Le Conseil de la concurrence a dévoilé de profondes dérives dans le secteur de l'élevage au Maroc, attribués à la domination d'un nombre limité de grandes entreprises sur le marché des aliments composés pour bétail. Cette situation «pénalise particulièrement les petits et moyens éleveurs qui peinent à négocier et à s'adapter aux fluctuations du marché», selon l'institution indépendante. Dans un avis consacré à la "situation de la concurrence sur le marché des aliments composés au Maroc", le Conseil révèle que «huit entreprises concentrent 75 % du marché tandis que deux groupes principaux contrôlent à eux seuls la moitié des parts, malgré la présence de 48 opérateurs actifs.» Le rapport attribue cet état de fait à une restructuration du marché marquée par la disparition de nombreuses petites entreprises au profit de grands groupes ayant procédé à des opérations de concentration économique pour bénéficier d'économies d'échelle. Cette domination «affaiblit considérablement la compétitivité du secteur limitant les opportunités de diversification et d'innovation, avec des conséquences négatives pour les éleveurs.» Ces derniers, principaux consommateurs d'aliments composés, se trouvent confrontés à une réduction des choix disponibles et à une hausse non concurrentielle des prix, alourdissant davantage leurs charges économiques. Le rapport souligne que les prix des aliments composés ont augmenté de 45 % entre 2018 et 2023, en raison de la forte hausse des coûts des matières premières à l'échelle mondiale. Ces dernières, indispensables à la fabrication des aliments composés, ont enregistré une augmentation moyenne de plus de 50 %, principalement en raison des fluctuations des prix des céréales et des oléagineux. Ces hausses «s'expliquent par les perturbations climatiques mondiales et les tensions géopolitiques, qui ont exercé une pression accrue sur les marges bénéficiaires des fabricants.» Ces derniers, à leur tour, ont répercuté ces coûts sur les consommateurs finaux. Le Conseil observe également que les entreprises dominantes ont adopté des stratégies de concentration économique leur permettant de réaliser d'importantes économies d'échelle. Cependant, cette situation a réduit les marges d'innovation et entravé l'entrée de nouveaux acteurs sur le marché. Cette concentration pose de sérieux défis pour équilibrer les intérêts des grands groupes et ceux des éleveurs, qui dépendent fortement des aliments composés pour l'élevage de leur bétail. Le rapport avertit qu'un maintien de la situation actuelle pourrait accentuer les pressions économiques sur le secteur agricole. Il appelle à la mise en œuvre de mesures visant à renforcer la concurrence, à favoriser l'innovation et à diversifier l'offre sur le marché.