Alors que les enjeux sont énormes, les partis politiques font du nombrilisme et s'intéressent plus à leurs querelles intestines qu'à l'intérêt général. par J.B. Le rapport de Ban Ki-moon sur le Sahara est dangereux. Le Roi a réagi de manière à remettre les choses à l'endroit, a nommé un nouveau représentant à l'ONU, expert dans les instruments onusiens de défense des droits de l'homme. Qu'ont fait les partis politiques ? Rien. Ce qu'il y a de dangereux dans le rapport de Ban Ki-moon, ce n'est pas uniquement l'évocation de l'extension de la mission de la Minurso à la prétendue protection des droits de l'Homme, ce qui constituerait en soi une atteinte à la souveraineté nationale. Le plus grave, c'est qu'il demande au Conseil de Sécurité de placer l'affaire du Sahara dans le contexte de l'article 7 et non pas l'article 6. Cela veut dire que le Conseil de Sécurité ne chercherait plus à arriver à une solution négociée acceptée par les deux parties, mais qu'il imposerait sa solution, y compris par la force. La réaction royale a été à la mesure de la menace, mais les chefs de partis regardent ailleurs. C'est à se demander s'ils savent ce que l'article 7 veut dire. Certains journaux partisans ont préféré s'attarder sur la nomination du nouveau représentant à l'ONU qui n'est pas passée par le Conseil du gouvernement. Ils narguent Abdelilah Benkirane, incapable à leurs yeux de défendre ses prérogatives, alors qu'il s'agit de l'affaire du Sahara et que la constitution le précise, le Roi est le garant de la souveraineté nationale. Et puis, il y a le projet de résolution présenté par les Etats unis qui lui, maintient le statu quo. Les mêmes journaux crient victoire. Il faut se calmer parce que dans six mois, le problème sera à nouveau posé et que nos adversaires ne désarment pas. La seule chose qui fonctionne en Algérie, c'est la haine du Maroc ! Egoïsme mortel Pendant ce temps, le parlement a écourté sa session du printemps de deux semaines pour laisser l'USFP régler ses problèmes internes. En effet, la lutte entre Zaïdi et Driss Lachgar autour du contrôle du groupe parlementaire a paralysé la première Chambre pendant deux semaines, alors que l'affaire du Sahara passait par un moment critique ! Mais l'USFP n'est pas le seul à connaître des remous. Au PJD, Benkirane fait son possible pour minimiser l'échec lors des élections partielles. Il promet à ses troupes la victoire lors des élections générales. Il affirme que « celui qui s'oppose à Benkirane perd son temps ». Ce qui est une drôle de conception de la démocratie. Au PPS, la préparation du congrès n'est pas un exercice de toute tranquillité. La bataille fait rage entre ceux qui soutiennent l'alliance avec le PJD, la majorité du Comité central et ceux qui la qualifient de « trahison » des idéaux du parti. Les débats sont houleux, souvent excessifs. A l'Istiqlal, la purge du clan El Fassi est mal vécue par beaucoup de cadres du parti. Le MP enregistre des frictions, plusieurs candidats voulant pousser Laenser vers la sortie en arguant que cela fait 26 ans qu'il est secrétaire général. Tous ces problèmes font partie de la vie d'une structure partisane. Même les ambitions personnelles, tant qu'elles ne font pas obstacle à l'action collective sont naturelles. Mais le rôle des partis politiques ce n'est pas de gérer les appétits. Leur rôle en démocratie c'est l'encadrement de la population, dans le cadre d'un débat d'idées autour des politiques publiques. A part l'affaire du Sahara, il y a la réforme des retraites qui préoccupe tous les Marocains. Aucun parti, n'a à ce jour, publié ce qu'il considère comme une réforme souhaitable. Le PJD qui dirige le gouvernement et qui aura donc la lourde charge de défendre la réforme, ne l'évoque même pas du bout des lèvres. Selon des statistiques officieuses, nous avons perdu des dizaines de milliers d'emplois en 2013. Pain béni pour l'opposition partout dans le monde, pas chez nous parce que l'opposition regarde son nombril. Les téléspectateurs qui ont suivi la séance des questions orales ont dû bien rire. Attaqué sur la question du Baccalauréat international, par un député Istiqlalien qui y voit «une volonté de dénaturer l'identité nationale », rien de moins, Rachid Belmokhtar a rappelé que l'accord avait été signé en 2009, par Abbas El Fassi, à l'époque secrétaire général de l'Istiqlal. Ils ne connaissent même pas leurs dossiers ! Cette déconnection par rapport aux réalités, aux attentes de la population est dangereuse pour la démocratie. Elle sape la confiance dans les institutions et démobilise. Le taux de participation, pire, l'inscription dans les listes électorales en pâtissent. Nous sommes 20 millions de Marocains en âge de voter, seuls 13 millions sont inscrits. Il n'y a pas pire désaveu que celui-là.