Au Maroc, on a cette fâcheuse tendance à annoncer des événements qui se dérouleront au Maroc et pour les Marocains depuis l'étranger. C'est le cas de l'annonce faite par l'Orchestre Philharmonique du Maroc (OPM) qui a présenté, lundi à Paris, sa nouvelle série de concerts qui seront organisés du 10 au 15 octobre dans plusieurs villes du Royaume sous le thème « Les religions à l'unisson ». Se déplacer jusqu'à Paris pour faire une telle annonce comme si le Maroc ne dispose pas de supports médiatiques ou de lieu de culture pour faire part d'un tel événement comme s'il s'agissait de l'orchestre philharmonique de Vienne ou de Berlin qui feraient le déplacement au Maroc, a de quoi étonner de la part de nos responsables. C'est à se demander si on doit obtenir « le visa » de la part de la France pour que les Marocains puissent avoir droit à de tels concerts. Même si ces derniers, comme l'a souligné le président fondateur de l'OPM, Farid Bensaïd, lors d'une conférence de presse à l'Institut du monde arabe (IMA), visent à mettre la musique « au service du rapprochement entre les peuples, les cultures et les religions », et diffuser un message de paix et de tolérance, il aurait peut être mieux valu faire cette annonce à Rabat, ou Casablanca ou Marrakech, ou Khouribga, bref de n'importe quelle ville du royaume au lieu d'annoncer en fanfares ce rendez-vous musical à partir de l'IMA à Paris. Car en fin de compte, il s'agit d'un orchestre marocain qui donnera des concerts pour ses concitoyens, et à la limite en présence des étrangers qui vivent parmi nous. Pour revenir à ce fameux événement, il s'agit de mettre en scène trois artistes des trois confessions (musulmane, juive et chrétienne), à savoir la soprano de renom Caroline Casadesus et les pianistes Eloïse Bella Kohn et Dina Bensaïd qui étaient à l'origine du projet « Le Yadaïn Piano Duo » lancé en 2005 (Yadaïn est un mot qui signifie en hébreu comme en arabe « les deux mains ») pour faire véhiculer un message d'écoute, de dialogue et de respect, a expliqué M. Bensaïd, soulignant que l'Orchestre sera dirigé lors de ces concerts par le talentueux Jean-Claude Casadesus. Une excellente initiative de la part des organisateurs mais cela n'explique toujours pas le pourquoi de cette annonce à partir de l'Héxagone. Quant aux 6.000 spectateurs attendus à ces concerts, prévus à Rabat, Casablanca et Marrakech, Bensaïd a formé le vœu de faire de cette série un rendez-vous annuel destiné à promouvoir le rapprochement entre les peuples et les religions, en l'occurrence entre le peuple marocain et le peuple marocain. Pour sa part, le président de l'IMA, Jack Lang, a indiqué que ces concerts constitueront « un moment fort artistiquement et beau humainement », soulignant qu'ils viennent refléter un Maroc aux mille couleurs et un pays qui œuvre à la promotion d'un islam de lumière face au fanatisme. Bien évidemment, il ne faut pas s'attendre à ce que le respectueux ami du Maroc aille demander aux organisateurs pourquoi ils ont choisi son institution pour annoncer l'événement, lors d'une cérémonie très restreinte dépourvue de couverture médiatique étrangère et plus précisément française. L'OPM dont tous les marocains et en particulier les mélomanes sont fiers, est aujourd'hui composé de 80 musiciens, essentiellement marocains, sélectionnés parmi les diplômés des grands conservatoires marocains et européens. Créé il y a près de 20 ans, l'OPM a déjà abordé avec passion un large répertoire d'émotions et de sensibilités musicales. Bon spectacle quand même.