Avec 0,7 médecin et 1,1 infirmier et sage-femme par 1.000 habitants, nous sommes bien loin des standards de l'OMS qui préconise 1,9 médecin et 4,45 infirmiers par 1.000 habitants. Autre indicateur et pas des moindres, le Maroc compte seulement 222 réanimateurs dans le secteur public et 485 dans le privé. Ce projet de loi prévoit ainsi l'élaboration de la loi sur la fonction publique sanitaire, en vue de motiver le capital humain dans le secteur public, réduire le manque actuel en ressources humaines, réformer le système de formation, outre l'ouverture sur les compétences médicales étrangères et l'encouragement des cadres médicaux marocains résidant à l'étranger à retourner exercer dans leur pays. Une loi qui devrait retenir les lauréats qui quittent le Maroc mais aussi pour inciter ceux qui ont quitté à retourner au bercail. Il est à noter qu'il y a 14.000 médecins marocains qui exercent à l'étranger qu'il faudra reconquérir. Le ministre de la Santé et de la Protection sociale, Khalid Aït Taleb avait déclaré dans l'émission Hiwar, que pour atteindre cet objectif ? il faudra redonner à la fonction sanitaire la place qu'elle mérite par rapport aux besoins du pays. Le troisième pilier de ce projet de loi concerne la mise à niveau de l'offre sanitaire en vue de répondre aux attentes des Marocains en matière de facilitation de l'accès aux services médicaux, l'amélioration de leur qualité et la répartition équitable des services hospitaliers à travers le territoire national, via la réhabilitation des structures sanitaires primaires, la mise à niveau des hôpitaux, l'instauration de l'obligation de respect du parcours de soins, en plus de la création d'un système d'homologation des établissements de santé. « Les visites d'un échantillon d'établissements hospitaliers nouvellement construits ont montré, d'une part, que les spécialités dispensées par ceux-ci s'écartent de celles prévues par la réglementation et de leur programme médical, et que d'autre part, le manque des ressources humaines nécessaires à leur mise en service a impacté négativement l'exploitation de certaines de ces structures », avait relevé le rapport de la cour des comptes. Le quatrième et dernier pilier porte sur la digitalisation du système de santé, à travers la mise en place d'un système informatique intégré pour le regroupement, le traitement et l'exploitation des principales informations ayant trait au système de santé.