Elyes Kasri, analyste politique et ancien ambassadeur a dénoncé, dans une sortie sur les réseaux sociaux largement commentée, l'entrisme que veut exercer l'Algérie par rapport aux choix diplomatiques souverains de la Tunisie. Il appelle en même temps à «recalibrer» les relations avec le voisinage direct de son pays. «En l'absence d'une communication transparente et crédible, les interprétations des raisons et de la teneur de la visite en Algérie du ministre tunisien des affaires étrangères apparemment pour s'expliquer, selon des personnes censées être mieux informées que d'autres, sur la suspicion que nourrissent certains cercles algériens d'une tentation tunisienne de normaliser les relations avec le voisin marocain et l'Etat d'Israël est d'une gravité qui mérite qu'on s'y arrête pour en mesurer la signification et la portée», a-t-il noté. «Qu'un ministre des affaires étrangères d'un pays supposé indépendant soit convoqué et sommé d'expliquer les choix de son pays sur des bases hypothétiques car cette normalisation avec Israël irait à l'encontre du discours officiel et d'un consensus des forces politiques tunisiennes, révèle, outre la susceptibilité excessive de nos voisins algériens qui ne date pas d'hier, mais un procès d'intention doublé du sentiment de détenir un droit de regard sur la politique étrangère de la Tunisie dont on commence à zapper inconsciemment l'indépendance et la souveraineté pour la considérer comme le disent certains impertinents de 59e wilaya algérienne», dénonce M. Kasri. Tilt trop poussé à l'égard de l'Algérie «Si la diplomatie tunisienne a commis de nombreux impairs et erreurs d'appréciation au cours des dernières années, le tilt trop poussé en direction de l'Algérie et les relations inégales avec ce voisin semblent se ranger au sommet des erreurs diplomatiques pour présenter les attributs d'une faute, pour ne pas dire autre chose, envers la souveraineté nationale», a-t-il souligné. Pour l'ancien diplomate, «il est grand temps de revoir nos relations avec nos voisins maghrébins et de procéder à un rééquilibrage susceptible de nous donner une plus grande marge de manœuvre et de préserver nos intérêts et notre souveraineté», citant spécifiquement le Maroc. «Quels que soient les griefs que certains reprochent au Maroc, il ne faut pas oublier le passé et son rôle salutaire lorsque des terroristes en provenance de Libye via l'Algérie ont attaqué Gafsa en janvier 1980, ni l'avantage stratégique que nous confèrerait un rétablissement des relations de coopération et de confiance avec ce pays frère avec lequel nous avons de nombreuses affinités même si elles peuvent être chahutées des fois par une compétitivité qui peut être considérée débordante et parfois excessive.» «Il est grand temps de revoir les choix diplomatiques et stratégiques des dernières années car ils nous mènent vers l'isolation et l'impasse et font de la Tunisie un fruit mûr pour toute tentation de domination extérieure en lui imposant des choix qui vont à l'encontre de ses moyens et de ses intérêts», a-t-il conclu.