Face à une baisse de production de 40 %, le Maroc suspend les droits de douane sur l'huile d'olive et se tourne vers le Brésil pour stabiliser les prix et garantir la sécurité alimentaire. Le Maroc, grand consommateur et producteur d'huile d'olive, traverse une crise marquée par une forte hausse des prix de cette denrée essentielle. Cette situation, déclenchée par une baisse importante de la production nationale, a conduit le gouvernement marocain à prendre des mesures exceptionnelles. Parmi celles-ci, la suspension temporaire des droits de douane sur les importations d'huile d'olive et le recours à des fournisseurs alternatifs, comme le Brésil. Ces décisions visent à stabiliser les prix et à garantir la sécurité alimentaire, tout en mettant en lumière des défis structurels pour la filière oléicole marocaine. Une production nationale en chute libre En 2024, la production marocaine d'huile d'olive a connu une chute dramatique, avec une baisse de 40% par rapport aux années normales. Cette situation résulte de sécheresses consécutives et d'une vague de chaleur persistante, qui ont gravement impacté les rendements des oliveraies marocaines. Traditionnellement, le Maroc figure parmi les principaux producteurs mondiaux, avec une production annuelle moyenne dépassant les 140 000 tonnes. Cependant, les conditions climatiques défavorables ont réduit cette capacité à environ 95 000 tonnes, créant un déséquilibre entre l'offre et la demande sur le marché intérieur. Lire aussi | Les défis du secteur de l'huile d'olive face aux bouleversements climatiques La flambée des prix qui s'en est suivie a frappé de plein fouet les ménages marocains. Le litre d'huile d'olive, qui coûtait environ 70 à 80 dirhams, dépasse aujourd'hui les 120 dirhams, rendant ce produit de base inaccessible pour de nombreux consommateurs. L'Espagne, premier producteur mondial d'huile d'olive et fournisseur traditionnel du Maroc, aurait pu pallier le déficit marocain. Cependant, le pays connaît lui aussi une crise sans précédent. Des sécheresses prolongées et des températures extrêmes ont réduit de moitié sa production, qui est passée de 1,3 million de tonnes à seulement 660 000 tonnes en 2024. Cette situation a également entraîné une flambée des prix sur le marché international, rendant l'huile d'olive espagnole moins compétitive. Le Brésil, une alternative stratégique Face à cette situation, le Maroc s'est tourné vers le Brésil, un acteur émergent dans le secteur de l'huile d'olive. Bien que sa production soit encore modeste par rapport à celle des géants méditerranéens, le Brésil a su se positionner comme un fournisseur fiable et compétitif. En 2023, les exportations agricoles brésiliennes vers le Maroc ont atteint 1,23 milliard de dollars, témoignant de relations commerciales solides entre les deux pays. Lire aussi | L'Espagne supprime la TVA sur l'huile d'olive face à l'envolée des prix Le Maroc a autorisé l'importation de 10 000 tonnes d'huile d'olive brésilienne, exonérées de TVA et de droits de douane, jusqu'au 31 décembre 2024. Cette mesure vise à stabiliser les prix sur le marché intérieur tout en garantissant un approvisionnement suffisant. Ce partenariat renforce également la coopération bilatérale entre Rabat et Brasilia, qui pourrait s'étendre à d'autres secteurs agricoles stratégiques. Pour atténuer les effets de la crise, le gouvernement marocain a décidé de suspendre temporairement les droits de douane sur les importations d'huile d'olive. Cette mesure, en vigueur jusqu'à fin 2024, poursuit trois objectifs principaux, à savoir : stabiliser les prix en réduisant les coûts d'importation pour offrir une alternative plus abordable aux consommateurs ; assurer la sécurité alimentaire en garantissant un approvisionnement stable en huile d'olive, une denrée essentielle pour les foyers marocains ; et soutenir le pouvoir d'achat pour atténuer, un tant soit peu, l'impact de la flambée des prix sur les ménages. Les défis à long terme pour la filière marocaine Si les importations représentent une solution immédiate, elles ne répondent pas aux problèmes structurels de la filière oléicole marocaine, car face à de telles crises qui risquent de se reproduire dans ce contexte structurant du réchauffement climatique et des sécheresses consécutives, le Maroc devra investir dans des solutions durables et résilientes. Lire aussi | Huile d'olive. Limiter l'exportation pour stabiliser les prix A ce titre, les experts pointent plusieurs pistes complémentaires qui consistent dans le renforcement, par le Maroc, de sa résilience climatique, et cela à travers le développement de variétés d'oliviers résistantes à la sécheresse et l'adoption de techniques d'irrigation moderne à même de stabiliser la production ; dans le soutien aux producteurs locaux à travers des subventions et des formations pour moderniser les exploitations et ainsi améliorer les rendements ; dans la diversification des marchés à travers un investissement dans plus de qualité et plus de valorisation pour renforcer ses exportations et réduire sa dépendance aux importations ; et, enfin, dans la promotion de la durabilité en sensibilisant et en accompagnant les producteurs et les consommateurs pour des pratiques durables qui aident à préserver cette ressource précieuse. La crise de l'huile d'olive met en lumière les défis et opportunités liés à la sécurité alimentaire dans un contexte de changement climatique global. Elle invite à installer les conditions structurelles pour une meilleure réponse, sur le plan stratégique, à des situations similaires appelées, au vu des perspectives qu'offre le réchauffement climatique, à se succéder dans le temps.