Il aura fallu un communiqué du ministère des affaires étrangères et de la coopération, un appel téléphonique du roi Mohammed VI au chef de l'Etat mauritanien Mohamed Ould Abdelaziz, un déplacement en catastrophe en Mauritanie du chef du gouvernement désigné Abdelilah Benkirane, un revirement spectaculaire du numéro 2 du parti Taoufik Hjira, pour que Hamid Chabat, secrétaire général du parti de la Balance daigne enfin sortir de son silence et réparer sa « vérité » selon lui, sa bourde, selon les autres, sur la « marocanité » de la Mauritanie. Chabat, dont les propos remettant en question l'intégrité de la Mauritanie, a choisi de faire son mea culpa, à peine voilée, dans un éditorial de l'organe du parti Al Alam. « Si c'est nécessaire de s'excuser auprès du peuple mauritanien pour tout ce qui peut résulter de ce malentendu (…), le secrétaire général et les dirigeants du parti de l'Istiqlal n'hésitent pas à présenter des excuses à la Mauritanie soeur, Président, Gouvernement et Peuple », lit-on dans cet éditorial. Ce dernier tente d'atténuer la sortie fracassante sur la Mauritanie en soulignant qu'il (Chabat) parlait d'un contexte historique révolu. Il affirme que « les relations excellentes entre les deux peuples frères marocain et mauritanien dépassent ce que d'aucuns pourraient planifier pour leur porter préjudice ». Chabat, qui, il y a quelques jours, se tenait debout fier au milieu des siens, écoutant le porte-parole du parti donner lecture au communiqué répondant aux termes qui « manquent de délicatesse et d'élégance » utilisés par le département Salaheddine Mezouar le critiquant et le qualifiant d' »irresponsable », a senti le vent tourner contre lui, tel un cyclone qui risque bien de l'emporter à en juger par les critiques qui fusent de partout et surtout le revirement spectaculaire de ceux là mêmes qui écoutaient dans un silence cardinal la lecture du communiqué incendiaire du PI. Parmi eux, pour l'instant, Taoufik Hjira et Yasmina Baddou, qui se sont démarqués de lui, et qui jurent, la main sur le cœur, n'avoir réalisé qu'après la gravité de tels propos sur « la question de l'intégrité territoriale » notamment et sur les relations avec la Mauritanie. Ils ne s'attendaient peut être pas que le roi allait lui même monter au créneau, pour signifier à Chabat qu'il venait de transgresser la ligne rouge et qu'il vaudrait mieux qu'il cesse de jouer au pyromane. Quant à Benkirane, qui soutient mordicus qu'aucun gouvernement ne se fera sans son ancien ennemi d'hier et son « allié » d'aujourdui, en l'occurrence Hamid Chabat, personne ne connait le fond de sa pensée même s'il a, lui aussi, qualifié, à Zouerate où il venait d'être reçu mercredi, par le président mauritanien, les propos du dirigeant de Istiqlal d' »irresponsables qui n'engagent que lui et non le Maroc ». D'aucuns ont remarqué d'ailleurs la façon dont il lisait une déclaration écrite sur laquelle jetait, de temps à autre, un regard furtif le chef de la diplomatie mauritanienne, une lecture expresse comme s'il voulait s'en débarrasser le plus vite possible, lui qui adore improviser au risque de commettre lui aussi des bourdes. Avec ses propos sur la Mauritanie, Chabat vient de retarder davantage la formation du gouvernement attendu depuis le 7 octobre dernier. Mais il aura cependant réussi à rapprocher un peu les deux pays dont la crise latente pointait depuis longtemps à l'horizon. Et comme l'a si bien dit Abdelilah Benkirane, « à quelque chose malheur est bon ». Pour une fois, il a raison.