Le PJD, à la tête du gouvernement marocain depuis une décennie, a été puni pour deux mandats entachés d'échecs et de compromissions lors des élections législatives mercredi dans le royaume. « La débâcle est sans appel, bien plus sévère que ne l'annonçaient la plupart des observateurs. Le Parti de la justice et du développement (PJD, islamiste), au pouvoir au Maroc depuis dix ans, a essuyé, mercredi 8 septembre, un cinglant revers lors d'élections législatives à l'issue desquelles il n'arrive qu'en huitième position (12 sièges sur 395) » écrit le spécialiste du Maghreb Frédéric Bobin. «Cette déroute met un terme à la séquence des islamistes. Leur échec ouvre désormais la voie à la montée en puissance du Rassemblement national des indépendants (RNI), dirigé par Aziz Akhannouch, qui devient le premier parti représenté à l'Assemblée, avec 97 sièges. La deuxième position revient au Parti authenticité et modernité (PAM) – 82 sièges –, talonné par le Parti de l'Istiqlal (PI)» détaille-t-il. «Le taux de participation s'est élevé à 50,35 %, en hausse par rapport au scrutin de 2016 (42,29 %), malgré une campagne plutôt terne menée principalement sur les réseaux sociaux, contraintes sanitaires obligent. Les conditions dans lesquelles le scrutin s'est déroulé n'étaient assurément pas favorables au PJD, déjà affaibli par ses compromissions dans l'exercice du pouvoir. Le changement de calcul du quotient électoral, désormais fondé sur le nombre d'inscrits et non plus de votants, visait à doper les chances des formations moyennes» assure-t-il. Les résultats soulignent, malgré tout, «un rejet indéniable» du PJD, miné par «une profonde crise de crédibilité», relève Youssef Belal, professeur de sciences politiques à l'université Columbia de New York et auteur de travaux sur l'islamisme marocain, interrogé. «Le PJD paie aujourd'hui le prix de toutes les couleuvres qu'il a dû avaler durant l'exercice du pouvoir», ajoute M. Belal. Pour M. Bobin, «le PJD avait toutefois dû composer avec des partenaires au sein de coalitions » dénaturées. Il avait validé « le renforcement de la place du français dans l'enseignement public ou la légalisation du cannabis thérapeutique. Ces concessions ont fini par faire plonger le parti dans une « crise identitaire », selon M. Belal, qui annonce la « clôture au Maroc du cycle des "printemps arabes"». Le Parti de la justice et du développement s'est effondré, passant de 125 sièges dans l'assemblée sortante à 12, a indiqué le ministre de l'Intérieur Abdelouafi Laftit, durant un point presse.